L’hépatite aiguë B guérit dans 90 % des cas et évolue vers la chronicité dans 10 % des cas. 20 % de ces formes chroniques évoluent vers la cirrhose, avec le risque de développement d’un hépatocarcinome. Quant à l’hépatite C, 25 % d’entre elles guérissent et 75 % deviennent chroniques, avec risque d’évolution vers la cirrhose et le carcinome hépatocellulaire.
Pour considérer la question du dépistage de ces deux maladies, il faut analyser l’impact que les recommandations de dépistage du VIH dans la population adulte ont eu sur les médecins généralistes. « C’est simple, déclare le Dr Jean-Pierre Aubert (Paris), nous n’avons pas adhéré aux recommandations. Une des raisons étant que la prévalence de la maladie était trop faible pour envisager de dépister toute la population adulte ».
Cette attitude amène à reconsidérer le dépistage des hépatites et à essayer de proposer une stratégie rationalisée. D’abord quelques chiffres : il y a environ 150 000 porteurs du VIH en France (3 adultes/1 000), 200 000 porteurs du VHC (4 adultes/1 000) et 300 000 porteurs du VHB (6 adultes/1 000). Il est clair que ces prévalences, rapportées à la patientèle d’un médecin généraliste, sont très faibles.
« Quand on considère les groupes à risque spécifiés dans les recommandations, il ne nous semble pas intéressant de dépister les transfusés d’avant 1992, pense le Dr Aubert. C’est ancien et les patients ne s’en rappellent plus. Il n’est pas non plus évident de demander aux patients s’ils ont été incarcérés, c’est une intrusion dans la vie privée qui me paraît excessive ».
Ce qu’il faut retenir pour le dépistage des hépatites B en médecine générale, selon lui, c’est de considérer quatre groupes à risque. D’abord, les migrants d’origine subsaharienne. On a en effet démontré que dans la patientèle du médecin généraliste, 8 % de ces sujets sont porteurs du VHB et que seulement la moitié le sait. À souligner, les grandes variations d’un pays à l’autre ; ainsi, la prévalence est de 3 % au Sénégal et de 16 à 18 % au Mali. La deuxième population cible est représentée par les usagers de drogue (en IV ou par voie nasale). On a ici 1,5 % de porteurs du VHB. Les hommes qui ont des rapports sexuels avec des hommes (HSH) doivent également être dépistés ; ils sont porteurs du VHB dans 1,37 % des cas. Enfin, dernière catégorie à risque : la famille et les partenaires sexuels des personnes porteuses de l’antigène HBs ou de l’anticorps anti-HBc (lesquelles ont rencontré un jour le VHB).
Pour le VHC, il faut retenir les usagers de drogue, les personnes du Moyen-Orient et les migrants en général ainsi que les HSH.
Trois questions de base
Dans le cadre de la médecine générale, il faut donc conserver un dépistage ciblé, mais réduire le nombre de cibles. Et identifier les facteurs de risque pertinents, c’est-à-dire modifier la façon d’interroger les patients. Trois questions simples sont à poser : où êtes-vous né ? Consommez-vous ou avez-vous consommé des drogues (en injection ou en sniff) ? Avez-vous ou avez-vous eu des rapports sexuels avec des hommes (si c’est un homme bien sûr) ?
Enfin, il faut dépister les trois viroses ensemble et, à un moment donné (pas à la première consultation), engager une enquête familiale. « Mais, questionne le Dr Aubert, faut-il dépister tous les consultants ? On sait déjà que la méthode a échoué pour le VIH. Faut-il dépister les hommes préférentiellement en sachant qu’ils sont plus souvent porteurs et plus souvent ignorants de leur statut ? Je suis partisan de cette attitude en ciblant tous les hommes de 18 à 60 ans et en proposant à toutes les femmes le dépistage des trois viroses lors de la grossesse et de profiter de toute occasion en rapport avec les sexualités pour proposer le dépistage ».
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