Par son efficacité sur le contrôle de la glycémie et la perte de poids, le sémaglutide, un agoniste des récepteurs du GLP1, a fait ses preuves sur la réduction des événements cardiovasculaires chez les diabétiques de type 2 (DT2). L’étude Select va au-delà en montrant son intérêt en prévention secondaire chez les personnes en surpoids ou obèses mais non diabétiques (1).
-20 % de Mace dans le surpoids
Dans cet essai international, 17 500 personnes en surpoids ou obèses, non diabétiques mais avec des antécédents cardio- ou cérébrovasculaires, ont été randomisées pour recevoir en sous-cutané, une fois par semaine, soit un placebo soit le sémaglutide (débuté à 0,24 mg et augmenté progressivement toutes les quatre semaines jusqu’à 2,4 mg/semaine, dose approuvée par la FDA pour la réduction du poids — différente des doses de 1 à 2 mg/semaine préconisées dans le DT2).
Les participants recevaient par ailleurs les traitements adaptés à leurs pathologies et leurs facteurs de risque cardiovasculaires (CV). Ils étaient âgés de plus de 45 ans, 72 % étaient des hommes, avaient un IMC moyen d’au moins 27 kg/m2, plus de 70 % ayant IMC > 30. Si aucun n’avait de diabète à l’inclusion, les deux tiers répondaient aux critères d’un prédiabète, avec une HbA1c comprise entre 5,7 % et 6,4 %.
Après un suivi moyen de 40 mois, on constatait une réduction de 20 % des événements CV majeurs – infarctus du myocarde (IDM), accident vasculaire cérébral (AVC), décès d’origine CV – dans le groupe sémaglutide. Dans ce groupe, la réduction pondérale était en moyenne de 9,4 %, vs 0,9 % sous placebo.
Aucun nouveau problème de tolérance n’a été observé, et le taux d’événements indésirables graves était plus faible dans le groupe sémaglutide. Il a été arrêté plus fréquemment que le placebo en raison d’intolérances gastro-intestinales, mais sans effet gastro-intestinal grave, et surtout sans augmentation du nombre de pancréatites, préoccupation soulevée avec les médicaments de cette classe.
« Les résultats de Select sont très encourageants pour les personnes en surpoids ou obèses, aucun traitement spécifique de l’obésité ou du surpoids n’ayant fait l’objet d’étude randomisée chez les non-diabétiques et, a fortiori, n’ayant montré de bénéfice sur les évènements CV », se félicite le Dr A. Michael Lincoff (Cleveland, Ohio).
Toutefois, cette étude n’ayant inclus que des patients en prévention secondaire, on ne peut actuellement pas en tirer des conclusions sur un potentiel effet en prévention primaire. Des analyses supplémentaires sont prévues, en particulier afin d’identifier les mécanismes du bénéfice CV – réduction de la graisse abdominale, de l’inflammation, de la glycémie ou effet direct de la molécule sur les plaques artérielles.
Bénéfice cardiométabolique après IDM
L’étude de phase 3 Dapa-MI (2), fondée sur un registre international (Suède et Royaume-Uni), s’est intéressée aux patients en post-IDM (avec altération de la fraction d’éjection ventriculaire gauche [FEVG] ou une onde Q) mais sans diabète connu, ni insuffisance cardiaque (IC).
Les 4 017 patients ont été randomisés pour recevoir soit le placebo soit la dapagliflozine à 10 mg, associés au traitement standard. L’âge moyen était de 63 ans (80 % d’hommes) ; à l’inclusion, 65 % avaient un IDM avec élévation du segment ST, 8 % avaient déjà un antécédent d’IDM, 2 % un antécédent d’AVC ; deux tiers avaient une FEVG inférieure à 50 %. Ils recevaient, à plus de 80 %, des IEC/ARA 2, des bêtabloquants, des statines et une bithérapie antiplaquettaire.
Le critère de jugement principal initial reposait sur les décès d’origine CV et les hospitalisations pour IC mais, au vu de la faible incidence des évènements, il a été secondairement complété par les IDM non mortels, la fibrillation atriale (FA)/flutter auriculaire, l’apparition d’un DT2, la classe NYHA ou une perte pondérale ≥ 5 % lors de la dernière visite.
