Le bilan des troubles de la déglutition

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Publié le 10/11/2022
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La dysphagie de l’adulte peut entraîner des conséquences physiques — pouvant mettre en jeu le pronostic vital — et psychologiques notables. Mais les étiologies sont très nombreuses, les signes divers et souvent peu évocateurs. Un grand pan du bilan clinique s’attache avant tout à préciser sa sévérité et son retentissement.
Les mécanismes sont variés et souvent intriqués

Les mécanismes sont variés et souvent intriqués

La dysphagie est extrêmement fréquente, en particulier dans la population la plus âgée : de 10 à 30 % environ des sujets âgés à domicile et de 30 à 70 % en institution.

Les symptômes les plus communs sont la gêne pour avaler, le reflux alimentaire par le nez, la persistance de résidus alimentaires, la toux ou le hemmage pendant ou après le repas, le plus évident étant la fausse route caractérisée. Pour le confirmer, des questions clefs recherchent des symptômes plus discrets : allongement du temps de repas — très évocateur —, difficultés à avaler certains aliments ou leur évitement, adaptation de leur texture mais aussi stase salivaire, amaigrissement, épisodes fébriles inexpliqués ou encombrement bronchique.

Confirmer la dysphagie

Pour évaluer le degré de sévérité de la dysphagie, on dispose de nombreux questionnaires mais le meilleur semble être l’EAT-10, outil validé traduit en français, simple à utiliser (lire encadré).

La première chose à objectiver ensuite est le retentissement sur l’état général. Les signes les plus importants sont la déshydratation, qui contribue à aggraver la déglutition, et la dénutrition — perte de poids, carences vitaminiques, anémie, ostéoporose, etc. — entraînant une fatigue générale limitant les activités. Les fausses routes pulmonaires, avec pneumopathies, encombrement chronique, pics fébriles peuvent précipiter la dégradation de l’état général.

« Le retentissement psychologique est non négligeable, chez des patients souvent anxieux — 41 % des cas —, avec un syndrome dépressif dans un tiers des cas et, chez 40 % d’entre eux, une résignation : seuls 40 % des patients croient en une possible amélioration », souligne le Pr Patrice Gallet (Nancy). L’isolement lors des repas, la perte de la convivialité, du plaisir de passer à table, la peur de s’alimenter ne font qu’aggraver la situation alimentaire.

S’orienter vers une étiologie

Les antécédents d’AVC, de traumatismes crâniens, d’irradiation, de tumeurs des voies aérodigestives supérieures (VADS), de pathologies chroniques comme des maladies de système ou dégénératives, de traitements par psychotropes, peuvent donner une orientation étiologique, en sachant que divers mécanismes peuvent être intriqués.

Les causes sont variées. Elles concernant aussi bien le système digestif — sans oublier les problèmes dentaires — que les maladies métaboliques, endocriniennes, musculaires ou neurologiques.

Globalement, on est orienté vers une origine neurologique en cas de dysphagie aux liquides, et plutôt mécanique devant une dysphagie aux solides. Certains signes associés sont évocateurs : le ptosis bilatéral (myopathie), la diplopie intermittente (myasthénie), les fasciculations linguales (sclérose latérale amyotrophique), les régurgitations d’aliments non digérés (hypertonie du sphincter supérieur de l’œsophage, diverticule de Zenker), une voie bitonale (atteinte d’une corde vocale), l’aggravation d’une voix rauque (cancer du larynx).

Exergue : Un cercle vicieux s’installe avec la déshydratation et l’isolement

Dr Maia Bovard-Gouffrant
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Source : Le Quotidien du médecin