Des pare-feu pour un meilleur contrôle

Publié le 14/03/2013
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OMS : un plan voté par les 194 États membres

« OUI, L’ENSEMBLE des États membres a pris conscience du risque que font courir aux populations du monde les principes actifs insuffisamment contrôlés, assure le Dr Sabine Kopp, directrice du programme assurance qualité des médicaments à l’Organisation mondiale de la santé (OMS). À telle enseigne que les 194 membres ont voté à l’unanimité la création d’un mécanisme d’action globale. » Le dispositif des États Membres concernant les produits médicaux de qualité inférieure/faux/faussement étiquetés/falsifiés/contrefaits a été mis en place le mois dernier pour « promouvoir, par le biais d’une collaboration efficace entre les États membres la lutte contre les médicaments non conformes, afin de protéger la santé publique et favoriser l’accès à des produits médicaux d’un prix abordable, sûrs, efficaces et de qualité ».

Union Européenne : une directive controversée

La directive EU 2011/62 dite du médicament falsifiée entrera en vigueur au 1er juillet. Elle vise les médicaments qui comprennent des principes actifs de mauvaise qualité ou mal dosés. Constatant que la plupart des principes actifs sont aujourd’hui fabriqués hors de l’UE, la directive va renforcer la collaboration entre l’AEM (agence européenne des médicaments), les autorités nationales européennes et les autorités dans les pays tiers. L’un de ses points clés consiste à obliger l’autorité du pays exportateur à délivrer une confirmation écrite, pour chaque substance et chaque site de fabrication, de la conformité aux standards de production européens.

« C’est quand même un faisceau de sécurité supplémentaire », observe Anne Carpentier, directrice des affaires pharmaceutiques au LEEM. Mais les experts interrogés par « le Quotidien » restent dans l’ensemble dubitatifs.

Les industriels se réunissent

Plusieurs comités internationaux se sont constitués pour harmoniser les échanges et les contrôles. C’est le cas de l’ISPE (International society for pharmaceutical ingeneering) qui négocie avec la SFDA (state food and drug administration chinoise).

L’ICH (International conference on harmonisation)vise, elle, à réunir les partenaires industriels européens, japonais et américains, avec les autorités sanitaires nationales et internationales, pour édicter de nouveaux cahiers des charges et des guidelines consensuels et opérationnels.

Le modèle américain

Mais c’est vers l’Amérique que regardent la plupart des acteurs européens. « Tandis que l’Europe n’a pas les moyens de sa sécurité pharmaceutique, note le Pr Fournier, la FDA a mis en œuvre un sytème de financement, le PAI (pre approoval inspection) grâce auquel toutes les entreprises qui exportent vers les USA des principes actifs doivent financer l’envoi sur leurs sites d’une équipe d’inspection. »« C’est la seule manière de systématiser les inspections, insiste Corinne Pouger, et donc de faire face au risque. Il est ahurissant que l’ANSM ne fasse pas financer ainsi ses inspections hors de l’Union. »

Les industriels seraient-ils prêts à être mis dès lors à contribution ? « Sans aucun doute, assure Vincent Touraille, DG de PCAS et qui préside le Sicos (syndicat de la chimie fine). C’est ainsi que mon entreprise verse à la FDA une taxe de 50 000 dollars [38 500 euros] pour chaque site qui exporte vers les USA et 30 000 dollars [23 000 euros] pour chaque nouvelle molécule que nous produisons, des budgets destinés à financer les inspections américaines. »

David Simonnet, dirigeant d’Axyntis, qui se présente lui-même comme un lanceur d’alerte, approuve aussi cette option : « Ni l’ANSM, ni la DEQM n’ont les moyens de leur politique. Cette prise en charge par les exportateurs des budgets du contrôle et de l’inspection constitue la seule manière de mettre fin à la concurrence déloyale qui règne aujourd’hui entre industries respectueuses des normes et de garantir la traçabilité des principes actifs. »

Pour l’heure, le cheval de bataille de David Simonnet, c’est justement l’affichage de la traçabilité, avec l’indication du pays d’origine du principe actif sur les boîtes de médicaments : « Tout le monde trouve cette information normale pour la viande ou pour le mobilier. C’est choquant de priver le consommateur européen d’une information qui est admise aux États-Unis. »

CH. D.

Source : Le Quotidien du Médecin: 9226