Après un an de traitement, l’analyse en « win ratio » (hiérarchisant les éléments du critère composite en fonction de leur gravité) montre un bénéfice significatif dans le groupe dapagliflozine (win ratio de 1,34 ; p < 0,001). « Ces résultats sont cependant mitigés en raison du faible taux d’événements. On ne constatait pas de différences sur les critères CV durs ; la supériorité de la dapagliflozine était essentiellement liée aux critères cardiométaboliques, sans effet sur les décès CV ou les hospitalisations pour IC », concède le Pr Stefan K. James (Uppsala, Suède). Aucun problème de sécurité n’a été identifié.
Réduction des arythmies ventriculaires
La récente étude Empa-Reg Outcome avait montré que l’empagliflozine réduisait la mort cardiaque subite, faisant supposer un effet anti-arythmique. L’étude multicentrique japonaise Empa-ICD a inclus 150 patients DT2 équipés d’un défibrillateur automatique implantable (DAI) ou d’un CRT-DAI (DAI avec resynchronisation), randomisés pour comparer l’empagliflozine au placebo sur le nombre d’arythmies ventriculaires (AV), 24 semaines avant et pendant le traitement (3).
Le nombre d’AV enregistrées a diminué de 1,69 (± 21,46) par rapport à la période initiale sous empagliflozine, alors que dans le même temps il augmentait sous placebo de 1,79 (± 10,67). La différence entre les groupes était de -1,07 (p < 0,001) en faveur de l’empagliflozine. De même, le nombre de thérapies appropriées augmentait de 0,06 ± 0,70 dans le groupe empagliflozine, vs 0,27 ± 1,86 dans le groupe placebo, avec une différence de 1,16 (IC95 [-2,95 ; 0,63]) entre les groupes. Le nombre d’extrasystoles ventriculaires (ESV) était aussi réduit (19,50 vs 392,84 ; IC95 [-1 478,70 ; 732]).
Il reste à élucider quels sont les mécanismes de cet effet anti-arythmique, et peut-être le vérifier dans une population non japonaise.
Une aide dans la FA ?
Un autre antidiabétique, le liraglutide, agoniste du GLP1 également approuvé pour la réduction pondérale, a été évalué dans la FA, afin de savoir s’il pouvait améliorer les résultats de l’ablation.
L’étude Leaf a inclus 65 patients en FA avec un IMC ≥ 27 kg/m2 et devant bénéficier d’une ablation par cathéter (4). Dans les trois mois précédant l’ablation, ils étaient randomisés pour recevoir ou non du liraglutide, en plus de la prise en charge des facteurs de risque. Dans le groupe témoin, les 28 patients avaient un IMC moyen de 34,7 ; ils étaient 31 dans le groupe liraglutide, avec un IMC moyen de 37,4. On relevait 80 % de FA persistantes et 20 % de FA paroxystiques. Y étaient associés l’HTA (85 %), le DT2 (27 %) et des syndromes d’apnées-hypopnées du sommeil (SAOS) (44 %). Le score Cha2ds2-Vasc était en moyenne de 2,4, et la FEVG de 56,3 %.
L’ablation a été complète sauf chez un patient. La réduction du poids (2,8 %), ainsi que celle de l’épaisseur du tissu adipeux épicardique (EAT) ont été significatives après l’intervention, sans différence entre les deux groupes.
À un an, 21 patients n’ont plus de FA ni de traitements anti-arythmiques dans le groupe liraglutide, vs 13 dans le groupe témoin (p = 0,036). « Les agonistes du GLP1 peuvent être un traitement d’appoint utile pour les patients obèses atteints de FA », remarque le Dr Jeffrey J. Goldberger (Miami, Floride). Le bénéfice étant d’autant plus marqué que la perte de poids est la plus importante ; d’autres essais devraient questionner le rôle du poids et de la réduction pondérale dans l’amélioration des résultats de l’ablation.
(1) AHA 2023. LBS 01. Lincoff AM et al. (2) AHA 2023. LBS 02. James SK et al. (3) AHA 2023. FS 01. Fujiki S. (4) AHA 2023. FS 06. Goldberger J.
Article suivant
Moins de PA pour moins de démence
Des antidiabétiques tout-terrain
Moins de PA pour moins de démence
Vers un traitement antihypertenseur semestriel ?
Les troubles menstruels, à risque cardiovasculaire
Plus de transfusions après IDM ?
Toujours trop de morts subites au sport
Les SMS de l’AHA 2023
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?