Le rotavirus est responsable chaque année en France de 7 à 17 décès, 14 000 hospitalisations et 155 000 consultations.
« C’est un poids énorme, pour les nourrissons et leur famille, pour les médecins libéraux et pour les services d’urgences pédiatriques, indique le Dr Vié le Sage. S’y ajoute le risque d’infection nosocomiale puisque, en France, les épidémies d’infections à rotavirus et à virus respiratoire syncytial (VRS) sont contemporaines et qu’il n’est pas rare qu’un enfant admis à l’hôpital pour une gastroentérite aiguë y contracte une bronchiolite. Dans ce contexte, l’intérêt de la vaccination par un vaccin administré par voie orale est évident ».
La vaccination rotavirus des nourrissons est pratiquée aujourd’hui dans plus de 70 pays dont 10 en Union européenne et son efficacité clinique a été clairement démontrée. Le risque d’invagination intestinale aiguë (IIA) qui a conduit le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) à reconsidérer sa position vis-à-vis de cette vaccination est connu de longue date. C’est d’ailleurs l’importance de ce sur risque qui avait motivé l’arrêt de l’utilisation aux États-Unis d’un premier vaccin antirotavirus (Rotashield, jamais commercialisé en France). « Les études d’AMM des deux vaccins disponibles actuellement en France ont donc particulièrement ciblé cet effet indésirable, souligne F. Vié le Sage. Et il a été établi que la vaccination augmente le risque d’IIA de 2 à 6 cas pour 100 000 enfants (la fréquence de l’IIA en dehors de toute vaccination est de 30 cas/100 000 enfants) et que ce sur risque est maximal dans les 7 jours suivant la première dose de vaccin ».
Un lien de causalité douteux
«Les deux décès récemment révélés, consécutifs à une vaccination rotavirus, explique le Dr Vié le Sage, ont concerné l’un un enfant de 7 mois qui a eu une IIA plus d’une semaine après une 3e dose de vaccin, ce qui n’est pas la chronologie habituelle des IIA post-vaccinales, et l’autre un nourrisson de 3 mois qui présenterait un mésentère commun, facteur peut être favorisant d’IIA, et dont la prise en charge est intervenue très tardivement après des épisodes de vomissements bilieux et de rectorragies au cours des 7 jours précédents. Pour ces deux cas le lien de causalité avec la vaccination est très douteux. Et pour le deuxième enfant, le problème est surtout lié à un retard du diagnostic et du traitement, indépendamment de la responsabilité éventuelle de la vaccination ».
Les IIA graves qui peuvent conduire au décès sont en général des invaginations négligées. D’où l’importance de savoir reconnaître cette pathologie et d’informer les parents des signes d’alerte, crises douloureuses abdominales, accès de pâleur, vomissements, rectorragies, selles sanglantes…, pour poser le diagnostic et instituer rapidement le traitement, lequel consiste le plus souvent en un simple lavement. C’est dans cet objectif que l’AFPA, Infovac, et le Groupe de pathologie infectieuse pédiatrique (GPIP) de la Société française de pédiatrie ont réalisé ensemble deux fiches d’information sur la vaccination, ses bénéfices et ses effets indésirables, à destination l’une des médecins, l’autre des parents ; elles sont disponibles sur le site de l’AFPA et celui d’Infovac.
Continuer à vacciner
Le Comité technique des vaccinations du HCSP a donc décidé le 21 avril 2015 de suspendre la recommandation de vaccination des nourrissons contre les infections à rotavirus qu’il avait émise en novembre 2013. « L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) avait pourtant indiqué début avril, précise le Dr F. Vié le Sage, que la balance bénéfice/risque de la vaccination restait inchangée et qu’elle était clairement favorable au vaccin. Pour nous, la décision des autorités de santé de ne plus recommander cette vaccination ne remet en aucun cas en cause la nécessité de la pratiquer en France, comme c’est le cas dans de nombreux autres pays avec un rapport bénéfice/risque favorable à titre individuel, mais également un impact collectif, bien démontré dans les pays, -ce n’est pas le cas de la France-, où la couverture vaccinale est élevée. Aucun autre pays n’est revenu sur ses recommandations ».
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