À tabagisme égal, les femmes sont plus à risque que les hommes de développer pathologies cardiovasculaires, cancers pulmonaires, BPCO et leur mortalité est plus élevée. Elles seraient aussi plus vulnérables au tabagisme passif d’autant qu’elles sont – du moins jusqu’à il y a peu – plus exposées au tabagisme de leur partenaire (1).
Les mécanismes sont multifactoriels et restent imparfaitement compris. Le plus petit gabarit des femmes pourrait expliquer en partie la plus grande toxicité du tabac. On peut supposer que, le diamètre des bronches et des artères étant aussi plus petit, les rétrécissements bronchiques ou artériels se manifestent plus rapidement, mais on manque d’études mettant en évidence une corrélation entre taille corporelle toxicité du tabagisme.
Les hormones ont vraisemblablement un rôle. On sait que la nicotine a un effet anti-œstrogénique ; or, les œstrogènes ayant plutôt un rôle protecteur, cela pourrait partiellement expliquer les complications cardiovasculaires chez les fumeuses (2). Le tabac a un effet prothrombotique à la fois sur le plan artériel et veineux. « Chez les plus jeunes, le risque est surtout veineux : le tabagisme entraine un surrisque de thrombose veineuse profonde qui sera aggravé par la prise d’une contraception hormonale orale (3). La coexistence tabagisme/contraception hormonale orale multiplie par 10 le risque de maladie coronarienne », alerte la Pr Carole Clair, co-cheffe de département au Centre de médecine générale et santé publique (Unisanté, Lausanne).
Une relation dose-dépendante avant la grossesse
Le rôle du traitement hormonal substitutif (THS) est plus complexe. La women health study (WHS) avait montré qu’il avait un effet délétère sur le risque thromboembolique et on pouvait supposer qu’il serait encore aggravé par le tabagisme. Une large étude a cependant montré que, si le tabac est en lui-même prothrombotique, il ne modifie pas le risque lié au THS (4).
On a maintenant des arguments en faveur du surrisque de cancer du sein chez les fumeuses. Dans une cohorte d’infirmières danoises, le risque est augmenté de 18 % chez celles qui ont fumé, de 27 % chez celles qui continuent à fumer (5). La relation est dose-dépendante et le surrisque est plus important chez les femmes qui ont fumé avant leur première grossesse.
Enfin, les femmes sont plus susceptibles d’utiliser les cigarettes comme une stratégie pour gérer leur poids et lutter contre le stress ou des situations difficiles ce qui rend le sevrage plus difficile (lire supra).
Entretien avec la Pr Carole Clair (Lausanne)
(1) Clair et al, Rev Med Suisse. 2015;11:1298-303
(2) Tansavatdi et al. Minerva Ginecol. 2004 Feb;56(1):105-14
(3) Shufelt et al. J Am Coll Cardiol. 2009 Jan 20;53(3):221-31
(4) Blondon et al. Br J Haematol. 2013 Nov;163(3):418-20
(5) Andersen et al. BMC Cancer. 2017 Aug 22;17(1):556
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