Vers un recadrage de la téléconsultation

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Publié le 09/09/2022
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De nouvelles règles sont à attendre dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2023 ainsi que la prochaine convention médicale.

Crédit photo : PHANIE

La télémédecine va-t-elle connaître dans les prochaines années une crise de croissance ? « Nous sommes aujourd'hui stabilisés autour de 1,1 à 1,2 million de téléconsultations par mois, c’est quatre fois moins que pendant la crise du Covid mais c’est 40 fois plus qu’avant, souligne Marguerite Cazeneuve, directrice déléguée à la gestion et à l'organisation des soins de la Cnam. Par rapport à l’ensemble de l’activité des généralistes, c’est à la fois très important et marginal ». 

La pandémie aura eu le mérite de produire, à une échelle totalement inattendue, la preuve de concept des téléconsultations. Le temps semble à présent à son recadrage. « Avant la crise, la téléconsultation était très corsetée puis elle a été libéralisée au moment du premier confinement, admet la numéro 2 de l'Assurance-maladie. Nous sommes, à présent, dans une dynamique de structuration et de sécurisation de cette pratique ».

Ambitions dévorantes

Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2023, qui sera présenté à la fin du mois, devrait fournir un nouveau cadre législatif et probablement imposer de nouvelles contraintes en termes techniques, éthiques et médicaux.

Est-ce bientôt la fin de la téléconsultation au téléphone ou via des applications grand public pour smartphone ? Le retour aux règles de remboursement identiques aux consultations au cabinet  ? Faut-il instaurer un droit de regard sur le contenu et la qualité des consultations à distance ? Comment contenir les ambitions dévorantes des plateformes et autres prestataires de télécabines ? « Nous avons constaté des dérives de certaines plateformes qui font de la publicité sur le fait de pouvoir obtenir un arrêt de travail », déplore Marguerite Cazeneuve.

Riposte immédiate : l'Assurance-maladie vient de proposer au gouvernement que les arrêts de travail prescrits en téléconsultation soient pris en charge uniquement lorsqu'ils sont signés du médecin traitant. Clairement, prescriptions à tire-larigot d'antibiotiques ou télécabines installés dans des supermarchés ne sont du goût ni des médecins libéraux, ni de la Sécu. « Notre refrain sera toujours le même : ne surtout pas contourner le parcours de soin, coordonné et cohérent », insiste la Dr Agnès Giannotti, présidente de MG France.

Téléconsultation assistée

Dans son rapport « Charges et produits », paru début juillet, la Cnam invitait déjà le législateur à créer un « cadre juridique structuré » pour les plateformes de télémédecine. Face au risque évident d'ubérisation, elle estime que « leur activité doit être encadrée, tant sur les conditions de recours à ces solutions, que sur les prescriptions qu’elles induisent, lesquelles doivent répondre aux exigences de qualité et de pertinence des soins qui s’imposent à l’ensemble des professionnels de santé ».

Dans ses mêmes préconisations, l'Assurance-maladie semble en phase avec la Société française de télémédecine (lire page 12) en plaidant pour le développement de la téléconsultation assistée, par exemple par une infirmière. « Cette possibilité d’exercice et la rémunération associées sont trop peu connues des professionnels de santé et des patients », écrivait-elle au début de l'été. Ce point sera au cœur du chapitre sur la téléconsultation dans la prochaine convention médicale, comme la question de la limitation actuelle à 20 % de la part de téléconsultations par rapport à l'ensemble des actes. « Cela nous semble une bonne limite mais le sujet pourra être discuté pendant les négociations, indique Marguerite Cazeneuve. Dans tous les cas, il est appliqué aujourd’hui avec souplesse par les caisses ».

Ce qui est sûr, c'est que de nouvelles normes sont attendues dans la lignée de la charte des bonnes pratiques de la téléconsultation, qui avait été annexée à l'avenant 9 signé en juillet 2021, notamment sur les questions de confidentialité ainsi que de sécurisation et de partage des données. Les questions de contenu et de qualité des soins à distance restent, en revanche, beaucoup plus difficiles à normer.


Source : Le Quotidien du médecin