« Aujourd’hui, on estime qu’entre 1 500 à 2 000 patientes, chaque année, en France, sont concernées par une chirurgie complexe de l’endométriose, c’est-à-dire associant des actes de chirurgie gynécologique, digestive et/ou urologique. Cette chirurgie a vocation, à terme, à être assurée dans des centres experts de niveau 3. Ces centres seront labellisés dans chaque région par chaque ARS, explique le Pr Pierre Collinet, secrétaire général du Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF), en précisant que cette organisation a été décidée dans le cadre de la stratégie nationale de lutte contre l’endométriose, lancée en février 2022 par Emmanuel Macron. L’axe 2 de cette stratégie vise à améliorer la qualité des soins, en s’appuyant sur une hiérarchisation des prises en charge avec des centres de niveaux 1, 2 et 3. »
Nous avons proposé de retenir un seuil de 20 chirurgies complexes par an et par centre
Pr Pierre Collinet
Les centres experts de niveau 3 n’ont pas pour objectif d’assurer un maillage du territoire, délivrant une prise en charge de proximité. « Cela devrait être assuré par les centres de niveaux 1 et 2. Ceux de niveau 3 ont vocation à s’occuper d’un faible volume de patientes, celles qui présentent des cas complexes », souligne le Pr Collinet. La Direction générale de l’offre de soins (DGOS) a sollicité deux sociétés savantes : le CNGOF et la Société de chirurgie gynécologique et pelvienne (SCGP). Un groupe d’experts, parmi lesquels se trouvait le Pr Collinet, a travaillé sur un certain nombre de critères quantitatifs. « Pour ce travail, nous nous sommes appuyés sur une revue de la littérature et avons constaté que, comme en cancérologie, la qualité des soins est corrélée au volume d’activité. Nous avons retenu le seuil de 20 chirurgies complexes par an et par centre. Au-delà de ce seuil, les résultats, en termes de morbidité péri-opératoire, sont meilleurs par rapport à ce qui peut être fait dans les centres ayant un faible niveau d’activité », détaille le Pr Collinet.
Une labellisation non obligatoire
« Il convient de préciser qu’il ne s’agit pas d’une autorisation, comme cela peut exister en cancérologie, mais d’une labellisation. Un centre qui n’aura pas été labellisé n’aura pas interdiction de faire cette chirurgie. Mais il est bien évident que l’objectif est d’améliorer la qualité des prises en charge, et donc de permettre aux patientes présentant une endométriose complexe d’accéder à des centres labellisés », ajoute-t-il.
Chaque centre devrait être en mesure de proposer une offre d’imagerie spécifique, avec un radiologue référent. « Deux chirurgiens gynécologues devront être désignés pour assurer cette chirurgie complexe, un des deux devant assurer au minimum dix chirurgies dans l’année. Par ailleurs, cette chirurgie étant multidisciplinaire, chaque centre devra avoir défini un chirurgien urologue référent et un chirurgien digestif devant faire, chacun, au minimum cinq actes par an », indique Pr Collinet.
Des critères qualitatifs pourraient aussi être exigés. « Chaque chirurgie devrait être décidée à l’issue d’une RCP dans le cadre d’une filière de soins. Nous allons aussi proposer un suivi prospectif de cette prise en charge, de ses complications, avec un indice de performance et de qualité des soins. Nous voulons également mettre en place une relecture radiologique aléatoire des endométrioses complexes, faite par un comité de suivi », indique le Pr Collinet.
Ce texte des experts a été remis à la DGOS et est actuellement diffusé au sein des différentes filières régionales. Il ne présente à ce jour aucun caractère réglementaire et relate une réflexion commune au sein du CNGOF et de la SCGP ; chaque ARS ayant le libre choix de suivre, ou non, ces propositions, en fonction de l’offre de soins et des contraintes locales propres à chaque région.
Entretien avec le Pr Pierre Collinet, pour le CNGOF et le groupe d’experts associant les Prs Nicolas Bourdel, Pierre Collinet, François Golfier, Horace Roman, Chrystèle Rubod et le Dr Benjamin Merlot
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