Dans les cancers de la prostate, la récidive locale après chirurgie puis radiothérapie adjuvante, ou de rattrapage, est une situation problématique. Avec l'élargissement du recours aux PET-scan, ces situations se rencontrent de plus en plus souvent en pratique clinique. Souvent le résultat d’une chirurgie probablement insuffisante (reliquat tumoral), leur prise en charge n’est pas claire, les données sur les divers traitements de rattrapage étant rares. Quelles options thérapeutiques faut-il privilégier aujourd'hui selon le patient et le type de tumeur ? Deux études présentées au congrès français d’urologie (CFU) viennent éclairer le débat…
Une thérapie originale
« Les HIFU pourraient constituer une alternative intéressante en traitement de rattrapage des récidives localisées post-chirurgie et radiothérapie, en particulier chez les patients à faible risque avant radiothérapie, explique le Pr Sébastien Crouzet (hôpital Édouard Herriot, Lyon). En effet, ce traitement permet chez nombre d'entre eux de retarder l'évolution tumorale qu'elle soit biologique, locale, générale ou métastatique. Cette efficacité est toutefois assortie d'un prix à payer en termes de complications urinaires, fréquentes, surtout lors du traitement de récidives anastomotiques. C'est ce qu'il ressort de l'étude rétrospective de cohorte et de l’essai clinique prospectif de phase IIB, tous deux présentés lors du CFU ».
Une étude lyonnaise rétrospective
Entre juin 2009 et novembre 2018, 22 patients ont été traités à l'hôpital Édouard Herriot par HIFU de rattrapage, en troisième ligne pour récidive locale après chirurgie et radiothérapie (1). Ils ont été stratifiés selon la zone de récidive : anastomotique ou rétro-vésicale. Le critère primaire est la survie sans échec du traitement (TFFS), c’est-à-dire l’absence de cancer dans la zone traitée, de métastases et de traitement hormonal. La survie sans progression biologique (PFS) a aussi été évaluée (la progression correspondant à deux augmentations de PSA ≥ 0,2 ng/ml au-dessus du nadir). Tous les patients avaient eu un PET-scan, une IRM et des biopsies.
Au terme d'un suivi médian de près de trois ans, la TFFS est de 50 % et la PFS a atteint 60 %. Alors que le PSA médian avant HIFU était de 2,21 ng/l, 90 % des patients ont vu leur PSA décroître (PSA nadir médian de 0,185 ng/ml). Par ailleurs, 50 % ont eu un PSA nadir inférieur ou égal à 0,2 ng/ml, ce qui représentait un facteur prédictif significatif de meilleure TFFS (p = 0,003) et PFS (p = 0,037). Enfin, en termes de sécurité, des complications urinaires de grade II-III ont été observées dans 27 % des cas (six patients). Elles ont touché exclusivement des patients porteurs de récidives anastomotiques (p = 0,027).
Un essai prospectif international
Une étude multicentrique franco-norvégienne, prospective de phase IIb, a été menée dans trois centres (Lyon, Bordeaux, Oslo) sur des patients souffrant de récidive unilatérale prétraitée généralement par hémiablation (2). Les patients ont tous eu un PET-scan et des biopsies. Les critères retenus étaient : la survie globale, sans métastases, sans hormonothérapie et sans récidive (biopsies négatives, absence de rattrapage, de métastases ou de décès par cancer prostatique). Au total, 87 patients, de 71 ans d'âge moyen, ont été inclus et traités. Parmi eux, 33 % étaient à haut risque D'Amico. Leur PSA moyen initial était à 5 ng/ml.
Au terme de cinq ans de suivi, la survie globale était de 97 %, la survie sans métastase de 86 %, la survie sans hormonothérapie de 57 % et la survie sans récidive de 47 %. De plus, la survie sans récidive à quatre ans était significativement différente en fonction du risque initial (avant radiothérapie) : elle atteignait 100 % chez les patients à faible risque, 50 % en cas de risque intermédiaire, 38 % dans le groupe à haut risque et 48 % pour les sujets à risque indéterminé. En termes de tolérance, 22 patients ont souffert d'incontinence de grade 2-3 et trois sujets d'ostéite pubienne.
(1) Crouzet S et al. HIFU de rattrapage en 3e ligne pour les récidives locales après chirurgie et radiothérapie, Progrès en Urologie nov 2021;31(13):781-2, abst CO16
(2) Crouzet S et al. HIFU focal de rattrapage pour les récidives d’adénocarcinome prostatique après radiothérapie : résultats à moyens termes, Progrès en Urologie nov 2021;31(13):781, abst CO15
Article précédent
Cancer de la prostate : surveiller l’IRM
Article suivant
« De plus en plus d'hommes veulent participer à la charge contraceptive »
Cancer de la prostate : surveiller l’IRM
Des ultrasons dans le cancer de la prostate
« De plus en plus d'hommes veulent participer à la charge contraceptive »
Facteurs de risque de lymphocèle
Réseau ville hôpital en onco-urologie
Endométriose : quel rôle pour l’urologue ?
Des tumeurs moins agressives en cas d'obésité
Place aux urgences !
Traitements hormonaux : quelle toxicité rénale ?
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?