Les données récentes de la recherche confirment que l’infection à papillomavirus est très courante, le plus souvent asymptomatique et passagère. L’étendue de l’infection est vaste mais son risque est limité. Cependant l’incidence des cancers épidermoïdes HPV associés au-delà des sites génitaux est considérable. Le type 16 est de loin le plus fréquent et le plus à risque sur tous les sites. L’émergence d’une nouvelle entité de cancers épidermoïdes de la tête et du cou HPV associés chez les sujets jeunes permet d’ores et déjà de mesurer les applications pratiques en termes de diagnostic, de prise en charge et de prévention.
Désormais le concept d’infection à papillomavirus à risque de cancer est remis en question par une connaissance plus rationnelle et bien documentée du risque attribué à seulement certains types viraux (4 à 5 au niveau du col utérin, 16-18-33-31-45) associés à 90 % des cancers du col, alors que le type 16 demeure le plus prévalent, au niveau des cancers de l’anus (80 %), de la vulve (50 %) et de l’oro-pharynx-larynx (40 %).
Si le col utérin demeure le site le plus exposé mais aussi le plus réceptif, il bénéficie d’un dépistage très précoce, dont les outils sont de plus en plus performants. Associés à la prévention vaccinale à un jeune âge, ils garantissent une efficacité exceptionnelle de protection contre la maladie. À l’inverse, les autres tissus épidermoïdes réceptifs aux HPV, qui ne bénéficient pas du dépistage, peuvent tirer le meilleur bénéfice d’une vaccination précoce tant chez la fille que chez le garçon.
Avec plus de 120 millions de doses distribuées dans le monde durant ces 4 dernières années de mise en œuvre des programmes vaccinaux, on observe aujourd’hui en vie réelle une efficacité confirmée, un bon profil de sécurité, l’absence à ce jour de niche virale et un impact sensible sur les pathologies HPV associées.
Nous devons poursuivre nos efforts pour traduire en décisions concrètes l’introduction du test HPV dans le dépistage primaire du cancer du col. Le dépistage basé sur le risque génotypique bien documenté ce jour permet de détecter plus précocement les pré-cancers et le cancer et d’élargir en toute sécurité l’intervalle du dépistage. Des programmes de dépistage HPV devraient voir le jour dans un avenir proche. Nous invitons les lecteurs à prendre connaissance des conclusions de la dernière conférence de consensus d’experts d’EUROGIN (Roadmap 2010 en ligne, www.eurogin.com/2010/roadmap.pdf ) et celle d’EUROGIN 2011 qui verra le jour avant la fin de cette année.
Former les professionnels aux bonnes pratiques.
La recherche n’a de sens que si elle peut servir à améliorer la pratique clinique. EUROGIN a vocation à traduire les données de cette recherche afin qu’elle soit utile à l’exercice clinique et à promouvoir l’excellence dans ce domaine. En s’appuyant sur son réseau d’experts international, EUROGIN proposera en 2011 un programme multilingue de formation de e-learning accrédité à l’échelon européen (www.eurogin.com). Ce programme permettra aux professionnels de mettre à jour leurs connaissances, d’évaluer leurs pratiques et d’échanger leurs expériences avec leurs collègues.
Solidarité, fraternité et générosité à l’égard du patient.
Le degré de maturité d’une organisation scientifique se mesure sans aucun doute à l’intérêt qu’elle porte aussi aux patients. Il faut ici saluer l’exceptionnel dynamisme de la fondation internationale WACC (www.wacc-network.org) et en France à celle de l’association 1000femmes1000vies (www.1000femmes1000vies.org) dont les actions destinées aux patientes sont tout à fait remarquables. La fondation WACC réunit à ce jour plus de 100 organisations à travers le monde qui œuvrent dans l’intérêt du patient. Deux enquêtes, aujourd’hui disponibles, permettent de mesurer avec précision l’état de connaissance du public, sa perception de l’infection à papillomavirus, ses conséquences et du rôle respectif du dépistage et de la prévention. Ces informations, très instructives, permettent de proposer des programmes éducatifs adaptés et ciblés afin de réduire l’anxiété et le stress occasionnés par ces pathologies mais aussi à responsabiliser le patient pour s’engager dans une démarche proactive vis-à-vis du dépistage et de la prévention. Le livre de témoignages en plusieurs langues aujourd’hui disponible sur le site (www.wacc-network.org) montre à quel point les malades confrontés au cancer du col ont un besoin d’accompagnement et de soutien. Briser le silence et les tabous, partager les expériences et les émotions, formuler les craintes, les peurs et les espoirs, livrer un message encourageant pour les jeunes et les moins jeunes. L’ignorance est un mal qui peut être fatal, c’est à cet effort éducatif global que la WACC Foundation a souhaité apporter sa modeste contribution.
N’oublions pas ceux qui sont mis à l’écart et les plus fragiles. Le risque élevé dans ces populations vulnérables nous oblige à agir. Se porter prioritairement auprès de ces populations par des programmes ciblés et adaptés est une exigence.
Mobiliser et fédérer les énergies.
Ces défis nous ne les réaliserons pas seuls. Ce vaste mouvement initié par les organisations scientifiques et de patientes peut être relayé localement par une nouvelle génération de partenaires prêts à s’investir autour d’un nouveau projet. Ensemble nous pouvons inverser la tendance à la fatalité, l’injustice et l’inégalité pour que nous retrouvions la fierté de nos engagements.
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