Tuberculose endobronchique

L’intérêt de l’endoscopie

Publié le 07/10/2011
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Le prélèvement bactériologique n’est pas toujours significatif chez l’enfant car la densité bacillaire est souvent faible et les enfants avec des formes latentes de tuberculose (TB) ont habituellement des cultures négatives. Cet examen est plus parlant chez les enfants ayant une TB maladie avec signes cliniques et/ou radiologiques.

Différentes méthodes de prélèvements sont possibles. La recherche de M tuberculosis (BK) dans les crachats est peu pratiquée en pédiatrie car les enfants expectorent peu et avalent le mucus. Le BK étant résistant à l’acide chlorhydrique, le tubage gastrique est préféré. Certaines équipes ont l’habitude de l’expectoration induite mais, pour le Dr Lionel Donato (Strasbourg), cette méthode comporte un risque important de contamination environnementale. Le lavage broncho-alvéolaire (LBA) est une alternative intéressante mais ne semble pas plus rentable que le tubage. Le couplage LBA et tubage gastrique renforce le diagnostic. « Des techniques endoscopiques sont aussi envisageables : le brossage ou biopsie bronchique et la ponction transpariétale des ganglions (TBNA). Elles n’ont pas bonne presse en pédiatrie mais sont possibles, avec un repérage scanographique, estime Lionel Donato. La TBNA est réalisée sous anesthésie générale et un bronchoscope rigide assure un geste plus aisément maîtrisable. »

L’endoscopie pour diagnostic de TBE.

La tuberculose endobronchique (TBE) est une atteinte très particulière de la TB pulmonaire de l’enfant, plus fréquente que chez l’adulte. Elle se traduit par un abcès ganglionnaire médiastinal qui se développe suite à une inoculation parenchymateuse. L’abcès pousse vers la paroi endobronchique et se fistulise dans la lumière bronchique. Il se comporte comme une tumeur à malignité locale avec nécrose de la paroi et sortie de caséum sous pression. Il ne peut guérir spontanément.

Le sujet atteint de TBE présente des signes cliniques caractéristiques. Une TBE est suspectée quand un enfant a une tuberculose avec des symptômes respiratoires (toux, wheezing…) et qu’il présente une malnutrition avec atteinte de l’état général. La présomption est renforcée face à un ou plusieurs des signes suivants : trouble de la ventilation obstructif à la radio, asymétrie thoracique, adénopathies volumineuses, infiltrat étendu ou forte densité bactérienne sur les prélèvements.

Les places respectives de la radiologie et de l’endoscopie pour détecter une TBE font l’objet d’un débat sans fin. « La radiologie peut être indicative, explique Lionel Donato, mais certaines adénopathies en position intertrachéobronchique sont souvent invisibles sur une radio de thorax de face alors qu’elles peuvent avoir des conséquences ventilatoires importantes. »

Des études ont évalué l’intérêt de l’examen endoscopique pour rechercher des complications endobronchiques. Ainsi, dans une étude chinoise (1), un examen fibroscopique pratiqué chez 36 enfants ayant une TB active a révélé une implication endobronchique dans 41,7 % des cas alors que les deux tiers de ces patients n’avaient pas de signes cliniques ou radiologiques de TBE. De même, dans une étude israélienne (2), sur 80 cas de tuberculose latente et de tuberculose maladie qui ont subi une fibroscopie, 32 patients, soit 40 %, avaient une compression extrinsèque mise en évidence à l’examen endoscopique. Parmi ceux-ci, la moitié était asymptomatique et seulement trois patients avaient un examen bactériologique positif.

Cependant, les techniques ont évolué et le perfectionnement de l’examen tomodensitométrique (scanner multibarrettes) permet maintenant une plus grande efficacité diagnostique que la radio standard. Aussi, la question se pose désormais de savoir si l’examen endoscopique est utile lorsque le scanner est normal. Pour Lionel Donato, « il existe une bonne concordance entre les données scanographiques et celles de l’examen endoscopique. Si le scanner est normal, il n’est pas nécessaire de faire une fibroscopie. » De même, Arlaud K et al (3) considèrent que la fibroscopie ne doit être envisagée chez des enfants atteints de tuberculose que lorsqu’un rétrécissement de la lumière trachéobronchique a été visualisé au scanner.

L’endoscopie pour le suivi de TBE

Une TBE guérit en plusieurs mois : 4 à 5 mois pour faire régresser des lésions caséeuses ou du tissu de granulation, selon Cakir (4) et il est habituel de suivre l’évolution de la maladie une fois par mois. L’utilisation du scanner pour cette surveillance pose problème. En effet, un examen avec un scanner actuel à 64 barrettes représente un équivalent dosimétrique de 300 radios de thorax. Pour Lionel Donato, la fibroscopie, simple et non dangereuse quand elle est réalisée par des mains expertes, peut avantageusement remplacer le scanner pour suivre l’évolution des lésions sous traitement.

L’endoscopie pour traitement de la TBE

Le traitement habituel de la TBE associe le plus souvent tuberculostatiques et corticoïdes. En cours de traitement, l’endoscopie sert à la bronchoaspiration quand les bronches sont obstruées par du mucus en raison d’un défaut de clairance mucociliaire ou par du caséum issu de l’endobronche sur une lésion ulcérée.

Quand ceci ne suffit pas, il est possible de recourir à l’endoscopie interventionnelle pour compléter le traitement et éviter l’intervention chirurgicale. Lionel Donato préconise l’énucléation mécanique au bronchoscope rigide. Différentes options sont possibles : la technique de « debulking » (désobstruction), la dilatation au ballonnet ou la résection à la pince. « Il est préférable, remarque Lionel Donato, d’utiliser l’électro-résection ou la photorésection laser, qui permettent une hémostase immédiate car le tissu ganglionnaire saigne facilement et le risque de complications hémorragiques médiastinales n’est pas négligeable. En cas d’échec des traitements médicaux, l’intervention endoscopique est une option intéressante pour reventiler le poumon. Elle est moins préjudiciable qu’une ouverture de thorax. »

D’après la communication du Dr Lionel Donato (CHU Hautepierre -Strasbourg)

(1) Chan S et coll. Pediatr Infect Dis J. 1994 Jun;13(6):506-9.

(2) Bibi H et coll. Chest 2002 Nov;122(5):1604-8.

(3) Arlaud K et coll. Arch Dis Child 2010 Feb;95(2):125-9.

(4) Cakir E et coll. Pediatr Infect Dis J. 2008 Sep;27(9):783-7.

 YVONNE EVRARD

Source : Le Quotidien du Médecin: 9020