L’heure des recommandations

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Publié le 26/02/2021
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Carrefour des spécialistes de la femme, le congrès PSF réunit gynécologues médicaux, chirurgiens, obstétriciens, sages-femmes, oncologues, radiologues, et bien d’autres. L’occasion pour tous de faire le point sur quatre nouvelles recommandations de pratique clinique, fruit d’un travail collectif, parues cette année… Et peut-être déjà d’amorcer la discussion sur les prochains sujets.
Les gynécologues ont plaidé pour que les femmes enceintes aient accès aux vaccins Covid, sans succès pour l’instant

Les gynécologues ont plaidé pour que les femmes enceintes aient accès aux vaccins Covid, sans succès pour l’instant
Crédit photo : phanie

Parmi les événements très attendus, les recommandations de pratique clinique (RPC) sur la ménopause ont été largement suivies. « Fruits d’un travail de deux ans, elles permettent de réhabiliter le traitement hormonal de la ménopause, dans un contexte d’hésitations chez bon nombre de praticiens », souligne le Dr Geoffroy Robin, secrétaire général du CNGOF en charge de la gynécologie médicale. La préférence va à l’estradiol par voie transdermique, associée à la progestérone micronisée ou la dydrogestérone, combinaison considérée comme ayant un bon profil de tolérance en termes de risque de thromboses veineuses et artérielles et de cancers au cours des premières années suivant la ménopause (lire p. XX).

Ménorragies, des situations cliniques très diverses

Autres RPC importantes, sur une situation très fréquente en pratique et qui intéresse gynécologues médicaux et chirurgiens : celles consacrées aux ménorragies, dont la méthodologie très rigoureuse devrait leur donner un rayonnement international (lire p. XX). Elles proposent une vision complète de toutes les possibilités thérapeutiques, médicales et chirurgicales, dans l’ensemble des situations cliniques, fonctionnelles et organiques rencontrées.

« Toute une session a également été consacrée à la prise en charge des cystocèles, pathologie elle aussi fréquente, afin de mieux les comprendre, les explorer et les traiter », rapporte le Pr Pierre Collinet, secrétaire général « chirurgie » du CNGOF.

« La prise en charge de l’endométriose était bien sûr au programme, rappelant le rôle clé du gynécologue dans les réponses à apporter aux adolescentes souffrant de cette pathologie, que ce soit pour la hiérarchisation des examens paracliniques ou pour le choix des traitements à mettre en œuvre, en lien avec les recommandations CNGOF-HAS », complète le spécialiste.

Consensus autour des nouveaux progestatifs

« Au travers de diverses sessions, les messages sur les trois nouveaux progestatifs étaient très cohérents », poursuit le Dr Robin. Les caractéristiques très particulières du diénogest, dont il existe trois génériques remboursés, lui confère une place de choix dans l’endométriose. La nouvelle drospirénone, contraceptif progestatif, est destinée aux femmes ayant une contre-indication aux estroprogestatifs. La pilule contenant du norgestimate expose à un risque d’événement thromboembolique veineux comparable aux pilules de 2e génération, et a une certaine efficacité sur l’hyperandrogénie modérée comme l’acné.

« Les RPC sur la prééclampsie sévère préconisent, lorsqu’un traitement antihypertenseur est indiqué, de faire appel aux alpha-bêta-bloquants (labétolol), même s’il est également possible de recourir à un inhibiteur calcique lent », indique le Pr Cyril Huissoud, secrétaire général « obstétrique » du CNGOF. Les RPC précisent la classification, selon la présence ou non signes de gravité, et mettent l’accent sur l’utilisation du sulfate de magnésium, qui est aujourd’hui un peu plus souvent prescrit dans ce contexte. Un regain d’intérêt dû à sa supériorité sur les benzodiazépines et son action neuroprotectrice, qui limite la souffrance neuronale et permet de réduire, chez l’enfant prématuré, le risque de paralysie motrice cérébrale.

eDépistage de la trisomie 21, des plus et des moins

L’essor des tests non-invasifs pour le dépistage de la trisomie 21 a permis de dépister un plus grand nombre de fœtus porteurs de cette anomalie génétique. Parallèlement le nombre d’amniocentèses a été divisé par quatre, passant de 80 000 en 2009 à 18 000 en 2018, ce qui a réduit d’autant le nombre de fausses couches liées à cet examen. Mais des anomalies génétiques, auparavant dépistées lors d’une amniocentèse, ne l’ont pas été et on assiste à une augmentation des naissances d’enfants ayant d’autres types de remaniements génétiques. Cela conduit à rediscuter l’extension des tests sur sang maternel. Ces conséquences négatives de la baisse du nombre d’amniocentèses pourraient à l’avenir être corrigées par la réalisation d’une analyse complète de l’exome… Sujet encore débattu.

Enfin, toute une session a été consacrée à l’épidémie de Sars-Cov-2 et à l’impact de cette infection sur le déroulé de la grossesse (lire p. XX). Les données accumulées depuis près d’un an ont confirmé l’évolution plus souvent sévère de l’infection chez les femmes au 3e trimestre de la grossesse. Le CNGOF regrette de n’avoir pas été sollicité par les autorités dans le cadre des discussions sur la vaccination. Les femmes enceintes ont été exclues de l’accès au vaccin, alors que le Collège souhaiterait qu’elles puissent avoir le choix d’en bénéficier ou pas.

Entretiens avec les Dr Geoffroy Robin (Lille), Pr Pierre Collinet (Lille) et Pr Cyril Huissoud (Lyon)

Dr Isabelle Hoppenot
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Source : Le Quotidien du médecin