Que ce soit dans le domaine du sommeil, du diabète, de la dépression ou de l’asthme, coexistent aujourd’hui une myriade d’objets connectés dont certains sont validés cliniquement, d’autres non — sans que la distinction ne soit toujours évidente. La plupart font appel à un smartphone, ce qui donne lieu à un mésusage fréquent : le partage de l’application entre plusieurs membres du foyer, mélangeant les données des uns et des autres. Les outils de mesure peuvent aussi présenter une grande variabilité interindividuelle (nombre de pas, par exemple). Se pose enfin la question de la sécurité des données et de l’interopérabilité des objets connectés avec les logiciels métiers, un défi de taille.
« Les objets connectés permettent d’obtenir des données complètes et objectives sur la situation du patient, au quotidien, sans l’effet blouse blanche. Mais l’utilisateur est souvent laissé seul face à ces données. Nous avons besoin de faire intervenir des médecins dès les premières étapes de la conception de ces solutions », martèle Adrien Hugon, ingénieur à Paris 6.
De l’humain au chatbot
L’intelligence artificielle (IA) a-t-elle une pertinence en médecine générale ? Pas évident, selon les spécialistes du secteur. Hector Falcoff du projet Prévention effective personnalisée et e-santé (Peps), dont le Collège de médecine générale est partenaire, le reconnaît : « L’outil d’aide à la décision que nous développons dans le domaine cardiovasculaire ne fera probablement pas gagner de temps au médecin. Il pourra être utile aux infirmiers Asalée ou lors de consultations longues. » Un domaine d’application plus évident et assez abouti : l’IA peut synthétiser des documents très différents dans un format clair. Utile quand un patient a consulté de multiples spécialistes ou établissements.
Les applications les plus intéressantes s’adressent aux patients. Fanny Bernard (Montpellier) a présenté le robot de discussion (chatbot) Vik, qui se décline en trois domaines : le cancer du sein, la dépression et la migraine. Le patient écrit sur Messenger ou via l’application une question à Vik, qui lui répond. Il ne remplace pas le médecin mais fournit des informations sur le traitement, la qualité de vie, la sexualité, les professionnels à consulter… Le chatbot peut aussi prendre l’initiative du contact pour faire un rappel, envoyer des questionnaires, etc.
Une enquête menée sur Vik sein (132 000 messages échangés en un an, 90 % des femmes, âge moyen 48 ans) a montré une augmentation de 20 % de l’observance grâce au chatbot.
Dans Vik dépression, 95 % des patients considèrent le chatbot comme un soutien et une source d’informations fiables, et une réduction des symptômes de la dépression (PHQ-9) a été mise en évidence. Les patients montrent aussi des signes d’attachement émotionnel au robot, échangeant avec lui des « bonjour » et « bonsoirs ». Humain somme toute.
Session « Aides à la décision, outils connectés, intelligence artificielle », « Internet pour le meilleur et pour le pire »
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