Des patients paniqués par la nouvelle formule du Lévothyrox, qui associent leurs troubles au changement d’excipients et demandent des rendez-vous en urgence, des professionnels de santé débordés qui passent leurs consultations à rassurer les patients… Face à l’inquiétude, une endocrinologue, le Dr Violaine Guérin, a pris l'initiative de rédiger un texte visant à poser le problème de façon dépassionnée et à expliquer plus clairement les faits.
« J’ai écrit ce texte en réaction à des patients paniqués et au temps important passé en consultation à expliquer les tenants et les aboutissants des inquiétudes suscitées par le « nouveau Lévothyrox » », explique-t-elle.
Efficacité et tolérance
Afin de les rassurer, l’endocrinologue a pris l'initiative de diffuser sur sa page Facebook et dans son cabinet son texte intitulé « Message aux 3 millions de Français sous Lévothyrox : stop à la panique ! ».
Elle précise ainsi ce que sont au juste des excipients et comment ils sont entrés dans la pharmacopée mondiale et européenne (« l’un des systèmes les plus prudents et protecteurs de la planète ») ; à quelles règles est soumis le changement d’un excipient dans un médicament (« respecter la pharmacopée et vérifier la bioéquivalence ») – des règles respectées par le laboratoire Merck - ; comment la tolérance au mannitol peut difficilement être le problème (« la dose de mannitol intégrée dans le « nouveau Lévothyrox » peut être comparée à ce que l’on trouve dans un chewing-gum ») ; et comment l’efficacité a justement été testée par les études de bioéquivalence. « Ce n’est pas l’excipient en lui-même qui pose problème », assure-t-elle.
Associer clinique et biologie
Mais les pathologies thyroïdiennes sont très liées au stress. Or, dans ce cas, la « communication irresponsable » en a généré énormément et « en créant une situation de stress, on en a rajouté », regrette-t-elle. Il s’agit maintenant de lutter contre la panique. « Face à un patient qui ressent des effets secondaires qu’il associe au « nouveau Lévothyrox », la clinique est absolument fondamentale », insiste le Dr Guérin. « Ce qui signifie qu’il faut y passer du temps, d’autant qu’il peut parfois y avoir une dissociation entre biologie et clinique. En plus, les recos conseillent aux médecins généralistes de ne pas doser la T3 et la T4, mais seulement la TSH : c’est absurde, un bon bilan nécessite les trois, et les patients qu’on a du mal à équilibrer sont justement ceux avec un bilan dissocié. »
Stress et événements intercurrents
L’endocrinologue revient aussi sur l’énorme travail de pharmacovigilance à venir. « Beaucoup de gens ont des symptômes qui sont en fait liés au stress, d’autres des symptômes liés à d’autres raisons, mais tout est attribué au Lévothyrox », constate-t-elle. « Il faut reprendre la chronologie, vérifier des possibles événements intercurrents, et en cas de doute faire un bilan. »
Elle donne ainsi l’exemple de deux patientes pour lesquelles, après interrogatoire et examen minutieux, les troubles constatés ont pu être attribués à d’autres paramètres (pose d’un patch à la nicotine surdosé, infarctus du conjoint – forcément générateur de stress…). L’endocrinologue insiste enfin sur la nécessité pour toute la chaîne des professionnels de santé de s’impliquer pour faire cesser la panique.
Interrogée sur RTL, la ministre de la Santé Agnès Buzyn a fait état de 9 000 signalements d'effets indésirables par les patients prenant du Lévothyrox. Les conclusions de l'enquête de pharmacovigilance seront publiées en octobre.
Télécharger le texte du Dr Guérin.
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