Après un cancer du sein, la fertilité est très altérée, conséquence de la gonadotoxicité des chimiothérapies et de l’avance en âge des femmes, chez lesquelles le projet de grossesse est de fait retardé. Globalement, les chances de grossesse sont de 40 % moindres que celles de la population générale et deux études rapportent une incidence des grossesses après cancer du sein de seulement 8 % chez les femmes de moins de 35 ans et de 6 % chez celles âgées de moins de 40 ans.
Pourtant, une enquête récente montre qu’un tiers des femmes ont un réel projet de grossesse, mais que seulement un tiers d’entre elles ont tenté de concrétiser. « Le recours à une méthode de préservation de la fertilité permet d’augmenter les chances de grossesse et d’aboutir à plus de naissances vivantes », a souligné la Dr Charlotte Sonigo (Clamart), tout en rappelant que l’oncofertilité est une discipline jeune, née au début des années 2000 et qui ne bénéficie donc que d’un recul limité.
Des protocoles adaptés
La préservation de la fertilité se fonde aujourd’hui, lorsque cela est possible, sur la congélation d’ovocytes ou d’embryons avec stimulation hormonale préalable. Les protocoles habituellement utilisés ont été adaptés à ce contexte, où la stimulation et la ponction ovocytaire par voie vaginale doivent parfois se faire dans l’urgence, en évitant l’effet d’une élévation de l’estradiol et d’une hyperstimulation ovarienne. Des études récentes ont confirmé qu’il est possible de débuter les gonadotrophines exogènes à n’importe quel moment du cycle, sans que cela n’ait d’impact sur le nombre d’ovocytes ponctionnés, sur le taux de maturité et le taux de fécondation ni, a priori, sur les chances de grossesse. C’est aujourd’hui le létrozole qui est le plus souvent utilisé dans le monde et en France, en dépit de son absence d’AMM en France dans ce contexte.
Il est également possible de réaliser si besoin plusieurs cycles de stimulation. Ces protocoles ont confirmé leur sécurité sur le plan de l’évolution de la pathologie mammaire, et notamment leur absence d’impact sur la survie à 5 ans. La technique est efficace, avec un taux de 43 % de naissances vivantes en cas de ponction de plus de 10 ovocytes dans une étude de 2018, mais le nombre de femmes ayant eu recours à cette approche est encore limité.
Autre technique, toujours considérée comme innovante par manque de recul : la maturation in vitro de follicules prélevés sans stimulation préalable. Cette approche est plus complexe, son rendement est faible, avec une perte de follicules à chaque étape, ce qui nécessite que la femme ait une bonne réserve ovarienne. Mais elle a pour avantage de pouvoir être réalisée à n’importe quel moment du cycle et répétée 10 jours plus tard. Elle peut être associée à une cryopréservation de cortex, méthode encore au stade expérimental, qui a donné lieu à quelque 200 naissances vivantes dans le monde toutes indications confondues.
Enfin, le recours à des agonistes de la GnRH en cours de chimiothérapie est une approche encore très débattue, avec des avantages et des inconvénients potentiels, car les études ont donné des résultats contradictoires.
Au total, le choix de la stratégie dépend de l’âge de la patiente, de sa réserve ovarienne, de la gonadotoxicité prévisible du traitement, de l’urgence à démarrer le traitement, de la présence d’un partenaire masculin et des souhaits de la femme.
Exergue: L’oncofertilité est une discipline jeune, née au début des années 2000 seulement
Communication de la Dr Charlotte Sonigo, Clamart
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