Représentant 7 % des tumeurs prostatiques, les cancers de la prostate résistants à la castration non métastatiques (CPRCnm), dépistés précocement, sont majoritairement contrôlés par un traitement local. Cependant, certains cancers découverts plus tardivement vont nécessiter une thérapie de privation androgénique (TPA). Il peut néanmoins se développer une résistance à cette hormonothérapie avec reprise évolutive de la maladie, généralement asymptomatique sauf dans un tiers des cas où des métastases vont apparaître dans les deux ans. À ce stade, la survie n’est plus que de 15 à 35 mois, avec une qualité de vie souvent très altérée. Mais la progression de la maladie reste longtemps indétectable par l’imagerie, et ne se traduit que par une élévation du PSA, le doublement du taux de PSA en moins de dix mois étant à haut risque d’une évolution rapide. Les anti-androgènes non stéroïdiens donnés précocement, en association avec la TPA, ont constitué un réel progrès en montrant, dans des essais de phase III, qu’ils retardaient la survenue de métastases chez les patients à risque, par rapport au placebo associé à la TPA. « Jusqu’à l’arrivée des anti-androgènes, on se trouvait dans une situation terrible, explique le Pr Karim Fizazi (Gustave Roussy). Les patients voyaient leur taux de PSA augmenter et nous n’avions pas d’autre choix que d’attendre l’évolution métastatique, avant de pouvoir débuter un traitement adapté ».
74 mois de survie globale sous apalutamide
L’étude SPARTAN (1,2) a randomisé 1 207 patients avec CPRCnm et doublement du PSA en moins de dix mois pour recevoir l’apalutamide ou le placebo, en association avec une TPA. Selon les premiers résultats publiés en 2018, l'apalutamide (Erleada) augmentait significativement la survie sans métastases de plus de deux ans (critère principal), avec une diminution de la survenue de métastases de 72 %. Les données présentées au congrès montrent un bénéfice de 14 mois sur la survie globale (SG) : 73,9 vs 59,9 mois (HR = 0,784 ; p = 0,0161). En intégrant les patients sous placebo ayant également pu bénéficier de l’apalutamide suite à l’atteinte du critère principal (cross-over), le gain en SG atteint 21 mois (73,9 mois vs 52,8 mois, respectivement, HR = 0,69, p = 0,0002). L’apalutamide a également allongé de manière significative le délai avant une nouvelle ligne de traitement (HR = 0,629). Parallèlement, le risque d’évènements osseux et de progression symptomatique, essentiel pour la qualité de vie, a été réduit de 55 %. La survie sans progression après une deuxième ligne de traitement (instaurée en cas d’apparition de métastases) reste supérieure chez les patients qui avaient reçu l’apalutamide, malgré le cross-over de 19 % des patients. La tolérance était globalement bonne, avec moins de 5 % d’évènements indésirables de grade 3/4.
27 % de réduction du risque de décès sous enzalutamide
Dans le même contexte, l’étude PROSPER (3,4) a randomisé 1 401 patients pour évaluer l’enzalutamide (Xtandi). Les premiers résultats avaient montré une amélioration significative de la survie sans métastases (HR = 0,29 ; p < 0,001) mais n’avait pas permis d’analyser la SG. Après un suivi médian de deux ans, l’enzalutamide a diminué significativement le nombre de décès de 27 % par rapport au placebo (HR = 0,73). La SG médiane était de 67 mois vs 56,3 mois (p = 0,0011). Le bénéfice sur la SG se maintient malgré un cross-over, du groupe placebo à enzalutamide, et l’instauration de thérapies antinéoplasiques ultérieures. Des événements indésirables de grade ≥ 3 ont été signalés par 48 % des hommes sous enzalutamide (vs 27 % dans le bras placebo).
83 % de patients en vie à 3 ans sous darolutamide
Menée chez 1 509 patients, l’étude ARAMIS (5,6), avait déjà montré une augmentation de la survie sans métastase sous darolutamide (Nubeqa), avec une médiane de 40,4 versus 18,4 mois (HR = 0,41, p < 0,0001). Les nouveaux résultats mettent en évidence une amélioration significative de la SG, avec une réduction de 31 % du risque de décès par rapport au placebo (p = 0,003). La SG à 3 ans était de 83 % versus 77 % dans les bras darolutamide et placebo. Tous les autres critères secondaires (progression de la douleur, délai avant la chimiothérapie cytotoxique et le premier événement osseux) ont eux aussi été significativement améliorés sous darolutamide. Le bénéfice sur la survie persiste indépendamment de l'effet du cross-over et des thérapies ultérieures. Les événements indésirables survenant avec une fréquence ≥ 5 % étaient similaires à ceux observés sous placebo.
Ces trois études confirment donc l’intérêt de prendre en charge précocement les CPRCnm avec ces anti-androgènes de nouvelle génération.
(1) Small E.J et al. J Clin Oncol 2020;38(suppl; abstr 5516)
(2) Smith M.R. et al. N Engl J Med 2018;378:1408-18
(3) Sternberg C.N. et al. J Clin Oncol 2020;38(suppl; abstr 5515)
(4) Hussain M. et al. N Engl J Med 2018;378:2465-74
(5) Fizazi K. et al., J Clin Oncol 2020;38 (suppl; abstr 5514)
(6) Fizazi et al, N Engl J Med 2019;380:1235-46
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