Depuis 2009, de nouveaux éléments dans la littérature ont motivé l’actualisation des recommandations de la HAS, qui a été publiée en février 2024. Les indications (lire encadré), le suivi de certaines complications et la conduite à tenir en cas de reprise de poids y sont revues.
La liste des comorbidités précisée
« L’examen approfondi de la littérature n’a pas permis de modifier les critères d’IMC pour accéder à la chirurgie bariatrique. C’est donc toujours un IMC supérieur ou égal à 40 sans comorbidités associées, ou un IMC de 35 à 40 mais avec des comorbidités : leur liste a néanmoins été précisée depuis le document de 2009 », explique la Pr Judith Aron-Wisnewsky (Paris). Il s’agit : du diabète de type 2, de l’hypertension artérielle traitée, d’une hypertriglycéridémie > 5 g/l (hors éthylisme et DT2 déséquilibré, confirmée à deux reprises et résistante à la prise en charge habituelle), de la présence d’une stéatohépatite non alcoolique ou d’une fibrose hépatique quel que soit son stade, d’un syndrome d’apnées hypopnées obstructives du sommeil (SAHOS) avec un index d’apnée-hypopnée (IAH) ≥ 15/h, d’un asthme sévère en lien avec l’obésité après avis du pneumologue, d’une maladie rénale chronique après avis du néphrologue, d’un syndrome des ovaires polykystiques chez une femme en âge de procréer et/ou de problèmes de fertilité avec l’engagement dans une assistance médicale à la procréation (sur proposition de l’équipe dédiée), d’une incontinence urinaire invalidante résistante à un traitement médicamenteux et après avis d’un gynécologue ou d’un urologue, d’une maladie articulaire invalidante (gonarthrose, coxarthrose, lombalgie invalidante chronique), d’une hypertension intracrânienne et, enfin, de la présence d’une hernie ombilicale ou d’une éventration symptomatique complexe.
En cas d’IMC compris entre 30 et 35, seul le patient avec un DT2 et des objectifs glycémiques non atteints, peut, parfois, se voir proposer une chirurgie métabolique, après accord du diabétologue.
L’accent a été mis sur le risque de transfert d’addiction, avec celui de récidive ou d’apparition de novo d’une addiction à l’alcool, aux médicaments de type opioïdes et autres substances illicites. « Il est donc important, au cours du suivi, d’aller les rechercher, notamment au-delà de deux ans après l’intervention, et d’adresser si besoin le patient à un addictologue », insiste la Pr Judith Aron-Wisnewsky (La Pitié-Salpêtrière, AP-HP), qui a participé à l’élaboration de ces recommandations.
Le suivi doit également prendre en compte le risque osseux (en particulier après bypass gastrique en Y de Roux ou RYGB), avec la nécessité d’ostéodensitométries régulières.
Une fibroscopie gastrique est également recommandée, cinq et dix ans après une sleeve, du fait de la prévalence élevée du RGO, qui n’est pas toujours symptomatique.
Un seuil à 20 % de reprise
« La reprise de 10 % du poids perdu est considérée comme physiologique. Si elle atteint 20 %, on sait maintenant que cela est associé à une récidive des comorbidités présentes avant la chirurgie, ainsi qu’à une altération de la qualité de vie, explique la spécialiste. Or plus on s’éloigne de la date opératoire, plus le nombre de personnes qui reprennent du poids est important, et plus cette reprise est importante, ce qui justifie un suivi à vie pour les repérer précocement et réagir vite. »
Il faut réagir vite au retour des kilos
Pr Judith Aron-Wisnewsky
Le suivi comprend une évaluation du mode de vie et une prise en charge nutritionnelle, la recherche d’une récidive d’un trouble du comportement alimentaire, d’une dépression, la réévaluation du niveau d’activité physique, etc.
S’il y reprise de poids importante, on pourra proposer soit un traitement médicamenteux de l’obésité, soit une conversion chirurgicale différente de la précédente, mais dont on sait qu’elle sera plus morbide et moins efficace sur la perte de poids qu’une primo-intervention.
Entretien avec la Pr Judith Aron-Wisnewsky (La Pitié-Salpêtrière, AP-HP)
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