Les lésions oculaires liées au sport n’ont rien de spécifique : elles peuvent concerner toutes les structures, de l’ulcère cornéen aux lésions rétiniennes et aux fractures orbitaires ; le pronostic visuel est engagé dans 2 % des cas avec un risque de séquelles.
Les lésions du segment antérieur sont les plus fréquentes et généralement bénignes. Il faut cependant être particulièrement vigilant en cas de mouvements oculaires anormaux, de déchirure basale de l’iris, de lacération marginale, d’hyphéma (saignement dans la chambre antérieure de l’œil). Une lésion cornéenne peut être ignorée en l’absence de test à la fluorescéine ; une déformation pupillaire ou une lacération profonde de l’orbite doivent faire rechercher une blessure pénétrante.
« Par contraste, les atteintes postérieures sont plus rares mais généralement sévères », remarque la Dr Corinne Diot (Lyon).
Des lésions postérieures potentiellement graves
Une enquête réalisée en 2012 aux États-Unis montre que le sport est incriminé dans un tiers des traumatismes oculaires avec perte fonctionnelle, et dans 13 % des plaies oculaires. Elle permet de classer les sports à haut risque — paintball, baseball, hockey sur glace, basket —, à risque modéré — tennis, soccer, volley, foot, golf —, ou bas — natation, ski, vélo.
En Australie, sur 1 783 patients admis en soins ophtalmologiques tertiaires, 80 % étaient des hommes, de 29 ans en moyenne (1). Les activités sportives le plus souvent impliquées sont les sports de balle — foot (n = 327) ; basket (n = 306) ; tennis (n = 215), cricket (n = 149) — également les plus populaires. On retrouve tout l’éventail de la traumatologie oculaire avec, tous sports confondus, 725 hyphémas traumatiques, 519 contusions rétiniennes, 351 traumatismes conjonctivo-cornéens ; 1,5 % ont nécessité une chirurgie. Les arts martiaux provoquent moins d’accidents (68) mais ce sont de grands pourvoyeurs de ruptures du globe oculaire (13 cas).
Dans une étude de même type menée aux États-Unis sur 4 671 cas, la prépondérance est toujours masculine et l’âge moyen de 19 ans. Les sports de ballon représentent la majorité des traumatismes du segment antérieur (69 % mineurs et 8 % graves) mais soccer et paintball occasionnent aussi des lésions postérieures (0,66 % mineures et 1,65 % majeures). Force est de constater que les protections sont peu utilisées ou de manière inappropriée !
Petites balles et gros dégâts
Aux États-Unis, sur 16 000 traumatismes liés au tennis, on relève 64 % de contusions, 3,2 % d’hyphémas, 1,5 % de plaies du globe et 1 % de décollements de rétine ; 51 % surviennent avant 20 ans, avec un risque d’amblyopie chez les plus jeunes. Les plaies du globe représentent un tiers des patients hospitalisés ; la majorité surviennent avant 12 ans, 87 % sont liés à la balle de tennis et 5 % à la raquette.
Pour le golf, sur 379 accidents, la majorité sont sans gravité (contusion et ulcère de cornée dans 50 % des cas) mais 22 % des traumatismes par balle sont sévères, ils entraînent alors une cécité dans 38 % des cas et une énucléation dans 33 %.
« La plupart du temps, aucune protection oculaire n’est portée, alors que son obligation, par exemple au Canada depuis 2005 pour le squash, et depuis 2013 pour le hockey, a fortement réduit les traumatismes, en particulier les lésions sévères », insiste l’ophtalmologiste.
UV, surf et haute montagne
Le surfeur peut présenter des traumatismes oculo-orbitaires, avec rupture du globe, fracture orbitaire, lacération des paupières. Des industriels s’intéressent à un modèle de protection oculaire adapté.
Le ptérygion, prolifération tissulaire à partir de la conjonctive s’étendant progressivement vers la cornée, toucherait jusqu’à 36 % des surfeurs assidus. Il est lié à l’exposition aux UV.
La rétinopathie de haute altitude peut provoquer des hémorragies à la descente après un trek, avec baisse de l’acuité visuelle en cas de localisation maculaire. Elle est généralement réversible en un à deux mois. L’exposition aux UV, mais aussi au froid ou aux vents en haute montagne, peut entraîner chez les guides des anomalies de la surface oculaire, d’où l’importance de la protection pour réduire le risque de cataracte.
Exergue : Un test à la fluorescéine doit être réalisé pour écarter une lésion cornéenne
Conférence-débat « Œil et sport » (1) Ashraf et al. Emerg Med Australas. 2022 Oct ;34(5):794-800
Article précédent
Freiner la myopie
Article suivant
Multiples uvéites
Freiner la myopie
Gardons l’œil sur le sport
Multiples uvéites
Séchez ces larmes
Effet masque
Plus de biothérapies
Les SMS de la SFO 2023
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?