Que sait-on de l’effet de l’hypercholestérolémie chez les plus âgés sans antécédents cardiovasculaires ? « Après l’âge de 75 ans, les études montrent qu’elle reste associée à un risque cardiovasculaire accru, avec cependant une pente moins marquée que chez les plus jeunes », a précisé le Pr Victor Aboyans. Mais si l’on regarde la mortalité totale, les études donnent des résultats discordants, certaines concluant même à un effet protecteur de l’hypercholestérolémie, possible traduction d’une association selon une courbe en J.
Traiter l’hypercholestérolémie ?
La question se pose concernant le traitement des sujets âgés ayant une hypercholestérolémie. En effet, l’administration de statines en prévention primaire est associée à une réduction de la mortalité totale et cardiovasculaire de 20 à 25 % dans les études observationnelles, telles que celle de la cohorte des vétérans américains. Des données comparables ont été observées dans l’essai rétrospectif SCOPE 75 avec score de propension, menée chez des personnes de plus de 75 ans : baisse de 41 % des événements cardiovasculaires majeurs et de 44 % de la mortalité totale à cinq ans. Mais une étude de cohorte, réalisée par la sécurité sociale française, donne des résultats plus mitigés : les bénéfices du traitement en prévention primaire dépendent de la présence d’autres facteurs de risque modifiables. Les recommandations sont peu contributives, en préconisant d’évaluer le risque au cas par cas, ce qui n’est pas facile en pratique. Les effets secondaires musculosquelettiques et gastro-intestinaux sont plus fréquents chez les sujets âgés. Ils doivent être pris en compte, à côté de l’état général du patient, dans la décision de prescrire ou non une statine en prévention primaire. Trois études cliniques sont en cours (STAREE, PREVENTABLE, SITE), qui devraient apporter des réponses plus précises à cette question.
Gare à l’effet blouse blanche chez les hypertendus
Pour l’hypertension artérielle (HTA), toute la difficulté est de prévenir les complications cardiovasculaires sans nuire. La prévalence de l’HTA augmente avec l’âge et concerne 75 % des plus de 75 ans. Les études cliniques ont démontré les bénéfices du traitement sur la morbimortalité cardiovasculaire et totale. « Avant de traiter, il est essentiel de confirmer la réalité de l’HTA par une mesure ambulatoire de la pression artérielle(MAPA ou automesure), car l’HTA « blouse blanche » est particulièrement fréquente dans la population âgée (25 à 30 % des cas) », a insisté le Dr Michel Chuzeville. Mais quelle est la valeur cible du traitement ? Dans l’étude HYVET, l’objectif était une pression artérielle systolique (PAS) de moins de 150 mm Hg. Puis, ce chiffre avait été revu à la baisse suite aux résultats de l’étude SPRINT, qui avait souligné les bénéfices d’une prise en charge plus intensive, avec cependant une méthode de mesure tendant à retrouver des valeurs tensionnelles plus basses. C’est pour cette raison que les recommandations de la Société européenne de cardiologie ont en 2018 proposé une valeur cible de PAS comprise entre 130 et 139 mm Hg, sous réserve d’une surveillance étroite de la tolérance. Dans l’essai SPRINT, les patients de plus de 75 ans traités intensivement avaient présenté davantage de chutes nécessitant un passage aux urgences ou une hospitalisation, d’hyponatrémie et d’événements rénaux. Dans la population âgée fragile, le traitement antihypertenseur apparaît également bénéfique dans les études observationnelles. Les praticiens peuvent s’aider de l’algorithme de Benetos publié en 2019 (1), qui propose une stratégie thérapeutique en fonction de l’état général du patient. Une attention particulière doit être apportée au risque d’hypotension orthostatique et d’hypotension postprandiale, cette dernière touchant plus particulièrement les personnes ayant un diabète ou une maladie de Parkinson.
D’après les communications du Pr Victor Aboyans (Limoges), Dr Michel Chuzeville (Lyon) et Pr Olivier Hanon (Paris).
(1) Benetos A et al. Circ Res. 2019 Mar 29;124(7):1045-60
Article précédent
Le cœur, première victime de la détérioration de l’environnement
Article suivant
Davantage d’infarctus féminins
Le cœur, première victime de la détérioration de l’environnement
Risque cardiovasculaire, hypertension : prendre en charge les plus âgés
Davantage d’infarctus féminins
Sport et tabac : un nid de fake news
Fibrillation atriale : contrôler le rythme
Cardio-oncologie : suivre à long terme
Reprise du travail après un syndrome coronaire aigu
Maladie artérielle périphérique
Drogues en soins intensifs
Les SMS des JESFC 2023
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?