LE QUOTIDIEN : Une pétition de médecins et de patients associent les téléconsultations des complémentaires santé à de la médecine low-cost. Quelle est la position de l'Ordre ?
Dr JACQUES LUCAS : La téléconsultation doit se développer de façon prioritaire avec le soutien de l'État, dans le cadre du parcours de soins. La pétition qui nous a interpellés a recueilli 1 100 signatures, ce n'est pas négligeable. Les signataires soulèvent un problème mais il faut traiter le sujet avec la clairvoyance et la pondération nécessaires. Les choses ont évolué avec la loi de financement de la Sécurité sociale 2018 puisque la téléconsultation dans le cadre du parcours de soins rentre dans le droit commun. L'Ordre va exprimer ses recommandations dans une note d'ici à quelques jours.
Doit-on craindre la rupture ou le contournement du parcours de soins ?
Aujourd'hui, rien n'interdit à un patient de consulter en dehors du parcours de soins ! Rien n'oblige un médecin à être conventionné avec l'assurance-maladie obligatoire sur le plan théorique. Et rien n'interdit à un assureur de proposer à ses assurés des téléconsultations. L'état du droit actuellement est tout à fait clair. Mais il faut une convention avec l'agence régionale de santé et l'Ordre doit viser les contrats avec les médecins pratiquant la télémédecine avec ces plateformes.
Précisons un point. Les complémentaires santé ne proposent pas des téléconsultations à proprement parler mais des téléconseils personnalisés. Si tout le monde ne met pas derrière le même mot la même signification, cela devient un dialogue de sourd.
Voyez-vous une utilité à ces services privés de téléconsultations ?
Courant novembre, avec la Société française de télémédecine et les fédérations hospitalières, il a été dit que des plateformes d'orientation ou de téléconseil personnalisé devaient être envisagées dans l'organisation des soins au niveau des territoires.
La régulation publique du Centre 15 est victime de son succès, c'est un fait. La quantité d'appels qui y arrivent pourrait être régulée dans le cadre ambulatoire. Un certain nombre de mes confrères vont rétorquer : c'est le rôle du médecin traitant. Je suis d'accord mais comment faire quand il n'est pas disponible ? Il existe des zones de tensions. Quant au patient, il est toujours confronté à ses problèmes médicaux. Il faut lui apporter une réponse.
Que comptez-vous faire ?
La réglementation doit évoluer pour que la télémédecine entre dans le droit commun. On doit réguler les autres offres de téléconsultations présentées par les complémentaires santé. La télémédecine doit se développer dans le parcours de soins. Tout ce qui relève de l'ubérisation de la médecine, toute autre forme d'entrée dans le système de soins appelle à des réserves et à une régulation nécessaire. C'est au ministère de la Santé de trancher.
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