Obésité et diabète de type 2

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Publié le 14/10/2011
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Crédit photo : BSIP

L’obésité est un facteur de risque fort pour le développement de l’insulinorésistance et elle est associée à l’augmentation des adipocytokines circulantes, proinflammatoires, secrétés par le tissu adipeux. Plusieurs études prospectives ont ainsi trouvé un lien entre des marqueurs inflammatoires élevés (CRP, fibrinogène), l’inhibiteur de la sérine protéase PAI-1 (plasminogen activator inhibitor-1) et l’insulinorésistance, mais également avec des pathologies cardiaques et des complications microvasculaires du diabète. Il a été suggéré que les adipocytokines sont des médiatrices paracrines de l’inflammation des tissus adipeux et des médiateurs endocrines entre les tissus adipeux et d’autres tissus tels les muscles squelettiques, contribuant à l’insulinorésistance et au diabète de type 2. D’autres hypothèses ont été avancées pour le développement de l’insulinorésistance, démontrant une physiopathologie très complexe dans la genèse de cette affection. Des facteurs génétiques associés à des facteurs environnementaux, notamment le stress, contribuent à l’instauration de l’obésité et au diabète de type 2.

Les sociétés européenne et américaine de diabétologie (EASD et ADA) ont publié un consensus (1) affirmant les directions que devrait prendre la recherche dans le domaine du diabète, que ce soit en termes de sciences fondamentales, clinique ou en médecine des populations. Ce texte pose notamment un certain nombre de questions, soulignant l’importance d’une meilleure compréhension des liens unissant obésité et diabète : pourquoi tous les obèses ne développent-ils pas un diabète de type 2 ? Quels mécanismes unissent diabète de type 2 et décompensation béta-cellulaire ? Quelle réduction d’incidence du diabète de type 2 pouvons-nous attendre suite à une réelle prévention de l’obésité et quel est l’impact des différentes méthodes de perte de poids (intervention hygiénique, thérapeutique, chirurgie bariatrique) sur la fonction béta-cellulaire et la glycémie, comment affecte-elle la durée du diabète ? À la clé, de nombreuses discussions sur le rôle respectif de l’insulinorésistance et l’inflammation, dans la physiopathogénie du développement d’un diabète obèse.

Surpoids : intervenir en amont.

Les experts réaffirment par ailleurs certains principes dans ce texte parmi lesquels la nécessité d’une prévention primaire de l’obésité. « Après les programmes de prévention du tabagisme à l’école, le travail fait avec les industriels, il serait temps de faire la même chose avec la suralimentation et le surpoids », affirme Steven Kahn (Seattle), qui considère que se concentrer sur la non-apparition d’une obésité serait plus efficace et plus facile que de faire maigrir un patient, « d’autant plus que des recherches métaboliques suggèrent qu’une fois un certain poids atteint, il existe une mémoire de ce poids, vers lequel il y a une forte tendance à remonter, voire plus. Si cette hypothèse était prouvée, cela renforcerait encore davantage la nécessité de mener des politiques de prévention de l’obésité. »

Par exemple, l’étude anglaise AHEAD qui avait soumis des patients en surpoids ou obèses à un programme intensif (prise en charge comportementale, exercice physique, alimentation équilibrée et variée) pour améliorer leur hygiène de vie et pour lutter contre la surcharge pondérale a eu des résultats spectaculaires à un an, notamment sur le taux d’HbA1c, mais par la suite la situation s’est quelque peu détériorée… Néanmoins, à 4 ans, dans cette étude 3 à 8 % des patients ont un taux d’HbA1c< 6,5 %, ce sans utiliser de médicaments, ce qui indique qu’ils ne sont pas diabétiques. Outre la nécessité de programmes d’intervention durable, les orateurs du congrès ont également sur le fait que l’entourage doit être sensibilisé pour retarder au maximum l’instauration du diabète et sa cohorte de complications.

Par ailleurs, les travaux visant à détecter le prédiabète sont légion et les enjeux médico-économiques considérables. Les méthodes de diagnostic du prédiabète diffèrent entre les États-Unis et nombreux pays européens. Aux États-Unis, le dépistage est fondé sur le taux d’HbA1c (valeurs comprises entre 5,6-6,4 %) alors qu’en France la glycémie à jeun (entre 5,6 et 6,9 mmol/l) continue à primer. Jouant l’arbitre, une étude japonaise (Topics) a montré que quelle que soit la méthode employée, la probabilité de progression vers un diabète est similaire. Quoi qu’il en soit, il est indéniable que des efforts restent à faire pour optimiser le dépistage et mieux comprendre les facteurs déclenchant de la maladie.

D’après une conférence de presse organisée par le congrès.

(1) Eckel RH et al. Obesity and type 2 diabetes: what can be unified and what needs to be individualized? Diabetes Care. 2011 Jun;34(6):1424-30. Epub 2011 May 20.

Dr MARTINE DURON-ALIROL

Source : Le Quotidien du Médecin: 9025