11° congrès international de Pneumologie Pédiatrique à VersaillesRonflement de l’enfant

Les retentissements sur la santé 

Publié le 07/10/2011
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Crédit photo : BSIP

« Le ronflement bruyant et fréquent est une situation assez commune qui affecte environ 10 % des enfants », rappelle le Dr Aviv Goldbart (Beer-Sheeva, Israël). L’évaluation polysomnographique relève un syndrome d’apnée du sommeil (SAS) chez un quart de ces enfants, pour une prévalence globale du SAS chez les enfants de 1 à 3 %. En fait, le ronflement est le premier signe de troubles respiratoires du sommeil (TRS) de l’enfant. Il peut, après un syndrome d’augmentation des résistances des voies aériennes supérieures, conduire à une hypoventilation obstructive puis à un SAS.

De nombreux facteurs de risque.

Le ronflement est dû à une obstruction des voies aériennes supérieures provoquant des oscillations du débit respiratoire. Elle peut être provoquée par une hypertrophie des végétations adénoïdes ou des amygdales, la présence de polypes nasaux, une déviation du septum ou encore par des voies aériennes étroites. Les facteurs favorisant le ronflement sont nombreux. Ainsi, dans une étude chinoise (1) sur plus de 6 000 enfants de 5 à 14 ans (prévalence de ronflement : 7,2 %), les facteurs de risque indépendants étaient : le sexe masculin, l’indice de masse corporelle, le ronflement parental, la rhinite allergique, l’asthme, la sinusite, l’amygdalite. Le ronflement a aussi des retombées multiples. Dans la même étude, il était associé à des troubles respiratoires diurnes et nocturnes ainsi qu’à une hyperactivité, des troubles de l’humeur et des performances scolaires altérées.

Morbidité de l’enfant ronfleur.

Des études spécifiques ont analysé les retombées du ronflement sur la santé de l’enfant, qu’il soit, ou non, associé à un SAS.

Au niveau cardiovasculaire, différentes anomalies ont été observées chez des enfants souffrant de TRS : élévation de la pression artérielle persistant au réveil chez les enfants souffrant de SAS (2), modification de l’épaisseur de la paroi du ventricule gauche chez 15 % des enfants avec un ronflement chronique et chez 39 % des enfants avec un SAS (3). Chez les sujets souffrant de TRS, les obstructions intermittentes des voies aériennes provoquent des épisodes hypoxiques et des réveils aboutissant à une activation du système sympathique. Une diminution de la distensibilité artérielle et une altération de la fonction endothéliale ont aussi été constatées. Elles sont attribuées à la formation de radicaux libres oxygénés lors des épisodes de ré-oxygénation (4). Selon Gozal (5), cette altération de la fonction endothéliale constatée chez l’enfant d’âge scolaire non obèse présentant un SAS est réversible, dans 80 % des cas, 4 à 6 mois après ablation des amygdales et des végétations (adéno-tonsillectomie [ATT]).

Les TRS ont aussi des conséquences sur la croissance. En effet, une croissance ralentie, liée à une perte d’appétit et à une dysphagie est souvent constatée chez des enfants présentant une obstruction chronique des voies aériennes supérieures résultant d’une hypertrophie adéno-tonsillaire. Après ATT, une reprise de croissance est constatée (6). Le retard de croissance chez les enfants souffrant de SAS pourrait être dû à une augmentation de la dépense calorique provoquée par l’augmentation du travail respiratoire pendant le sommeil. Une augmentation significative du taux d’IGF-1 (Insulin-like growth factor -1) et du poids est associée à une amélioration de la respiration après ATT chez des enfants présentant un SAS (7). Ceci suggère que le SAS affecte la sécrétion de cette hormone. Elle l’est aussi, bien que moins fortement, chez les enfants ronfleurs habituels (8).

Enfin, le ronflement habituel (presque toutes les nuits) chez les ronfleurs dits « primaires », a été associé à des problèmes comportementaux et des performances scolaires diminuées, même en absence d’hypoxie intermittente. Ainsi, dans un groupe de 829 enfants, des troubles de l’humeur (hyperactivité, émotivité, comportement agressif, plaintes somatiques et problèmes relationnels) ont été plus souvent observés chez les enfants qui ont des TRS – qu’il s’agisse de ronfleurs primaires (15 %) ou d’enfants présentant un SAS (5 %) – que chez les enfants sans TRS (80 %) (9). Il en est de même pour le retentissement des TRS sur les fonctions neurocognitives, rapporté par de nombreux auteurs. Ainsi pour Kennedy (10), plusieurs domaines des fonctions neurocognitives (QI verbal et global, attention sélective et soutenue, score de mémoire) sont réduits chez des enfants ronfleurs (sans SAS) comparé à des enfants sains contrôles. Bien que ces enfants aient un indice d’apnée/hypopnée normal, une relation directe entre le nombre de désaturations, d’hypopnées et de réveils d’une part, et la sévérité des déficits neurocognitifs d’autre part, est constatée. Les auteurs attribuent ces déficits neurocognitifs aux interruptions de sommeil répétées induites par le ronflement, à une période de la vie où se produit un développement neurologique rapide. Par ailleurs, les déficits neurocognitifs d’enfants de 3 à 9 ans souffrant de SAS (n = 39) mis en évidence sur des tests spécialisés par rapport aux résultats obtenus par des enfants sains (n = 20) ont en grande partie été corrigés dans les 3 à 10 mois ayant suivi une ATT (11).

L’adénotonsillectomie résout-elle les TRS et ses complications ?

Pour répondre à cette question, une recherche de la littérature a été effectuée (Cochrane database 2003). « Parmi les 196 références identifiées pour évaluer l’efficacité du traitement des TRS par ATT chez l’enfant, il n’y a aucune étude contrôlée randomisée », signale Aviv Goldbart. Cependant, comme indiqué précédemment, il a souvent été constaté que l’ATT améliore les symptômes des TRS même si des troubles résiduels peuvent persister. A noter, il est possible d’améliorer les troubles de la respiration et du sommeil persistant chez des enfants après ATT, par un traitement anti-inflammatoire (par exemple douze semaines de traitement par montelukast et budesonide)(12).

D’après la communication du Dr Aviv Goldbart (Beer-Sheeva Israël) « The snoring child, implications for adulthood»

(1) Li AM et coll. Chest 2010 Sep;138(3):519-27.

(2) Marcus CL et coll. Am J Respir Crit Care Med. 1998;157:1098–1103.

(3) Amin RS et coll. Am J Respir Crit Care Med. 2002;165(10):1395-9.

(4) Kwok KL et coll. Ann Acad Med Singapore 2008,37:715-721.

(5) Gozal D et coll. Circulation 2007;116(20):2307-14.

(6) Williams EF et coll. Otolaryngol Head Neck Surg. 1991;104(4):509-16.

(7) Bar A et coll. J Pediatr. 1999;135(1):76-80.

(8) Nieminen P et coll. Pediatrics. 2002;109(4):e55.

(9) Rosen CL et coll. Pediatrics. 2004 Dec;114(6):1640-8.

(10) Kennedy JD et coll. Pediatr Pulmonol. 2004 Apr;37(4):330-7.

(11) Friedman BC et coll. Sleep 2003 Dec 15;26(8):999-1005.

(12) Kheirandish L. et coll. Pediatrics 2006 Jan;117(1):e61-6.

YVONNE EVRARD

Source : Le Quotidien du Médecin: 9020