L’HYPERTENSION ARTÉRIELLE (HTA) est définie par une pression artérielle (PA) ≥ 140 mmHg pour la systolique et/ou 90 mmHg pour la diastolique. Une augmentation rapide et importante de la pression artérielle n’est à considérer comme une urgence hypertensive que si elle est associée à une souffrance organique qui compromet la vie du patient à court terme (1).
« Une pression artérielle de 220/120 mmHg mesurée chez un hypertendu chronique qui se présente chez le médecin avec une entorse de la cheville n’est pas une urgence hypertensive, alors qu’en cas d’éclampsie, une parturiente peut convulser en présence d’une augmentation modeste de la pression artérielle », a rappellé Marc Leemann (2). Ainsi, la gravité d’une poussée tensionnelle est davantage liée à l’existence d’une souffrance viscérale qu’au niveau tensionnel atteint. La West Birmingham Malignant Hypertension Study (3) a confirmé cette donnée en affirmant que la pression pulsée n’est pas prédictive de décès ou de dialyse rénale en cas d’hypertension maligne, et un commentaire judicieux publié dans le même numéro était titré : « Crise hypertensive, oublions les chiffres » (4).
La dénomination en vigueur dans les pays anglo-saxons, plus précise que la nôtre, distingue les urgences hypertensives (« hypertensive emergencies ») et les poussées hypertensives (« hypertensive urgencies »). Les urgences hypertensives sont caractérisées par une poussée tensionnelle associée à une souffrance viscérale (aorte, cœur, cerveau, reins, placenta), et elles compromettent le pronostic vital à court terme. Elles nécessitent donc une réduction rapide de la pression artérielle, de l’ordre de 25 % dans les deux premières heures, en faisant appel à des antihypertenseurs administrés par voie veineuse. Dans les poussées hypertensives, l’hypertension est sévère, avec des chiffres tensionnels dépassant 180/110 mmHg, mais sans souffrance viscérale immédiate. Dans ce contexte, le traitement implique une réduction progressive de la pression artérielle par des antihypertenseurs oraux, le traitement de la cause s’imposant par ailleurs.
Une pénurie d’études.
Des recommandations émises en 2002 par l’Afssaps, mais qui ne sont plus disponibles que sur le site de la Société française de néphrologie*, ont précisé la conduite à tenir en fonction de l’organe cible et du type d’atteinte. Certains domaines abordés dans recommandations ont été mis à jour, mais pas tous. Ainsi, par exemple, en cas de dissection aortique, il est préconisé de faire appel aux bêtabloquants, aux IEC, aux inhibiteurs calciques ou aux dérivés nitrés, la pression artérielle cible étant de 120 mmHg (5).
En cas d’accident vasculaire cérébral, les recommandations (6) sont à compléter par les études ICH ADAPT (Intracerebral Haemorrhage Acutely Decreasing Arterial Pressure Trial), ENOS (Efficacy of Nitric Oxide in Stroke Trial) et INTERACT2 (Second main phase of the Intensive Blood Pressure Reduction in Acute Cerebral Haemorrhage Trial), en cours.
En cas d’épistaxis, enfin, une étude rétrospective apparaît dans un désert de littérature (7). Elle ne fait que souligner qu’un traitement antihypertenseur préventif est nécessaire. Même dénuement pour ce qui est de la poussée hypertensive chez les patients hospitalisés, « une lacune des recommandations » (8).
D’après la communication de Marc Leeman, hôpital Erasme, Bruxelles.
(1) Lancet 2000;356(9227):411-417.
(2) Leeman M. [Hypertensive crisis: when and how to treat?]. Rev Med Brux 2004;25(2):73-78.
(3) J Hypertens 2012;30(5):974-9.
(4) J Hypertens 2012;30(5):882-3.
(5) Circulation 2010;121(13):e266-e369.
(6) Stroke 2010;41(9):2108-2129.
(7) J Am Soc Hypertens 2012;6(4):291-295.
(8) Weder AB. Treating Acute Hypertension in the Hospital: A Lacuna in the Guidelines. Hypertension 2010;57(1):18-20.
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