Dans le monde comme en France, la prédominance masculine du diabète de type 2 (DT2) est incontestable, avec un sex-ratio de 1,5. Cette prédominance masculine a récemment été confirmée également dans le prédiabète et le diabète non diagnostiqué. Cependant, l’impact délétère du diabète sur le risque cardiovasculaire est plus marqué chez la femme, avec un risque doublé d’AVC et triplé d’infarctus.
Les œstrogènes et les androgènes protecteurs
« Dans l’optique d’une médecine individualisée, outre l’importance du genre, à savoir ce qui concerne les aspects comportementaux et sociétaux qui conditionnent l’exposition aux facteurs de risque de diabète, il est important de prendre en compte ce qui relève du sexe, c’est-à-dire l’ensemble des aspects d’ordre biologique, indique le Pr Pierre Gourdy, endocrinologue (CHU de Toulouse). En l’occurrence, il est clairement démontré que la régulation de la balance énergétique est bien distincte entre les sexes. » C’est aussi le cas des régulations physiologiques du métabolisme du glucose et des lipides, et de leurs adaptations lors des situations propices à l’installation d’un diabète. Les différences, complexes et intriquées, impliquent les chromosomes sexuels, des phénomènes épigénétiques et d’éventuelles interactions avec les perturbateurs endocriniens mais aussi les hormones sexuelles.
Œstrogènes et androgènes exercent une influence positive sur le fonctionnement des organes impliqués dans l’homéostasie énergétique et glucidique (effet protecteur sur le pancréas endocrine, influence sur la biologie des adipocytes et la répartition de la masse grasse, amélioration de la sensibilité à l’insuline, régulation des zones du système nerveux central impliquées dans la régulation alimentaire et la dépense énergétique, etc.). Dans les deux sexes, les hormones stéroïdes sexuelles sont essentielles pour le maintien de l’homéostasie glucidique. « Les études expérimentales et cliniques penchent en faveur d’un rôle protecteur de ces hormones endogènes vis-à-vis des mécanismes qui conduisent au DT2, explique le Pr Gourdy, permettant de limiter les phénomènes d’insulinorésistance hépatique et périphérique mais également les anomalies de l’insulinosécrétion. » A contrario, la carence en œstrogènes liée à la ménopause est souvent à l’origine de conditions favorables au développement d’un diabète de type 2.
Chez la femme, la baisse du taux d’œstrogènes favorise en effet la constitution d’un surpoids avec adiposité viscérale, mais aussi l’installation progressive d’une insulinorésistance et d’une inflammation de bas grade, des traits qui font le lit du DT2. La carence œstrogénique altère aussi la sécrétion insulinique. Pour le Pr Gourdy, « ces observations amènent à envisager l’hypothèse d’une prescription d’un traitement hormonal de la ménopause pour contrer ces changements physiopathologiques liés à la carence œstrogénique ». Le cas échéant, « du fait de l’existence fréquente de facteurs de risque cardiovasculaire chez ces femmes, il serait indispensable de privilégier l’utilisation d’œstrogènes transdermiques et de progestérone naturelle ».
Une période à accompagner
Soutenant cette attitude, des essais randomisés contrôlés ont montré que la prise d’un THM réduisait le risque de développer un DT2 chez les femmes à risque, un effet protecteur retrouvé dans les études observationnelles, notamment la cohorte française E3N. Selon les études et les types de supplémentation, la réduction du risque de diabète sous THM va de 22 à 35 %.
Le NICE anglais a déjà franchi le pas et préconise l’instauration d’un THM dès le stade de péri-ménopause ou de ménopause récente chez les femmes à risque de diabète ou présentant déjà un diabète de type 2.
« Dans tous les cas, un accompagnement attentif de la période péri-ménopausique et post-ménopausique doit permettre de limiter la majoration du risque de DT2. », conclut le Pr Gourdy.
Endocrinologie
Diabète, le rôle de la ménopause sous-estimé ?
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Publié le 25/05/2021
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En favorisant la prise de poids mais aussi l’installation progressive d’une insulinorésistance et d’une inflammation de bas grade, la carence en œstrogènes peut faire le lit du diabète de type 2.
Crédit photo : VOISIN/ PHANIE
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Source : Le Généraliste
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