La consommation de tabac en France chez les personnes vivant avec le VIH est de 50 à 60 %, alors qu’elle est de 30 à 40 % dans la population générale, tel est le constat de nombreuses analyses épidémiologiques. Autre constat : depuis une dizaine d’années, l’explosion des thérapeutiques a totalement bouleversé l’évolution de la pathologie VIH qui est devenue, en cas de dépistage précoce, une maladie chronique dont les médicaments sont bien tolérés. L’espérance de vie du patient VIH est aujourd’hui quasiment identique à celle de la population générale. Mais, car il y a un « mais », les études de mortalité montrent qu’il existe encore des individus non dépistés qui d’emblée entrent dans la forme grave de la maladie. Et si la première cause de décès reste pour le moment le sida et les causes hépatiques qui diminuent peu à peu au fil du temps, les causes importantes de décès sont représentées par les maladies cardiovasculaires et les cancers dont celui du poumon et les infections, notamment pulmonaires. Quand on regarde la consommation de tabac des patients VIH, le facteur modifiable est le tabac.
Parmi les traitements indiqués dans le sevrage tabagique, la varénicline (Champix, Pfizer) s’avère efficace, avec un taux de succès de 23 % à 52 semaines de traitement dans la population générale, comparé à 10 % avec un placebo. Son efficacité et sa tolérance n’avaient jamais été évaluées chez des personnes vivant avec le VIH. D’où l’intérêt de l’étude multicentrique ANRS 144 Inter-ACTIV mené par le Pr Patrick Mercié.
Des patients sélectionnés.
Compte tenu des alertes existant sur la varénicline (notamment troubles du comportement et de l’humeur) les patients ont été rigoureusement sélectionnés. L’essai a été mené chez 248 patients infectés par le VIH, sous traitement antirétroviral. Il s’agissait de sujets fumeurs motivés pour arrêter de fumer qui ont été répartis en deux bras : l’un, sous varénicline aux doses recommandées, l’autre sous placebo, pendant 12 semaines, suivi d’une période d’observation de 36 semaines. Le traitement était un succès si l’arrêt du tabac survenait au cours de deux premières semaines du traitement. Si les patients rechutaient après la première cure, les investigateurs se donnaient la possibilité de prescrire à nouveau une cure de varénicline en ouvert cette fois.
L’objectif principal était l’abstinence continue de la 9e à la 48e semaine. À 48 semaines, le pourcentage de patients abstinents s’élevait à 17,6 % dans le groupe varénicline contre 7,2 % dans le groupe placebo. L’un des objectifs secondaires était l’abstinence continue de la consommation de tabac entre la 9e et la 12e semaine. À 12 semaines, le pourcentage de patients abstinents sous varénicline était de 34,3 %, contre 12,6 % pour le groupe placebo.
Aucun événement significatif cardiovasculaire n’a été rapporté dans les deux groupes. Il y eut un peu plus d’événements psychiques dans le groupe varénicline mais tout à fait bénins, ne motivant pas la contre-indication de varénicline chez les patients VIH.
Pour l’instant, en attendant le résultat des sous-études statistiques, on peut a priori conclure que la varénicline est efficace par rapport au placebo dans une population sélectionnée, bien contrôlée, motivée, ne présentant pas de dépression active. Le produit est bien toléré tant sur le plan neuropsychique que sur le plan cardiovasculaire.
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