VINGT-TROIS ministres, autant d’histoires. Certains se sont illustrés par de très brefs passages comme Léon Schwartzenberg, restés à peine 10 jours, entre juin et juillet 1988, au ministère de la Santé, ou encore Philippe Bas qui aura conservé son maroquin à peine 3 mois, de mars à mai 2007, et Élisabeth Hubert, ministre de la Santé du premier gouvernement d’Alain Juppé entre mai et novembre 1995, soit 6 mois. Toujours dans le registre de la durée, d’autres se sont distingués par de longs mandats et des nominations renouvelées. En tête de liste, figure Simone Veil dont le temps cumulé au sein d’un ministère de la santé s’élève à plus de 7 années, suivie de loin par Bernard Kouchner qui totalise à ce poste 4 ans et 3 mois. Il y a aussi ceux dont le nom demeure associé aux « scandales » sanitaires : Michèle Barzach, ministre de la Santé dans le gouvernement de Jacques Chirac lors de la catastrophe nucléaire de Tchernobyl en avril 1986 ; Claude Évin, ministre dans le gouvernement de Michel Rocard, puis Bruno Durieux, également dans le gouvernement de Michel Rocard puis d’Édith Cresson, confrontés successivement à la crise de la vache folle, l’affaire du sang contaminé et celle de l’hormone de croissance, au début des années 90. Plus récemment, en 2009, c’est Roselyne Bachelot qui s’est retrouvée sous les feux de la rampe avec la fameuse épidémie de grippe H1N1 et son lot de dépenses pharaoniques. Certains de ces ministres ont particulièrement cristallisé la colère des médecins : ce fut le cas d’Hervé Gaymard, chargé de faire avaler la pilule des « ordonnances Juppé » de 1996.
Enfin, il y ceux désormais assurés d’entrer dans la postérité, parce qu’ils ont laissé leur nom à une loi. En 40 ans, seulement 3 ministres en auront eu l’honneur : Simone Veil, Claude Evin et Bernard Kouchner.
• La loi Veil
Le 26 novembre 1974, à l’issue de 25 heures de débats, la centriste Simone Veil, alors ministre de la Santé, obtenait des députés français la dépénalisation de l’avortement. Allant à l’encontre de l’avis du garde des Sceaux, Jean Lecanuet, mais bénéficiant du soutien du « Premier ministre bis », le très giscardien Michel Poniatowski (Intérieur), Simone Veil arrachait donc cette décision à l’Assemblée nationale, grâce aussi à l’appui des députés de gauche, des communistes et des socialistes. La loi entre en vigueur le 17 janvier 1975, alors que 250 000 femmes avortaient encore dans la clandestinité, malgré l’existence de la pilule contraceptive. Adoptée seulement pour 5 ans, elle fut prorogée en 1979. Puis modifiée par la loi du 4 juillet 2001, qui a notamment autorisé les femmes à mettre fin à une grossesse jusqu’à la 12e semaine, contre 10 auparavant.
• La loi Évin
Le 10 janvier 1991, la France se dote d’une loi visant à réduire la consommation d’alcool et de cigarettes, en tant que produits néfastes pour la santé et impliquant une forte dépendance ; c’est une étape décisive dans l’histoire de la prévention et de la lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme. La voie choisie par le député PS Claude Evin repose essentiellement sur la neutralisation de la publicité et l’obligation de messages préventifs : promouvoir la cigarette est désormais interdit, tandis que l’alcool n’a plus le droit de cité à la télévision et au cinéma. Considérant qu’elle était peu ou mal appliquée, les associations de lutte contre le tabac ont obtenu un renforcement de cette loi, par l’interdiction totale de fumer dans les établissements publics y compris les établissements conviviaux comme les cafés, bars, discothèques et restaurants au 1er janvier 2008.
• La loi Kouchner
Les États généraux du Sida, dès 1990, puis ceux du cancer en 1998 et des personnes atteintes de maladies génétiques et orphelines en 1999, consacrent la modification de la place des patients et des usagers dans le système de santé. C’est sur cette base que la loi du 4 mars 2002, relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, dite « loi Kouchner », sera promulguée. Cette dernière consacre un large volet à la démocratie sanitaire, appuyée sur le rôle des associations et des représentants des usagers, qui élargit encore les champs d’expertise des malades et de leurs représentants. Elle introduit la notion juridique de « droit des malades », et instaure le droit des patients à disposer de la totalité de leur dossier médical. Cette loi va également modifier les dispositions de la loi de 1990, concernant l’hospitalisation sans consentement.
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