Les recommandations en matière de test de provocation orale (TPO) aux aliments datent un peu (2004 pour l’Académie européenne d’allergologie et d’immunologie clinique et 2012 pour le consensus américano-européen Practall). Les pratiques en Europe varient selon les pays et les centres. « Il n’y a pas de protocoles standardisés, pas de comparaisons disponibles entre TPO en ouvert et en double aveugle, pas de TPO standardisés adaptés aux différents âges : il reste donc beaucoup à faire », a souligné le Pr Davide Caimmi (Montpellier).
Une enquête, menée en 2019 dans quatre pays européens, avait mis en évidence des indications partagées des TPO (pour le diagnostic et pour apprécier la tolérance aux aliments en éviction), mais aussi des divergences, avec notamment moins de tests visant à recherches des doses réactogènes en Italie et en Grande-Bretagne qu’en France.
Une décision partagée
« Poser une indication de TPO doit se faire sur la base d’une décision partagée entre le praticien, les parents et si possible l’enfant », a insisté le Pr Antoine Deschildre (Lille), rappelant que ce test est pourvoyeur de stress. Il importe d’en préciser les conditions de réalisation (expérience, environnement, sécurité) et d’en définir et préciser le ou les objectifs.
Une des grandes indications d’un TPO est de clarifier le diagnostic. En 2006, la Société française d’allergologie avait proposé un arbre décisionnel fondé sur des seuils qui variaient avec l’âge. Mais les seuils ont leurs propres limites, notamment parce qu’ils dépendent des populations dans lesquelles ils ont été établis. De plus, en pratique, les résultats se trouvent souvent dans la « zone grise » et il apparait ainsi essentiel de prendre en compte l’histoire clinique du patient. Le recours à de nouveaux outils issus des progrès de l’allergologie moléculaire a permis de réelles avancées, en particulier pour définir les allergies à l’œuf et au lait.
Aujourd’hui, il est ainsi essentiel d’intégrer l’ensemble des données (histoire clinique, tests allergologiques, symptômes, type d’aliment, comorbidités et cofacteurs comme le sport) pour estimer la probabilité d’une authentique allergie alimentaire et poser l’indication d’un TPO. À l’avenir, d’autres outils, comme le test d’activation des basophiles, dont l’utilisation est encore du domaine de la recherche, devraient encore affiner les indications du TPO dans le cadre d’une médecine personnalisée.
Tenir compte de l’histoire clinique
Autre grande indication des TPO : la confirmation de la guérison et la possibilité d’ouvrir le régime alimentaire. Dans ce cadre, aussi, les recommandations proposent des valeurs seuils qui, elles aussi, doivent être discutées en fonction de l’histoire clinique et des résultats des tests, les pricks-test étant plus informatifs que le dosage des Ig E. Ouvrir le régime aux formes cuites de l’aliment en cause dans la réaction allergique, autoriser la consommation certains autres fruits à coque permettent déjà d’améliorer la qualité de vie de l’enfant et de sa famille.
Le TPO peut aussi être indiqué pour définir le seuil réactogène ou une dose tolérée. Il est ainsi indiqué pour initier une immunothérapie et vérifier ses bénéfices après 9 à 12 mois.
Il doit être également plus largement réalisé en cas de dermatite atopique, afin d’éviter de s’engager dans un régime restrictif abusif (un quart des enfants ont actuellement un régime d’éviction sur la base des seules Ig E). Il a également sa place chez le nourrisson, dans des indications limitées et dans un environnement ayant une expertise en pédiatrie.
Exergue : Ouvrir le régime aux formes cuites de l’aliment en cause, autoriser la consommation certains autres fruits à coque, permet déjà d’améliorer la qualité de vie de l’enfant et de sa famille
Communications des Prs Davide Caimmi, Montpellier, et Antoine Deschildre, Lille
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