Pemphigoïde bulleuse, d'abord des corticoïdes par voie locale

Publié le 10/09/2021
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La pemphigoïde bulleuse touche essentiellement les sujets âgés de plus de 70 ans. Il s’agit d’une affection sévère, du fait du terrain fragile, du risque de complications liées aux décollements cutanés (infections, décompensation de tare sous-jacente, grabatisation…) et des effets indésirables des traitements locaux ou généraux. L’arsenal thérapeutique est riche, les dermocorticoïdes à forte activité étant à prescrire en première intention.
Des bulles tendues, parfois par centaines, sont typiques de la maladie

Des bulles tendues, parfois par centaines, sont typiques de la maladie
Crédit photo : DR

La pemphigoïde bulleuse (PB) est la plus fréquente des maladies bulleuses auto-immunes (MBAI). Elle touche essentiellement les sujets âgés de plus de 70 ans. L’association à des maladies neurodégénératives et grabatisantes est fréquente (démence, AVC, maladie de Parkinson). La maladie peut parfois être induite par des médicaments (spironolactone, phénothiazines, gliptines). Elle est due à des auto-anticorps dirigés contre deux protéines de la jonction dermo-épidermique, la BPAG1 (BP230) et la BPAG2 (BP180).

La forme typique se caractérise par un prurit, parfois isolé au début, des lésions eczématiformes ou urticariennes et des bulles tendues en nombre variable (parfois plusieurs centaines), qui laissent place à des érosions puis guérissent sans cicatrice. Les muqueuses sont en général épargnées. La seule anomalie biologique évocatrice est une hyperéosinophilie.

Un suivi avec les anticorps anti-BP180

Il s’agit d’une affection sévère, du fait du terrain fragile, du risque de complications liées aux décollements cutanés (infections, décompensation de tare sous-jacente, grabatisation…) et des effets indésirables des traitements locaux ou généraux.
Le patient doit être adressé au dermatologue, car la confirmation du diagnostic repose sur la réalisation d’une biopsie cutanée pour histologie et immunofluorescence directe. Les anticorps circulants sont détectables par plusieurs techniques (immunofluorescence indirecte et tests ELISA), pas toutes remboursées en ville. Le taux d’anticorps anti-BP180 en ELISA est utile au suivi de la maladie.

La prise en charge peut se faire en ville pour les PB peu graves, mais une hospitalisation en service de dermatologie habitué à la prise en charge des MBAI (centre de référence ou de compétence) est souvent nécessaire pour commencer les soins, notamment en cas de PB étendue.

Au moins deux tubes de clobétasol/ jour

Le traitement de première intention repose sur les dermocorticoïdes de très forte activité (classe IV, propionate de clobétasol) et à forte dose (20 à 40 g/j soit deux à quatre tubes par jour au début), en une application quotidienne sur tout le corps, sauf le visage, y compris sur les bulles et les érosions. Ce traitement a montré une efficacité similaire à la corticothérapie générale avec une meilleure tolérance.

Une fois le contrôle de la maladie obtenu, en un mois en général, les applications de clobétasol s’espacent : tous les deux jours pendant un mois, puis deux fois par semaine pendant un mois, puis une fois par semaine, pour une durée totale de 9 à 12 mois. Des pansements de recouvrement non collants (interfaces, hydrocellulaires) sont possibles en cas d’érosions de grande taille. Les antiseptiques ne sont nécessaires qu’en cas de surinfection cutanée. L’intervention d’une infirmière est préconisée. En effet, la qualité des soins locaux et le respect de l’ordonnance du dermatologue sont indispensables à la réussite du traitement. Le rôle du généraliste ou du gériatre est important pour vérifier l’observance thérapeutique.

Les dermocorticoïdes ont des effets secondaires sur le long terme, notamment l’atrophie cutanée (purpura de Bateman), le diabète, les surinfections cutanées.

En cas de résistance au traitement local, voire en première intention en association aux dermocorticoïdes, un traitement immunosuppresseur (méthotrexate à faible dose, mycophénolate mofétil), la doxycycline ou l’omalizumab sont proposés. Leur tolérance aux doses préconisées est très bonne, sous couvert d’une surveillance régulière.

La PB est prise en charge à 100 % en affection hors liste. Le protocole national de diagnostic et de soins est disponible sur le site de la Haute Autorité de santé.

(1) HAS, protocole de diagnostic et de soins, avril 2020
(2) Association Pemphigus Pemphigoïde France APPF www.pemphigus.asso.fr

Dr Saskia Oro, hôpital Henri-Mondor

Source : Le Quotidien du médecin