Le traitement de référence de l’AVCi aigu reposait jusqu’en 2015, sur la TIV par rt-PA seule, jusqu’à 4 h 30 après le début des symptômes avec une efficacité d’autant plus importante qu’elle est réalisée tôt. Les limites de la thrombolyse sont : une fenêtre thérapeutique étroite, un taux faible de recanalisation et un risque hémorragique certain.
Début 2015, cinq études démontrent la supériorité de l’association thrombectomie et TIV par rapport à la TIV seule. Cette double approche permet de réduire le handicap (de 36 %) sans augmenter la mortalité et les complications hémorragiques. Ce bénéfice est d’autant plus net chez le sujet âgé de plus de 80 ans. « Dans ces études princeps, la thrombolyse a été faite extrêmement rapidement » fait remarquer le Dr Sandrine Deltour (Urgences Cérébro-Vasculaires, Hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris). D’autres études sont venues depuis conforter ces résultats avec un bénéfice prouvé de la thrombectomie jusqu’à 7,3 heures. L’AHA (American Heart Association) et l’ESO (European Stroke Organisation) ont émis des recommandations en 2015 fixant la fenêtre thérapeutique de la thrombectomie à 6 heures. Jusqu’à maintenant la thrombectomie seule était réservée à des patients vus entre 4 h 30 et 6 heures (hors délai thrombolyse) ou des patients ayant une contre-indication à la TIV.
L’étude DAWN, présentée au congrès ESOC en mai 2017, a comparé un traitement médical standard versus thrombectomie chez des patients randomisés entre 6 et 24 heures avec une occlusion proximale. 64,5 % des patients inclus présentaient des AVC du réveil. L’étude arrêtée précocement pour futilité conclut au bénéfice de la thrombectomie entre 6 et 24 heures avec 73 % de réduction de risque relatif de dépendance à 3 mois. 48,6 % des patients traités par thrombectomie étaient autonomes à 3 mois contre 13,1 % dans le bras médical seul. Ces données extrêmement enthousiasmantes pour le pronostic des patients victimes d’AVC ischémiques auront un impact organisationnel majeur sur la régulation. Jusqu’à présent la question était celle de savoir où adresser le patient vu dans les 6 premières heures : privilégier la rapidité d’administration d’une TIV dans une UNV (Unité Neurovasculaire), ou un service d’urgence avec télémédecine, à proximité du patient ou orienter directement le patient dans un centre avec NRI (Neuroradiologie Interventionnelle).
UNV de proximité ou de recours ?
En France, il existe 132 UNV et 37 centres de NRI, d'où la complexité des choix de régulation. « Grâce aux UNV de proximité, les patients peuvent bénéficier d’une thrombolyse rapide et dans un second temps, si besoin, être adressés à un centre de NRI pour une thrombectomie. Lorsqu’ils sont dirigés vers une UNV de recours d’emblée, ils auront l’association thrombolyse + thrombectomie, mais au prix d’une thrombolyse le plus souvent plus tardive » explique le Dr Sandrine Deltour. Tout l’enjeu est donc d’arriver à sélectionner en amont les patients éligibles à la thrombectomie et de les adresser directement en UNV de recours (UNV + NRI).
Plusieurs scores cliniques ont été développés afin de pister l’occlusion intracrânienne. « La gravité du patient est corrélée à l’occlusion. Un score clinique NIHSS (National Institute of health stroke score) ≥ 10 dans les moins de 3 heures est en faveur d’une occlusion proximale » souligne le Dr Sandrine Deltour. « D’autres scores plus simples et rapides émergent ces derniers mois : RACE ≥5, FAST-ED ≥ 4 sont prédictifs d’une occlusion proximale… ». Les dernières recommandations de l’ESO (novembre 2016) sont de privilégier l’UNV de proximité si le transfert en UNV de recours est plus long de 30-45minutes.
D'après un entretien avec le Dr Sandrine Deltour (Urgences Cérébro-Vasculaires, Hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris)
Article précédent
Vers une prise en charge en ambulatoire non grave
Article suivant
La morphine en débat
Au-delà de la prise en charge
Place de l’échographie aux urgences
Vers une prise en charge en ambulatoire non grave
Thrombolyse et/ou thrombectomie ?
La morphine en débat
Quelles perspectives?
L'ECMO en seconde intention
La simulation, un outil pour mieux former ?
Réagir de manière raisonnée
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature