Salpingites aiguës

Les IST sont-elles vraiment sur le déclin ?

Publié le 11/10/2011
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SI L’ON ÉVOQUE la possibilité d’une IST, le diagnostic clinique est souvent aisé (herpès, condylome, vaginite à Trichomonas vaginalis…), mais il est souvent nécessaire de le confirmer par des examens complémentaires afin d’éviter les erreurs, de dépister les associations possibles (VIH, hépatite) et d’agir de façon efficace par un traitement ciblé. Bien sûr, la recherche des agents pathogènes par amplification génique (PCR) ne permet plus la pratique systématique d’antibiogramme ! En cas de vaginite ou de cervicite, l’intérêt des prélèvements génitaux, voire même des autoprélèvements vestibulaires n’est pas à démontrer. En revanche, chez la femme, contrairement à l’homme, la recherche de chlamydiae dans le premier jet urinaire est inutile. Les sérologies n’ont pas toujours l’intérêt que l’on veut leur attribuer. Elles sont inutiles en cas de suspicion d’infection à gonocoques ou à mycoplasmes et à interpréter en fonction du contexte en cas d’herpès ou de chlamydiae. Elles sont par contre indispensables si l’on soupçonne une syphilis, un VIH, une hépatite B ou C. Il faut néanmoins ne pas oublier les délais de séroconversion : de 3 à 6 semaines pour le VIH, de 2 à 6 semaines voire plus pour l’herpès, de 3 à 6 semaines pour la syphilis, et de 2 à 4 semaines pour les Chlamydiae. En cas d’herpès, la sérologie est un très mauvais test diagnostique. Seule l’identification virale a un intérêt. Le seul cas où on peut l’employer est chez une femme enceinte dont le partenaire a un herpès, et ce pour décider du mode d’accouchement, voie basse ou césarienne.

Chlamydia, syphilis : intérêt et limites des sérologies

Pour les infections à Chlamydiae, une positivité de la sérologie ne permet pas de savoir s’il s’agit d’une maladie ancienne et guérie ou d’une infection évolutive. En cas de dépistage, la confirmation sera faite par un prélèvement cervical chez les femmes symptomatiques ou par autoprélèvement vestibulaire si elles sont asymptomatiques.

La sérologie n’est pas indiquée en cas d’infection basse. Elle ne l’est qu’en cas de suspicion d’infection haute. Dans ce cas, seules les IgG seront recherchés, les IgA et IgM sont inutiles. Les marqueurs d’infection haute seront l’association d’IgG positives et d’une CRP élevée comprise entre 1 et 10 mg. Les sérologies VDRL et TPHA se positivent de 3 semaines à 3 mois après la contamination. Le VDRL est le test de suivi le plus efficace. En cas de grossesse, la valeur prédictive positive de l’association VDRL + TPHA ne dépasse pas 20 %, il est alors recommandé d’associer un test Elisa ou un test Western Blot qui, s’il est positif, confirme l’existence d’une atteinte syphilitique.

Se méfier des infections hautes, surtout chez les jeunes femmes

Le Dr J. M. Bohbot a rappelé que, en cas de lésion érosive anogénitale, il faut pratiquer une culture HSV sur lésion, les tests VDRL et TPHA, une sérologie VIH et une sérologie VHC et renouveler les sérologies 2 ou 3 semaines plus tard. Il faut toujours penser aux localisations extragénitales et ne pas oublier les partenaires. Pour Pierre Panel, les IST hautes ne sont pas en diminution, contrairement à ce que l’on pense.

En vingt ans, le chiffre de grossesses extra-utérines a été multiplié par 2 à 4 ! En fait, les deux tiers des infections génitales hautes (IGH) passent inaperçus, ce qui est lourd de conséquences pour la fertilité future de ces jeunes filles ou jeunes femmes. Ces infections se produisent par contamination ascendante, elles sont souvent polymicrobiennes, parfois déclenchées par une manœuvre endo-utérine ou la présence d’un DIU. Elles peuvent être symptomatiques et, dans ce cas, c’est la douleur qui est le maître symptôme suivi de loin par d’autres signes : leucorrhée, saignement, fièvre› 38, VS élevée, hyperleucocytose. Mais il s’agit souvent de la part émergée de l’iceberg car elles sont malheureusement souvent asymptomatiques.

En cas de stérilité tubaire, la biopsie des trompes retrouve dans 70 à 80 % des cas une origine infectieuse, les deux tiers des salpingites responsables de stérilité tubaire passent en effet inaperçues. Les adolescentes sexuellement actives ont un risque multiplié par 7 à 10 de développer une infection génitale haute par rapport à une femme de 20 à 25 ans. Mais les séquelles tubaires sont inversement corrélées à l’âge après une IGH : 9 % d’infertilité si< 25 ans/19 % si› 25 ans. On assiste malheureusement à l’émergence d’une résistance aux antibiotiques classiques, ce qui fait évoluer fréquemment les schémas de traitements conseillés.

Renforcer le dépistage

Actuellement, on assiste à une recrudescence des infections génitales hautes liées au gonocoque (x 4) surtout chez les hommes et chez les femmes de 16 à 30 ans.

L’organisation, comme dans les pays nordiques, d’un dépistage systématique de C. Trachomatis, voire du gonocoque ou de Mycoplasma génitalium pourrait être une action à mener dans l’avenir. En France, la loi Calmat (1 990) préconisait un dépistage des Chlamydiae au moment de la délivrance d’une contraception. Même si des tests sérologiques sont pratiqués en début de bilan d’infertilité ou avant les premières prises en charge de PMA, il ne faut pas oublier de les renouveler pour éviter les contaminations d’embryons.

Quand faut-il faire une cœlioscopie en cas de suspicion de salpingite ?

Le Pr. P. Madelenat a rappelé que dans les années 1980, le recours à la cœlioscopie diagnostique et parfois de contrôle après traitement était très fréquent. Progressivement, il semble que la pratique de cet examen ait diminué de façon importante. Alors quand faut-il y recourir ? Peut-être n’en fait-on plus assez ?

Pour lui, l’arbre décisionnel de Westrom garde toute sa valeur

Le bilan initial biologique associera le prélèvement bactériologique des voies génitales basses (vagin, urètre, endomètre, endocol) ou la NFS, VS, CRP, sérologie Chlamydiae et ce en fonction du contexte clinique : âge, parité, récidive, échec thérapeutique. Cette cœlioscopie pourra permettre le diagnostic clinique, la pratique de prélèvements bactériologiques ciblés (liquide péritonéal, trompe, endocol, adhérences…). La cœlioscopie de bilan, si elle est pratiquée, ne doit pas se faire trop vite. Il faut savoir attendre six mois, voire un an. Elle est bien sûr, réservée le plus souvent aux formes sévères et s’il y a désir de grossesse. Elle pourrait alors permettre la pratique d’un acte chirurgical après en avoir informé la patiente (salpingectomie surtout si le recours à la procréation médicale assistée est envisagé).

› Dr LYDIA MARIÉ-SCEMAMA


Source : Le Quotidien du Médecin: 9022