Entretien
LE QUOTIDIEN : Quel est le chemin parcouru depuis la Constitution de 1988 qui établit la santé comme un droit universel et un devoir de l’État ?
Dr JOSÉ GOMES TEMPORÃO : Il y a eu beaucoup d’effets positifs. La mortalité infantile a diminué de moitié. Notre stratégie de soins primaires couvre un habitant sur deux. Le secteur public couvre 100 % de la population pour les médicaments coûteux, les vaccins, les urgences, les greffes d’organes. Le Brésil est le 2e pays au monde pour le nombre de transplantations. Notre programme de vaccination est une autre réussite, ainsi que notre programme SIDA. 250 000 Brésiliens vivent avec le VIH, tous sont pris en charge par le secteur public. Le traitement, produit ici, est gratuit.
Pourtant, de fortes inégalités persistent...
C’est vrai. L’offre de soins n’est pas la même à Rio et en Amazonie. Les délais sont longs pour accéder aux spécialistes. Notre système doit affronter la transition démographique : les deux premières causes de mortalité sont les maladies cardio-vasculaires et le cancer. La transition nutritionnelle est un autre défi, car la moitié de la population est en surpoids. Notre système est sous financé : 40 % des dépenses de santé sont publiques. Bâtir un système universel nous occupera pendant encore 50 ans!
Comprenez-vous les manifestants qui réclament des écoles et des hôpitaux ?
Oui. J’appartiens à une génération qui a lutté contre le gouvernement militaire. Je me suis battu, comme des milliers de collègues, pour qu’on garantisse un accès universel aux soins. Pour y parvenir, le Brésil doit produire davantage localement. Aujourd’hui, nous importons 80 % des technologies de santé (médicaments, matériels, équipements). C’est trop. Lorsque j’étais ministre, j’ai lancé une nouvelle stratégie en ce sens.
Les Brésiliens voteront en octobre. La santé sera-t-elle un thème de campagne ?
Sûrement. Je suis très critique par rapport à la politique menée par Dilma Rousseff. L’actuel gouvernement est influencé négativement par le modèle américain. Ma génération continuera de lutter contre la privatisation du secteur public de santé. Tous les politiques tiennent ce discours mais quand un député, un sénateur ou le président tombe malade, il va dans le meilleur hôpital privé de São Paulo. Alors que nous avons d’excellents hôpitaux publics!
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