* « Normale », d'Olivier Babinet
« Une goutte de Miyazaki dans les frères Dardenne », c'est ainsi que le réalisateur Olivier Babinet joue à résumer son film. Au début on craint le pire, avec une scène gore, un Benoît Poelvoorde en père décati et un collège de banlieue avec ce qu'on imagine de garçons grossiers. Puis on suit la jeune Lucie, 15 ans, dans ses angoisses – elle vit seule avec son père, malade, quasiment incapable de s'occuper d'elle – et ses espoirs. Dans ses cauchemars – illustrés façon films de zombies – et ses rêves – un étrange jeune homme. Tandis qu'il va falloir donner à l'assistante sociale qui s'annonce les apparences de normalité. « Normale » s'inspire d'une pièce de David Creig, « le Monstre du couloir », issue d'un atelier théâtre réalisé en Écosse auprès d'ados aidants d’un parent isolé, malade, toxicomane ou alcoolique ; ces jeunes avaient accepté qu'on utilise leur expérience à condition que ce soit drôle et que le public n'ait pas pitié d'eux. Mission accomplie aussi par le film et le duo d'acteurs, avec une Justine Lacroix qui ne se laisse pas faire face à Benoît Poelvoorde.
* « Les Âmes sœurs », d'André Téchiné (12 avril)
Frère et sœur(s), comme dans « les Sœurs Bronté » et « Ma saison préféré ». Le Sud-Ouest, comme dans nombre des films de Téchiné, en l'occurrence l'Ariège, dont la grotte de Bédeilhac et le parc de la Préhistoire, des lieux bien précis et aussi un peu mythiques... (« La forêt avec ses esprits, le manoir hanté comme un château des Carpates, les montagnes avec leurs grottes », commente non sans malice le cinéaste). Mais ce qui est bien, avec « les Âmes sœurs », c'est qu'on ne sait pas trop où on va. Au début, des soldats français au Mali, un véhicule qui explose. Un jeune homme dans le coma, sa sœur à son chevet aux Invalides. Les scènes à l'hôpital traitées « comme un documentaire en accéléré, un marathon ». Puis l'Ariège, le frère amnésique : comment vivre sans passé, reconstruire une relation. On affleure plusieurs fois le drame total, mais Téchiné est trop subtil pour recourir à des émotions primaires. Et ses acteurs le suivent dans l'ambiguité, les infinies nuances, la vie avec ses indécisions et les mauvaises directions souvent prises : Benjamin Voisin (« Été 85 » « les Illusions perdues »), remarquable, Noémie Merlant, troublante. Et aussi André Marcon et Audrey Dana. À voir.
* « Une histoire d'amour », d' Alexis Michalik (12 avril)
À 40 ans, Alexis Michalik n'a plus grand chose à prouver. Auteur à succès (cinq Molière), metteur en scène (deux Trophées de la comédie musicale pour « les Producteurs » de Mel Brooks), acteur (il apparait dans « les Trois Mousquetaires »), romancier (« Loin ») et réalisateur (un premier long métrage «Edmond », d'après sa pièce sur Rostand, très bien accueilli). « Une histoire d'amour », avec 400 représentations, a également triomphé au théâtre et Michalik a eu la bonne idée, et pas seulement pour des raisons économiques, de l'adapter au cinéma avec les actrices de la création, ce qui renouvelle positivement les visages et le jeu. Entre comédie romantique et mélodrame, l'auteur ne lésine pas sur les rebondissements et les grands événements. Amour (entre filles), mariage, naissance (par PMA), rupture, deuils (deux cancers, un accident de la route) se succèdent à (trop ?) bon rythme et la passion comme le désespoir s'expriment avec plus de clichés que de nuances. Tandis que les dialogues n'oublient pas toujours leur origine théâtrale. Mais les actrices, Juliette Delacroix, Marica Soyer, Pauline Bression et Léontine d'Oncieu, subtile et drôle en adolescente, sont trop enthousiastes pour qu'on leur résiste.
* « The Quiet Girl », de Colm Bairéad (12 avril)
Après les ex-amis-ennemis des « Banshees d'Inisherin », l'Irlande rurale nous envoie un autre personnage inoubliable, une fillette trop tranquille sortie de l'imagination de l'écrivaine Claire Keegan (« Foster », en France « les Trois Lumières », Sabine Wespieser Éditeur). Nous sommes en 1981, la famille nombreuse n'a pas beaucoup à manger et Cáit est à la peine avec une mère débordée à nouveau enceinte et un père qui l'ignore. Alors on l'envoie pour l'été chez des parents éloignés, un couple qui vit seul dans une ferme. Tout est vu par le regard de la jeune héroïne, qui découvre sans bien comprendre la possibilité de liens affectifs insoupçonnés, puis ce qui mine ceux qui l'ont accueillie. Une chronique douce-amère qui se passe de grandes explications mais dit beaucoup sur l'enfance et son besoin d'amour. Catherine Clinch est cette confondante quiet girl, face à des comédiens confirmés tels que Carrie Crowley et Andrew Bennett. Un premier long métrage tout en gaélique irlandais, la langue jouant un rôle non négigeable dans cette histoire.
* Et aussi
Le XXe siècle de la Grande Guerre avec « C'est mon homme », premier long métrage de Guillaume Bureau, inspiré par deux faits-divers : un soldat amnésique, deux femmes qui disent reconnaître leur mari (Karim Leklou, Leïla Bekti, Louise Bourgoin). Le XXe siècle de Mai 68 et ses suites avec « l'Établi », de Mathias Gokalp, d'après le récit de Robert Linhart : un Normalien, militant d'extrême-gauche, se fait embaucher comme ouvrier chez Citroën (Swann Arlaud). À partir du 12 avril, « le Prix du passage », de Thierry Binisti, une jeune mère célibataire (Alice Isaaz), un migrant irakien, le passage risqué en Angleterre ; « les Complices », comédie de Cecilia Rouaud, un tueur qui s'évanouit à la vue du sang et en reconversion avec l'aide de gentils voisins (François Damiens, William Legbil, Laura Felpin).
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