La réforme du 3e cycle des études médicales a accouché, en 2017, de sept nouveaux diplômes d'études spécialisés (DES) — médecine d'urgence, gériatrie, médecine légale, allergologie, médecine intensive-réanimation (MIR), maladies infectieuses et tropicales, et médecine vasculaire. Après cinq années d'existence, le bilan est mitigé pour plusieurs d'entre elles, qui ont du mal à attirer les néointernes.
C'est le cas de la médecine d'urgence et de la gériatrie, respectivement 38e et 41e spécialités les plus choisies (sur 44) malgré les enjeux qu'elles portent. En gériatrie, une bonne trentaine de postes n'ont pas été pourvus cette année (sur 194 proposés), soit 17 % de postes vacants à l'issue de la procédure de choix. « C'est une déception, réagit le Dr Arnaud Caupenne, porte-parole de l'association des jeunes gériatres, d'autant que nous faisons un travail important avec la Société française de gériatrie et de gérontologie et la spécialité pour analyser les leviers d'attractivité. » Selon lui, la gériatrie reste trop souvent « dénigrée », avec une image de « fin de vie », de « démence » qui lui colle à la peau et assez peu de possibilités d'exercice en libéral. « Or, c'est une spécialité globale, à la croisée de plusieurs disciplines, qui requiert une vision experte, souligne-t-il. D'ailleurs beaucoup de sur-spécialités, comme la cardio gériatrie ou l'orthogériatrie, se développent. »
Clichés
Malgré ses 483 postes pourvus en totalité (mais avec un rang médian à 6 202), la médecine d'urgence souffre, elle aussi, de clichés. « C'est encore trop souvent vu comme une spécialité masculine, où l'on fait des gardes de nuit toute sa vie, constate Capucine Tedesco, trésorière de l'association des jeunes médecins urgentistes (Ajmu). Par ailleurs, ce sont souvent les dysfonctionnements des urgences qui sont montrés, car elles sont un peu la vitrine de l'hôpital public. »Pourtant, les possibilités d'exercice sont nombreuses et ne se réduisent pas à l'hôpital, souligne l'interne parisienne. « On peut travailler en centres d'enseignement des soins d'urgence (Cesu) ou encore médicaliser de grands événements sportifs ou culturels ! » Quant aux gardes, elles ne sont pas forcément mal vécues par les jeunes urgentistes, avec le plafonnement du temps de travail à 48 heures par semaine. « Certains les voient même comme un avantage, cela casse la routine, aucune semaine ne se ressemble », souligne-t-elle.
Parmi les nouveaux DES, l'allergologie, classée 36e comme l'année précédente, et la médecine légale, 34e — plus confidentiels avec une vingtaine de postes sur toute la France — font à peine mieux en termes d'attractivité. Au milieu du gué, on retrouve, comme l'an dernier, la médecine vasculaire et la médecine intensive-réanimation, 30e et 24e du classement des spécialités les plus prisées. Seules les maladies infectieuses et tropicales se hissent dans le premier quart du classement, à la 11e place.
Stages à l'international
De fait, le succès de l'infectiologie, mise sur le devant de la scène pendant la pandémie de Covid ou plus récemment avec la variole du singe, ne se dément pas. « Ce qui attire, c'est l'aspect très varié, ouvert sur le monde, de la spécialité », analyse le Dr Nathan Peiffer-Smadja, du Réseau des jeunes infectiologues français (Réjif). La maquette de l'internat offre la possibilité de faire des stages à l'étranger — Afrique de l'Ouest, Asie ou pays anglophones sont souvent plébiscités. Une fois en exercice, l'infectiologue aura le choix d'une variété de parcours à l'hôpital mais aussi dans des ONG. « Il y a un fort côté humanitaire, beaucoup d'hospitaliers font des maraudes avec le Samu social ou travaillent avec Médecins sans frontières dans les camps de migrants », indique le Dr Peiffer-Smadja, qui cite l'approche « systémique », le caractère « curatif » ou encore le réseau structuré de l'infectiologie au pays de Pasteur.
De quoi donner envie aux confrères des autres spécialités ? « Petit à petit, les internes et les jeunes gériatres se structurent, cela a des effets très positifs, la spécialité va continuer à bouger, veut croire le Dr Arnaud Caupenne. Et nous devons nous saisir de sujets comme la prévention chez les personnes âgées. »
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