Recherche sur la mucoviscidose

De nouveaux espoirs avec la thérapie protéique

Publié le 10/06/2011
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La mucoviscidose, qui est la plus fréquente des pathologies autosomiques récessives létales dans la population caucasienne, est due à des mutations (on en dénombre plus de 2000) du gène Cystic Fibrosis Transmembrane Conductance Regulator (CFTR), mis en évidence en 1989 et situé sur le bras long du chromosome 7. Ce gène code pour la protéine CFTR, située à la membrane apicale épithéliale. Elle est la principale voie de sécrétion des chlorures. Elle est douée de nombreuses autres fonctions, impliquées notamment dans la régulation du pH intracellulaire, la glycosylation protéique, la différenciation cellulaire ou le système immunitaire inné.

La mucoviscidose a bénéficié de nombreux progrès thérapeutiques, qui ont permis d’améliorer de façon très significative le pronostic : la survie des patients, de 20 ans dans les années 1980, est aujourd’hui de plus de 40 ans. Des progrès majeurs, qui découlent du développement de stratégies basées sur les différentes étapes de la physiopathologie de la maladie : thérapie génique, protéique, traitements de substitution pour améliorer la clairance muco-ciliaire, traitement anti-inflammatoire et anti-infectieux et enfin transplantation pulmonaire.

La thérapie protéique cible directement l’anomalie moléculaire. Certaines mutations entraînent l’absence de production de la protéine (mutations stop ou non sens, dans 15 % des cas), d’autres sont responsables d’une dégradation de la protéine produite (mutation F508 del), d’autres encore d’une dysfonction de cette protéine.

Codon stop : des résultats encourageants.

En cas de codon stop prématuré, les aminosides, en particulier la gentamycine, favorisent la trans-lecture des mutations et la synthèse d’une protéine fonctionnelle. Une étude clinique a permis de montrer que l’administration de gentamycine par voie intraveineuse permet de restaurer une sécrétion de chlorures, avec un bénéfice respiratoire en dehors de tout effet antibiotique. Une autre molécule administrable par voie orale et bien tolérée, PTC 124 (Ataluren), a été testée avec succès dans un essai de phase II : après 2 semaines de traitement, la sécrétion de chlorures était normalisée chez un nombre significatif de patients (normalisation chez 14/30 enfants et réponse significative dans 20/30 cas). Un autre essai de phase II mené chez des adultes a montré une amélioration au cours du temps, avec, après 3 mois de traitement, un niveau de sécrétion de chlorures analogue à celui de sujets sains et une tendance à l’amélioration de la fonction respiratoire. Ces données encourageantes ont conduit à mettre en place une étude de phase III versus placebo chez plus de 200 patients.

Conserver une petite partie de la protéine.

La deuxième grande stratégie consiste à inhiber la dégradation de la protéine et court-circuiter les points de contrôle. De nombreuses mutations sont responsables d’un défaut de repliement de la protéine. Toutefois, il est établi que même si seule une petite partie (10 % environ) de la protéine arrive au niveau de la membrane apicale épithéliale, cela suffit à normaliser le transport transépithélial de fluides. Plusieurs pistes sont explorées (dégradation des chaperones, court-circuit de la calnexine, inhibition du protéasome), dont les résultats sont plutôt décevants. Notamment, une pharmacochaperone, VX-809, n’a pas donné les résultats cliniques espérés, malgré une restauration de l’expression de CFTR in vitro.

Les molécules correctrices, pour rétablir la fonction.

Le troisième grand type de thérapie protéique concerne les défauts de fonction de la protéine CFTR. Un projet d’envergure a été lancé aux États-Unis afin d’analyser de façon systématique les molécules correctrices potentielles. L’une d’elles, VX-770, s’est montrée capable de corriger la fonction des protéines à perméabilité défectueuse, ce qui est le cas pour la mutation G551D. Une étude versus placebo a mis en évidence la normalisation de la sécrétion de chlorures, au niveau de l’épithélium nasal et dans la sueur, avec un bénéfice respiratoire, dont témoigne l’augmentation d’environ 10 % du VEMS après un mois de traitement. D’autres essais évaluent des combinaisons thérapeutiques, par exemple l’association VX-770 et VX-809.

D’après la communication du Dr Isabelle Sermet-Gaudelus, Paris, « Nouvelles thérapies dans la mucoviscidose en 2011 ».

Dr Isabelle Hoppenot

Source : Le Quotidien du Médecin: 8980