L’European respiratory society (ERS) est la plus grande société savante de pneumologie, avec un nombre croissant de membres : plus de 30 000 dans près de 160 pays. Sa mission est de promouvoir la santé pulmonaire afin de soulager les souffrances causées par les maladies respiratoires et d’établir des lignes directrices à l’échelle internationale. La science, la formation et le plaidoyer sont au cœur de ses actions. L’ERS joue un rôle clé dans la sensibilisation des décideurs (notamment les eurodéputés) aux maladies pulmonaires et elle travaille en étroite collaboration avec les associations de patients (European lung foundation) pour engager des actions concrètes sur l’environnement, la lutte antitabac, les maladies respiratoires rares et fréquentes de l’enfant et de l’adulte, etc.
Premier sommet de l’IRC
C’est dans cet esprit qu’a été lancée l’année dernière, par l’ERS, la Coalition internationale respiratoire (International respiratory coalition, IRC).
Créée dans le contexte de la pandémie de Covid-19, qui a révélé l’importance de la santé pulmonaire et des lacunes à corriger dans l’offre de soin respiratoire, l’IRC estime que les enseignements tirés de la pandémie devraient être un catalyseur de changement dans les systèmes de santé en Europe et dans le monde. « Son objectif est de promouvoir la santé respiratoire et d’améliorer l’offre de soin à l’échelle de chaque pays, en fournissant des outils robustes permettant de convaincre les décideurs politiques de l’urgence à mettre en œuvre des stratégies respiratoires nationales fondées sur les meilleures pratiques », explique le Pr Marc Humbert* (Université Paris-Saclay, service de pneumologie et soins intensifs respiratoires, centre de référence de l’hypertension pulmonaire, Hôpital Bicêtre, AP-HP), l’actuel président de l’ERS.
Le premier sommet de l’IRC, « Transformer la médecine respiratoire dans le monde post-pandémique », a eu lieu en juin dernier à Paris et a connu un vif succès, avec des représentants de haut niveau de plusieurs ministères de la santé européens. L’évènement a réuni les organisations partenaires fondatrices (pilotées par l’ERS), des organisations de patients, de la SPLF et de l’industrie du médicament. Dans chaque pays, des groupes se forment afin, notamment, de définir des priorités nationales, de fixer des objectifs d’amélioration de la santé respiratoire sur la base d’indicateurs validés et d’élaborer des interventions concrètes devant aboutir à des plans pour la santé respiratoire.
Lancement du site Lung facts
Dans cet objectif, une nouvelle ressource en ligne, « Lung facts » (1), disponible en accès libre sur le site officiel de l’IRC, vient d’être lancée lors du congrès. « Régulièrement mis à jour, ce site constituera une référence en matière de données épidémiologiques (incidence, prévalence, mortalité) et médicoéconomiques clés sur les principales affections respiratoires dans chaque pays européen. ˮLung Factsˮ est la version moderne du livre blanc européen, publié pour la dernière fois il y a 10 ans », explique le Pr Humbert.
En fournissant des données contemporaines précises en santé respiratoire dans chaque pays, « Lung Facts » met aussi au jour les éléments pour plaider en faveur d’actions concrètes, au niveau national comme international.
Il comprend actuellement les données du Global burden of disease (GBD) dans l’asthme, la BPCO, le mésothéliome, les infections des voies respiratoires inférieures, le cancer du poumon, les maladies pulmonaires interstitielles et la tuberculose. Les autres domaines seront ajoutés dans les prochains mois.
Chaîne numérique, publications scientifiques, congrès
L’ERS multiplie ses offres pour ses membres. « L’ERS Respiratory Channel » permet d’accéder à toute une gamme de contenus en ligne (cours en direct, tables rondes, webinaires, podcasts…). Les contenus sont encore amenés à se développer cette année.
« Quant aux publications scientifiques, elles ont toutes battu leur record en termes de lectorat et de facteur d’impact. Avec un impact factor à 33,8, ˮl’European Respiratory Journalˮ (ERJ) vient de dépasser celui des revues américaines. Les autres journaux, ˮEuropean Respiratory Reviewˮ (IF > 9) et ˮERJ Open Researchˮ (IF > 4) ont aussi fortement progressé », se félicite le Pr Humbert.
« Enfin, le congrès hybride qui s’est tenu à Barcelone cette année a connu un énorme succès, avec près de 14 000 participants et plus de 6 500 en virtuel. C’est de très loin, le plus grand congrès en pneumologie », souligne le président de l’ERS.
Nouvelles directives ESC/ERS sur l’hypertension pulmonaire
Un des points forts du congrès a été la session plénière consacrée aux nouvelles recommandations de diagnostic et de traitement de l’hypertension pulmonaire (HTP), établies conjointement par l’ERS et l’ESC (société européenne de cardiologie).
La prévalence de l’HTP est d’environ 1 % dans le monde et de 10 % chez les personnes âgées de plus de 65 ans. La principale modification concerne la définition hémodynamique de l’HTP, avec un seuil de 20 mmHg (au lieu de 25) pour la pression artérielle pulmonaire moyenne et une diminution du seuil de résistance vasculaire pulmonaire à 2 unités Wood. La classification clinique en cinq grands groupes a été mise à jour. « Cela devrait permettre une détection plus précoce et une orientation rapide des patients à haut risque vers les centres spécialisés (en France, dans le cadre du réseau français de l’hypertension pulmonaire). L’algorithme de traitement a été précisé, avec un accent sur l’évaluation régulière du risque. Cependant, le texte pointe aussi des lacunes dans les données probantes, qui devront être comblées dans l’avenir pour améliorer les soins aux patients », prévient le Pr Humbert.
Quant au traitement médicamenteux, des données encourageantes sur le sotatercept (biothérapie piégeant des ligands des récepteurs de la voie du TGF-β comme l’activine) ont été présentées, concernant la phase d’extension en ouvert de 18-24 mois de l’essai de phase II Pulsar. Et, dernièrement, les données de l’étude Race dans l’HTP thrombo-embolique chronique suggèrent qu’un prétraitement par riociguat avant angioplastie pulmonaire au ballon permettrait de pratiquer l’angioplastie dans de meilleures conditions de sécurité.
Exergue : « Nous voulons convaincre les décideurs politiques de l’urgence à mettre en œuvre des stratégies respiratoires nationales »
*Marc Humbert déclare avoir perçu des honoraires comme consultant et avoir bénéficié de financements de projets de recherche de la part de Aerovate, Altavant, AOP Orphan, Bayer, Chiesi, Ferrer, Janssen, Merck, MorphogenIX, Shou Ti et United Therapeutics (1) international-respiratory-coalition.org/lung-facts
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