Il y a une trentaine d’années, l’activité physique était considérée comme contre-indiquée chez l’insuffisant cardiaque, comme le précisait alors le traité de cardiologie de référence d’E. Braunwald (Braunwald’s Cardiology Textbook, édition 1988).
Cette pathologie étant alors conçue comme une maladie du muscle cardiaque, et les efforts musculaires semblaient délétères. Mais aujourd’hui le réentraînement physique fait partie de la prise en charge des patients en insuffisance cardiaque dans le cadre d’un programme de réadaptation cardiaque, qui comporte en outre une évaluation, un programme d’éducation thérapeutique et l’adaptation des traitements médicamenteux.
Un niveau de preuve élevé
Depuis les années 1990, les mécanismes physiopathologiques qui conduisent à une intolérance à l’exercice, complexes et intriqués, sont en effet de mieux en mieux connus. La relation entre faible capacité d’exercice, altération de la qualité de vie, symptomatologie et pronostic des patients en insuffisance cardiaque a été clairement établie.
Les preuves du bénéfice de l’entraînement physique sur le plan fonctionnel, la qualité de vie et le pronostic sont maintenant bien démontrées. Ainsi, un programme de réentraînement permet d’améliorer les performances maximales d’effort d’environ 20 %. Les améliorations de 20 à 25 % de la morbimortalité sont connues depuis une dizaine d’années et démontrées par des études randomisées et des méta-analyses, à l’exception d’une seule étude, HF-ACTION, analysée en intention de traiter. Il faut noter dans cette étude que le groupe expérimental n'avait atteint que moins de 50 % des objectifs d'activité requis.
Ainsi, l’insuffisance cardiaque est aujourd’hui une indication attestée par un niveau de preuve formel, intégrée dans les recommandations internationales, en particulier européennes. Les recommandations des sociétés savantes françaises, européennes et américaines insistent ainsi toutes sur la nécessité de l’entraînement physique supervisé et de la pratique d’une activité physique régulière à son décours. Elles concernent essentiellement les dysfonctions systoliques (fraction d’éjection inférieure à 40 %). Les travaux concernant les insuffisances cardiaques à fraction d’éjection préservée ont actuellement un niveau de preuve plus faible.
Un risque de complication très faible
Les recommandations du Groupe Exercice Réadaptation et Sport de la Société française de Cardiologie insistent sur la personnalisation de l’entraînement, sa surveillance et l’importance d’un renforcement musculaire en résistance active. En fonction de la gravité de l’insuffisance cardiaque, la prise en charge peut être réalisée en hospitalisation ou en ambulatoire. La réadaptation cardiaque par une équipe pluridisciplinaire est spécifique, adaptée à la gravité clinique, à l’âge et aux comorbidités. Sous réserve de l’application d’un protocole adapté et du dépistage régulier de tout signe de décompensation, le risque de complication est très faible.
La réadaptation est, le plus souvent, commencée en centre spécialisé, notamment au décours d’un épisode de décompensation. La poursuite de l’entraînement à la sortie est essentielle au maintien du bénéfice obtenu. L’orientation vers des structures associatives de phase 3 type « clubs cœur et santé » peut améliorer l’observance à l’activité physique au long cours. Si la réadaptation est uniquement réalisée à domicile, en l’absence d’équipement spécifique, la combinaison de différentes techniques d’exercices adaptés à l’état du patient est souhaitable.
* Président groupe Exercice réadaptation sport de la Société française de cardiologie, service de réadaptation cardiovasculaire, Centre Hospitalier Loire Vendée Océan, Machecoul
Dr Gérard Bozet
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