Prévenir l’allergie alimentaire du jeune enfant

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Publié le 13/05/2022
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Les allergies alimentaires sont de plus en plus fréquentes, touchant des enfants de plus en plus jeunes. Les mesures de prévention ont été récemment actualisées, fondées sur une diversification alimentaire précoce avec, notamment, l’introduction des aliments à haut risque (arachide, fruits à coque…). Il est temps de convaincre les parents de changer leurs habitudes !
Les repères du carnet de santé n’ont pas changé, de quoi semer la confusion

Les repères du carnet de santé n’ont pas changé, de quoi semer la confusion
Crédit photo : phanie

À la suite de la publication des dernières recommandations de la société européenne d’allergologie (EAACI) sur la prévention des allergies alimentaires en 2021, la Société française d’allergologie (SFA) vient de publier ses recommandations en février dernier (1). Le Dr Dominique Sabouraud-Leclerc (CHU Reims) a présenté les points essentiels à transmettre aux parents.

Arachide dès 4 mois et régulièrement

La diversification alimentaire doit être précoce, large et régulière dès 4 mois (y compris œuf, arachide, fruits à coque). « Il est important de bien faire comprendre aux parents qu’une fois introduit dans l’alimentation, l’allergène doit être consommé régulièrement, durant toute l’enfance (durée nécessaire non connue) car la consommation d’un allergène suivi d’une période d’éviction serait encore plus à risque d’entraîner une allergie », insiste la Dr Dominique Sabouraud-Leclerc (CHU Reims). Les allergènes introduits précocement doivent être des aliments consommés habituellement par la famille et leur introduction doit être facile et pratique à réaliser pour les parents.

Mais la prise en charge doit aussi être globale : qualité de l’air, pas de tabac, ni polluants intérieurs…

Par ailleurs, dès la naissance, il convient de traiter activement un eczéma et surtout de proscrire l’application de crèmes à base de protéines alimentaires (la voie cutanée est sensibilisante). Il est recommandé de se laver les mains en cas de consommation d’arachide et/ou de fruits à coque à proximité d’un nourrisson.

Accompagner les parents

Il existe une fenêtre d’opportunité entre 4 mois et 6 mois révolus pour la diversification alimentaire et il n’y a pas de nécessité de retarder l’introduction de quelque groupe alimentaire que ce soit. « Mais, en pratique, les études montrent que cela n’est pas fait. L’œuf est introduit trop tardivement et 100 % des parents n’introduisent pas les fruits à coque pendant la fenêtre d’opportunité. D’autant que les repères que les parents trouvent actuellement dans le carnet de santé de l’enfant n’ont pas changé : œuf au 7e mois, pain, gluten au 8e mois, bien après la fenêtre d’opportunité, et il n’y a rien sur l’arachide et les fruits à coque ! Les recommandations sont trop récentes », considère Rachel Pontcharraud (diététicienne-nutritionniste, CHU Toulouse). C’est ainsi qu’un groupe de diététiciens-nutritionnistes spécialisés en allergologie Allergodiet* propose des conseils et fiches pratiques pour aider les familles à introduire les aliments tels que l’arachide et les fruits à coque, l’œuf et le blé.

Allergie aux protéines de lait de vache : pas de laits HA ou HE

L’allergie aux protéines de lait de vache (APLV) se retrouve, selon les études, chez 0,5 à 5 % des enfants (3,3 % avant 6 ans dans la cohorte Elfe). « En France, 59 % des anaphylaxies avant un an sont dues à une APLV. Des mesures de prévention primaire sont ainsi totalement justifiées, au même titre que celles déjà mises en place pour d’autres allergènes », souligne le Dr François Payot (Lyon). On sait maintenant que les manipulations diététiques et les compléments alimentaires chez la mère pendant la grossesse et l’allaitement sont inefficaces (comme pour les autres trophallergènes). De même, l’allaitement maternel, bien que fortement recommandé, n’a pas d’action préventive certaine sur l’APLV. Les compléments de lait 1er âge, donnés en maternité dans l’attente de l’installation de l’allaitement maternel, favorisent l’APLV ultérieure et sont donc proscrits. Enfin, les laits de vache à hydrolyse partielle (laits HA) ou extensive (HE) n’ont pas fait la preuve de leur efficacité préventive sur l’APLV, ni sur les autres allergies et ne sont plus recommandés.

Par ailleurs, plusieurs études observationnelles ont suggéré que l’introduction de lait de vache (LV) avant 3 mois diminuait nettement le risque d’APLV. Une étude interventionnelle (2) a corroboré ces observations. Elle montre que l’ingestion régulière de 10 ml de LV (formule 1er âge), en complément de l’allaitement maternel entre 1 et 3 mois, prévient la survenue de l’APLV IgE-médiée. « L’absence d’APLV pendant la période d’intervention prouve que la dose de 10 ml de lait de vache est suffisante et sûre », a ajouté le Dr François Payot. En attendant de nouvelles recommandations.

Exergue : « L’introduction suivie d’une période d’éviction serait encore plus à risque d’entraîner une allergie »

Session « Prévention primaire de l’allergie alimentaire du jeune enfant : une urgence de santé publique »

*www.allergodiet.org 

(1) D Sabouraud-Leclerc et al. Arch Pediatr. 2022 Feb;29(2):81-9

(2)T Sakihara et al. J Allergy Clin Immunol. 2021 Jan;147(1):224-232.e8

Dr Christine Fallet

Source : Le Quotidien du médecin