Le cancer, avec 157 400 décès en 2018, reste la première cause de mortalité prématurée devant les maladies cardiovasculaires. Or, sur les 382 000 nouveaux cas de cancers estimés en 2018, (dont 204 600 chez les hommes), 40 % seraient évitables avec des mesures de prévention.
Trois principaux facteurs de risque sont liés au mode de vie. Le tabac arrive en tête avec 19,8 % des cancers attribuables, devant l’alcool avec 8 % et l’alimentation déséquilibrée, puis le surpoids et l’obésité avec 5,4 %.
De trop nombreux patients ont une mauvaise perception de ces différents facteurs de risque.
Le médecin généraliste est en première ligne pour combattre les idées reçues, notamment sur le tabac, premier facteur de risque évitable, responsable de plus de 80 % des cancers du poumon, mais aussi impliqué dans 17 localisations différentes de cancer (vessie, colon, bouche, sein…). « Parmi les idées à combattre, on entend souvent dire que l’air des villes est aussi mauvais que le tabac. C’est faux, a expliqué Antoine Deutsch (INCa). Le tabac est responsable de près de 20 % des décès par cancers alors que la pollution seulement de 1 %. »
Tabagisme : le risque dépend surtout de la durée
Autre idée reçue : le fumeur occasionnel ne présente pas de risque. Faux là aussi, le risque existe même pour les petits fumeurs. « Quelles que soient la durée du tabagisme et la quantité de cigarettes consommées quotidiennement, le tabac présente des risques pour la santé », insiste le spécialiste.
Plus on fume longtemps, même peu, plus les risques de développer un cancer augmentent. « Ainsi, passer d’une cigarette à trois par jour multiplie le risque de cancer du poumon par trois alors que tripler la durée du tabagisme multiplie le risque de cancer du poumon par 100. »
Enfin, certains patients pensent que le vapotage est autant, voire plus mauvais que le tabac : c’est faux. La fumée de cigarette contient plus de 70 cancérigènes alors que la cigarette électronique n’a aucun effet cancérigène avéré. Et elle peut être un outil pour arrêter de fumer.
Alcool : aucun effet protecteur, même à faible dose
Le risque de l’alcool est largement sous-estimé dans la population française. L’alcool augmente le risque de développer plusieurs cancers (sein, côlon/rectum, bouche, pharynx…) Même à faible dose, la consommation d’alcool augmente le risque de développer un problème de santé et aucun seuil n’a démontré un effet protecteur, chez l’homme comme chez la femme. Ainsi, la recommandation de « boire au maximum deux verres par jour et pas tous les jours » est un repère offrant un risque moindre, mais n’est, en aucune façon, un repère au-dessous duquel le risque de cancer est nul !
Aliments miracles et bio : des niveaux de preuve insuffisants
« Établir le lien entre nutrition et cancer est très complexe et nécessite différents types d’études, a souligné d’emblée Mélanie Deschasaux (réseau Nacre). Or la majorité des études en nutrition sont des études observationnelles. » Les messages évoquant des risques − ou au contraire des bénéfices − anti-cancers de certains aliments, se multiplient et se contredisent.
C’est ainsi que l’INCa a réalisé en 2015 un rapport identifiant les facteurs nutritionnels protecteurs ou de risque, dont l’effet sur le cancer est suffisamment prouvé. Les recommandations de prévention sont aujourd’hui connues : limiter les aliments riches en sucre et en graisses saturées, consommer plus de fibres alimentaires, avoir une alimentation riche en fruits et légumes et éviter l’excès de viandes rouges (moins de 500 g par semaine) et de charcuteries (moins de 150 g par semaine), car associé à une augmentation du risque de cancer colorectal.
Il faut par ailleurs rappeler que la consommation de compléments alimentaires, qui ne cesse d’augmenter, peut exposer à des risques et n’est pas recommandée.
« Les besoins nutritionnels sont satisfaits par une alimentation équilibrée et diversifiée sans recourir aux compléments alimentaires. Il est conseillé également de recourir aux produits faits maison et d’éviter les aliments ultra-transformés qui exposent au surpoids, à l’obésité et à certains cancers », insiste la spécialiste. Enfin, qu’en est-il de la mode du bio ? Certaines études rapportent une association entre consommation régulière d’aliments issus de l’agriculture biologique et diminution du risque de cancer. Cependant, les preuves ne sont pas encore suffisantes et doivent être confirmées par d’autres recherches.
Tables rondes co-organisées par l’INCa : « Cancer : polémiques et idées reçues » et « Environnement, facteurs de risque de cancer : quelle place pour le médecin généraliste ? »
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