LE QUOTIDIEN : Médecin et élève directeur, ce n’est pas très fréquent, non ? Comment avez-vous fait ce choix ?
Dr CHAFIKA MAZOUNI : Dans ma promotion d’élèves directeurs, nous sommes deux médecins ! C’est donc assez rare, et très spécifique. Pour ma part, je suis chirurgienne, spécialiste en oncologie mammaire, et j’ai exercé pendant plus de dix ans à l’Institut Gustave Roussy de Villejuif, dans le Val-de-Marne.
Mais j’ai toujours eu la volonté de faire un pas de côté, ce qui m’a notamment conduite à faire de la recherche… et m’a donné l’occasion de voir une autre dimension de mon métier, par exemple lors de missions pour la HAS [Haute autorité de santé, Ndlr], ou l’ANSM [Agence nationale de sécurité du médicament, Ndlr]. Cela faisait plusieurs années que je voulais monter dans les échelons, mais hormis les postes de chef de pôle, les possibilités étaient limitées. Je me suis donc intéressée à ce que je pouvais faire d’autre.
Et comment avez-vous franchi le pas vers l’EHESP ?
Je dois avouer qu’au départ, je ne savais même pas comment on devient directeur d’hôpital ! J’ai commencé par préparer l’ENA, et c’est ainsi que j’ai réalisé qu’il y avait le concours de directeur d’hôpital, que j’ai préparé aussi. Je tenais à passer par la voie classique, avec la formation intégrale, pour avoir une totale légitimité, plutôt qu'un master en alternance.
Quelles ont été vos impressions lors de la formation ?
C’est une école d’application, nous passons beaucoup de temps en stage et nous apprenons par la pratique. L’idée est d’acquérir une certaine transversalité, car on peut être directeur financier pendant quelques années, puis passer aux affaires médicales pour ensuite devenir DRH… Ce qui m’a frappée, c’est qu’il m’a notamment fallu oublier que j’étais médecin : les modes de pensée, de fonctionnement, de décision ne sont pas les mêmes. Parfois, par exemple, en tant que médecin, on trouve les processus trop lents, mais c’est parce qu’on n’a que trop peu de notions en termes de réglementation, de conduite de projet…
Pensez-vous que votre double formation vous mettra dans une position plus favorable pour améliorer les relations parfois houleuses entre directeurs et médecins ?
Je ne sais pas si cela sera un avantage. Peut-être que je susciterai des interrogations ou de grandes attentes. Mais je pense pour ma part que c’est une plus-value, même si l’objectif n’est pas de revendiquer une sorte d’omniscience. Et j’ose espérer que la qualité des soins — et donc les patients — bénéficiera de mes compétences.
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