Dès la quarantaine

Une consultation « à valeur ajoutée »

Publié le 11/10/2011
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Crédit photo : BSIP

LE GYNÉCOLOGUE connaît bien ses patientes, souvent suivies pour leur contraception, puis pour leurs grossesses etc.… Et nul besoin de matériels sophistiqués : une toise et un mètre ruban de couturière font l’affaire.

Que chercher ? Que prévenir ?

Les maladies cardiovasculaires sont la première cause de décès chez la femme. Pour Collins P. (EurHeart JC 2 007), 57 % des femmes décèdent d’atteinte coronarienne ou d’infarctus cérébral ou d’une autre cause cardiovasculaire alors que 16 % vont mourir d’un cancer. Le cancer du sein est donc la première cause de mortalité par cancer chez la femme et non la première cause de mortalité en général ! Le cancer du poumon voit son incidence augmenter au fil des années.

Avant 45 ans, la prise de contraception œstroprogestative (O/P), le tabac, le surpoids, l’obésité abdominale, le stress, la sédentarité, sont des facteurs de risque cardiovasculaire (RCV).

Après 45 ans, la découverte d’un syndrome métabolique grâce à ses signes annonciateurs : HTA systolique, altération du bilan lipidique, (augmentation des triglycérides et du LDL cholestérol, diminution du HDL cholestérol), diabète de type 2, consommation excessive de sel, d’alcool, sédentarité, doivent alerter le praticien. La possibilité de survenue d’un infarctus du myocarde augmente en fonction de l’association des facteurs de risque entre eux.

Un interrogatoire minutieux

La Charte européenne de la Santé (2005-2006) permet de faire prendre conscience des éléments entrant en ligne de compte dans la prévention du risque chez la femme : arrêt du tabac, activité physique régulière (30 minutes 5 fois par semaine), habitudes alimentaires saines, absence de surpoids, glycémie normale, PA inférieure à 140/90, cholestérolémie normale. L’interrogatoire de la patiente centré sur ces antécédents personnels et familiaux, son examen physique et la prescription d’un bilan biologique simple sont suffisants. La recherche, entre autres, d’antécédents obstétricaux, comme une HTA gravidique, un diabète gestationnel, une pré-éclampsie, la recherche d’événements considérés comme mineurs par la patiente (« petite » fibrillation auriculaire !), le bilan des traitements en cours sont souvent édifiants.

Dès lors, on pourra s’attarder aux recommandations et/ou à la prise en charge de cette femme.

Arrêt du tabac, consommation modérée d’alcool (1 à 2 verres contre 3 à 4 chez l’homme) et pratique d’une activité physique régulière et modérée. Le contrôle du poids est l’objectif majeur de la prévention CV, l’excès de poids est un facteur de risque CV en soit dès 40 ans.

La mesure du tour de taille, pratiquée facilement en cabinet de consultation a tout son intérêt, un tour de taille ≥80 cm est facteur de risque. Le syndrome métabolique est l’apanage de cette tranche d’âge. Comme dans un iceberg, certains éléments sont « hors de l’eau » ! Obésité viscérale, HTA, hyperglycémie, dyslipidémie, mais d’autres sont « immergés » et doivent donc être recherchés : modification de l’hémostase, atteinte de l’endothélium vasculaire, syndrome inflammatoire.

Du sport contre le cancer

La prévention des cancers gynécologiques, de l’ostéoporose et du déclin cognitif passe aussi par une nutrition équilibrée et la pratique d’une activité physique.

Sur la base de données récentes aux États-Unis et au Royaume-Uni (WCRF et AICR), on estime qu’un cancer sur cinq pourrait être évité grâce à la prévention du surpoids et de l’obésité. L’AFSSAPS (2 005) et d’autres agences comme l’Américain Institut for Cancer Research estiment que pour réduire le risque de cancer lié à la surcharge pondérale, il est recommandé de maintenir un poids normal : 18,5≤IMC< 25. Ici encore le rôle de l’alimentation et de l’activité physique est primordial.

L’étude E3N, en France, a montré le rôle d’une activité physique régulière même modérée sur la diminution du RR de survenue d’un cancer du sein. Par exemple, les « joggeuses » régulières voient leur risque diminuer de 23 %. Cette étude a montré aussi le rôle de prévention tertiaire de la pratique d’un sport chez des femmes atteintes et traités pour cancer du sein (moins de récidives).

Le rôle de l’alimentation et de l’activité physique dans la prévention de l’ostéoporose est bien connu, encore faut-il que les patientes en soient conscientes. Outre la supplémentation en calcium, le plus souvent couverte par l’alimentation (produits laitiers, eaux minérales, légumes etc.…), il faut insister sur le rôle des protides et surtout de la vitamine D (poisson gras…).

Toutes ces recommandations, si elles sont suivies, vont agir de concert sur la prévention du déclin cognitif. Les facteurs nutritionnels interagissent dans la responsabilité de survenue de ce dernier. Outre des facteurs génétiques connus (phénotype ApoE), l’alcool, les carences vitaminiques B9 en particulier, vont accélérer ce déclin. Par contre, les vitamines B9 mais aussi B6 et B12, le poisson grâce à ses oméga 3, les fruits et légumes, la consommation modérée de vin semblerait le ralentir.

Le gynécologue a donc un rôle charnière dans cette prévention. Souvent consulté une ou deux fois par an, il devrait profiter de cette occasion pour offrir cette possibilité à sa patiente. Mais ce genre de consultation est chronophage… Alors Messieurs les politiques : pourquoi pas une consultation « à valeur ajoutée » ? Le bénéfice pour la population en est certain !

 Dr LYDIA MARIÉ-SCEMAMA

Source : Le Quotidien du Médecin: 9022