Plus de 8 millions d’enfants seraient nés après une aide médicale à la procréation (AMP). La médicalisation de la procréation reste une préoccupation et ce, sur deux plans : l’effet éventuel de la technique — notamment des différentes étapes de la fécondation in vitro (FIV), qui interviennent dans le même temps que la programmation épigénétique — et celui du terrain : personnes infertiles, plus âgées, stimulation hormonale, etc. « La plupart des grandes études récentes concordent pour souligner une augmentation globale de la morbidité maternofœtale après AMP », rapporte la Dr Sylvie Epelboin (Maternité Port Royal, Ap-Hp).
Les données de la cohorte nationale française, qui portent sur près de 50 000 naissances issues de FIV, montrent une augmentation du risque de prématurité pour l’ensemble des naissances (accouchements uniques et multiples de sexe différent). Le surrisque d’hypotrophie après FIV est de 33 % après ajustement sur les autres paramètres tels que l’âge maternel ou la prématurité.
Les dernières analyses, non encore publiées, mettent en évidence le poids de la technique sur le risque de macrosomie. Celui-ci est accru de 32 % après transfert d’embryon congelé (TEC), indépendamment du contexte maternel et des morbidités obstétricales ou néonatales.
Enfin, des études récentes mettent en exergue le rôle propre de l’endométriose quant au risque ajusté de pathologies néonatales.
Malformations congénitales et maladies de l’empreinte
Les études concordent également pour souligner un risque accru de malformations congénitales, initialement mis en évidence dans une métaanalyse publiée en 2013. Selon les données de la cohorte de l’agence de la biomédecine, les odd ratios ajustés sont de 1,15 après transfert embryon frais (TEF), de 1,12 après TEC et de 1,01 après insémination intra-utérine (IIU, non significatif).
Concernant les anomalies épigénétiques, la même cohorte nationale retrouve une prévalence de 0,1 % des maladies de l’empreinte après conception naturelle et de 0,14 % après AMP (0,16 % après TEF, 0,12 % après TEC et 0,11 % après IIU). Dans ce cadre aussi, les analyses rapportent un effet délétère de l’endométriose.
Les données sur le développement cognitif sont rassurantes. Une étude canadienne ayant inclus 175 enfants nés après AMP et 1 345 après conception naturelle, suivis jusqu’à l’âge de 24 mois, conclut à l’absence de différence entre les deux groupes d’enfants quant au développement cognitif, moteur et langagier. Le suivi des enfants dans la cohorte britannique va dans le même sens, en montrant des compétences verbales supérieures chez les enfants nés après injection intracytoplasmique de spermatozoïde (ICSI) ou FIV, différences probablement en lien avec l’environnement parental puisqu’elles s’étaient atténuées à l’âge de 11 ans.
Le risque cardiovasculaire des jeunes adultes nés après AMP a fait l’objet de controverses récentes, par suite de plusieurs études ayant montré une augmentation du risque d’élévation modérée des valeurs tensionnelles. Une publication de la American heart association conclut de son côté à l’absence de vulnérabilité cardiovasculaire spécifique dans cette population.
Concernant le risque de cancer, les données sont elles aussi rassurantes, y compris pour un âge maternel en FIV de plus de 40 ans.
Au total, l’ensemble des données disponibles sont plutôt rassurantes, mais certaines tendances observées appellent à la vigilance et à la poursuite des suivis de cohorte, et à l’analyse des poids respectifs du terrain parental et des techniques.
Exergue : C’est à la fois le terrain parental et les techniques qui peuvent être en cause
Communication de la Dr Sylvie Epelboin, Paris
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