La sensibilité au gluten non cœliaque (SGNC) est une entité de description récente, qui pourrait être une sous-unité du côlon irritable. Elle concernerait de 3 à 6 % de la population aux États-Unis.
« Les allergologues s'intéressent depuis quelques années à ces types d'intolérance qui ne sont pas immunes et dont la physiopathologie reste mal connue », rapporte la Dr Audrey Martin-Blondel pédiatre et allergologue au CHU de Toulouse. Parmi les hypothèses avancées pour expliquer cette hypersensibilité : un dysfonctionnement de l'immunité innée par interaction entre l'Amylase Trypsine Inhibiteur (protein hydrosoluble du blé potentiellement modifiée par les cultures intensives) et le TLR4 des macrophages et des cellules dendritiques.
Une susceptibilité génétique a été suspectée devant une forte prévalence du HLADQ2/8 (50 % des patients), le même que celui retrouvé chez 90 % des sujets ayant une maladie cœliaque (MC). Mais contrairement à cette dernière, il n'y a pas d'IgA anti-transglutaminase, ni d'atrophie villositaire.
Ainsi, en l'absence de critères biologiques, le diagnostic est purement clinique, et évoqué face à des signes digestifs à type de douleurs abdominales, de ballonnements, de diarrhée chronique, survenant de façon assez stéréotypée quelques heures plus rarement jours après l'ingestion de gluten. Des signes généraux sont fréquents : asthénie, myalgies, troubles de l'humeur et surtout céphalées. « La quantité de gluten qui déclenche les symptômes n'est pas négligeable et le régime sans gluten est efficace », précise la Dr Martin-Blondel.
Éliminer une maladie cœliaque
La SGNC reste un diagnostic d'élimination, c'est pourquoi, il faut éliminer les diagnostics différentiels : allergie IgE médiée au blé, entéropathie au blé (avec peu de sensibilité des patchs tests) et surtout MC.
La recherche d'IgA anti-transglutaminase doit être faite sous régime comportant du gluten. Les patients ayant adopté un régime d'éviction doivent donc reprendre une alimentation normale pendant plusieurs semaines avant de faire ce dosage. Les biopsies sont aujourd'hui moins souvent pratiquées, depuis que le diagnostic de maladie cœliaque peut être fortement suspecté sur des signes cliniques évidents, la présence d'IgA et le groupe HLA DQ2/8.
Dans la SGNC, l'éviction totale de blé est recommandée pendant 4 à 6 semaines avant de définir le palier de tolérance pour maintenir une tolérance au blé. En effet 50 % des patients étant atopiques, il faut être vigilant à ne pas faire de régime d'éviction strict de façon à ne pas risquer une rupture de tolérance, et donc l'apparition d'une vraie allergie alimentaire au blé.
Il faut également rassurer les patients sur l'absence de gravité de la pathologie et la potentielle bonne évolutivité. « Le marché du « sans-gluten » explose, avec des produits de substitution qui ne sont pas toujours plus sains ni équilibrés (plus riches en matières grasses, glucides…) », rappelle la Dr Martin-Blondel.
« Il est important de poser ce diagnostic d'élimination pour ces patients, souvent en souffrance, et de les rassurer en précisant que ce régime n'est pas toujours nécessaire à vie », conclut la Dr Audrey Martin-Blondel.
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