« Au sein des lasers vaginaux, le laser CO2 a un effet ablatif (échauffement et nécrose), tandis que le laser Er-Yag a un effet thermique sous épithélial, sans nécrose épithéliale », a rappelé le Pr Xavier Deffieux, gynécologue-obstétricien à l’hôpital Antoine-Béclère à Clamart. On peut donc théoriquement en attendre un remodelage tissulaire et une remise en tension des tissus.
Quel impact au niveau vaginal ?
Une étude récente, menée sur un modèle de brebis ovariectomisées, a toutefois montré que le laser erbium et une procédure sham (procédure simulée) font moins bien que les estrogènes locaux sur l’épaisseur de la muqueuse après 250 jours. Seuls les estrogènes permettent d’améliorer la compliance et l’élasticité tissulaire. Aucun des trois traitements n’a d’impact sur la lamina propria, ni sur la musculeuse.
Certains avaient émis l’hypothèse d’un effet du laser sur le microbiote vaginal. Cependant, une étude, menée chez des femmes avec antécédent de cancer du sein, n'a pas permis de confirmer cette hypohèse.
Le laser erbium n’a pas non plus d’impact significatif sur les paramètres urodynamiques et les données sur la mobilité cervico-uréthrale sont discordantes. « On ne dispose donc pas d’explications physiopathologiques sur l’effet des lasers au niveau vaginal, alors que des résultats positifs ont pu être rapportés dans des études cliniques », a indiqué le Dr Deffieux.
Des bénéfices dans l’hyperactivité vésicale
C’est notamment le cas dans l’hyperactivité vésicale (HAV), trouble rapporté dans le cadre du syndrome génito-urinaire qui touche 30 % des femmes ménopausées.
Un travail monocentrique a souligné les bénéfices du laser Er-Yag (trois séances à un mois d’intervalle) sur les symptômes d’HAV. Dans ce travail, sans groupe placebo, qui avait inclus 150 femmes ménopausées, une amélioration du score OABSS (Overactive bladder symptom score) à 12 mois avait été rapporté dans les trois bras de traitement : laser, fésotérodine (anticholinergique) et mirabégron ( antispasmodique urinaire non anticholinergique).
Un autre essai a inclus 72 femmes ménopausées randomisées pour bénéficier d’un traitement par laser CO2 fractionné, estrogènes locaux ou lubrifiant vaginal. Il a mis en évidence une réduction significative du score ICIQ-UI SF (International consultation on incontinence questionnaire) à trois mois et de la nycturie avec le laser et les estrogènes locaux, sans effet indésirable sévère.
Les études dans l’incontinence urinaire d’effort, plus nombreuses, rapportent une certaine efficacité sur les scores ICIQ, à l’exclusion des formes sévères (pad test > 10 g/24 h). Un essai randomisé, laser erbium vs procédure Sham, a souligné les bénéfices d’une séance de laser, avec 21 % de femmes sèches à trois mois vs 3 % (différence significative). Ces effets positifs pourraient persister dans le temps dans les formes non sévères, mais les résultats sont discordants.
L'importance de l'effet placebo
L’impact de ces nouvelles approches dans le traitement du prolapsus génital a été moins étudié. Un essai clinique randomisé mené sur 30 femmes n’a pas mis en évidence d’effet du laser erbium sur l’anatomie, ni sur les questionnaires de symptômes du prolapsus. « Mais la moitié des femmes se « sentaient mieux », malgré l’absence d’amélioration objective, donnée qui souligne l’importance de l’effet placebo en pelvi-périnéologie », a rappelé le Pr Deffieux.
Le recours à la radiofréquence a quant à lui été très peu évalué, avec un seul essai randomisé canadien ayant comparé une à deux séances de « Viveve », sans groupe contrôle. Après 12 mois de suivi, les auteurs ont rapporté une amélioration des pad-test et des scores d’incontinence, sans différence entre une ou deux séances.
Au total, les mécanismes d’action potentiels du laser et de la radiofréquence ne sont donc pas bien précisés et les données des études sans groupe placebo doivent être interprétées avec prudence. « On attend les résultats d’essais randomisés bien menés avec des critères d’évaluation objectifs », a indiqué le Pr Deffieux, avant de rappeler que pour l’instant toutes les sociétés savantes s’accordent à dire qu’il n’y a pas assez de données pour recommander ces traitements dans l’incontinence urinaire, et encore moins dans le prolapsus génital.
D'après un entretien avec le Pr Xavier Deffieux, gynécologue-obstétricien à l’hôpital Antoine-Béclère à Clamart
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