À l’issue d'une nouvelle réunion de son comité d'experts dédié à l'épidémie de Zika, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a affirmé, par la voix de sa directrice générale Margaret Chan, qu'il y avait désormais « un avis consensuel autour du risque de malformation neurologique chez les enfants nés de femmes infectées par le virus Zika lors de la grossesse. Nous n'avons plus besoin de preuve définitive pour agir », a-t-elle précisé, confirmant les conclusions du comité d'experts à l'issue de leur réunion du 8 mars dernier. Une étude de l'Institut Pasteur réalisée à partir des cas observés en Polynésie française en 2013 et 2014, a récemment confirmé le risque de microcéphale (1 fœtus exposé sur 100).
Le Brésil a enregistré 907 cas de microcéphalies, et 198 décès associés à cette malformation, depuis le début de l'épidémie de Zika en octobre dernier, selon des chiffres officiels publiés mardi par les autorités sanitaires brésiliennes. En janvier dernier le Brésil comptait 3 530 cas de microcéphalies suspectes. Plus de 2 300 cas déjà ont été investigués, dont 1 471 n'avaient pas de rapport avec une infection par le virus Zika.
Le ministère de la Santé brésilien considère qu'il y a eu « une infection par le Zika de la plupart des mères qui ont eu des bébés qui se sont vu diagnostiquer une microcéphalie ». Le Brésil, qui compte 1,5 million de cas de Zika, avait sonné l'alarme en octobre 2015, lors de l'apparition d'un nombre inhabituellement élevé dans le nord-est du pays de cas de microcéphalie. Habituellement, le pays enregistre en moyenne 150 cas de microcéphalies par an.
Jusqu'à présent, seuls le Brésil et Panama ont documenté des augmentations de la fréquence des microcéphalies. La Colombie, atteinte plus tardivement par l'épidémie, a commencé des investigations dans ce sens. Le Cap Vert qui a enregistré les premiers cas d'infection en décembre 2015, a annoncé le 15 mars un cas de microcéphalie. Une équipe de l’OMS et de l'Institut Pasteur de Dakar est actuellement en mission sur place à la demande des autorités locales.
Concernant le possible premier cas de microcéphalie en Martinique, le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) de la Martinique, Christian Ursulet, a confirmé mardi « la forte suspicion » de microcéphalie du fœtus d'une femme enceinte en Martinique, lors d’un point presse à l’ARS, à Fort-de-France.
L'ARS est en attente de la confirmation du Centre national de référence (CNR).
« La première confirmation a été établie au niveau du CHU et de ses experts », a précisé Christian Ursulet. Interrogé sur la date à laquelle cette contre-expertise serait connue, Christian Ursulet a répondu que ce n’était « qu’une question de jours ».
Un virus de plus en plus inquiétant
« Plus nous en apprenons sur ce virus, plus il est inquiétant, a reconnu Margaret Chan, nous savons maintenant que cette maladie, qui semblait encore bénigne au début de l'épidémie en mai 2015, est associée à de sévères implications dont une augmentation des syndromes de Guillain-Barré dans les 3 semaines qui suivent le début de l'épidémie et des microcéphalies dans les mois suivants. »
Le virus présent dans la région Amérique de l'OMS est désormais au large de l'Afrique. « Le virus circule dans 38 territoires, et il est impossible de prévoir où il va maintenant se répandre, explique Margaret Chan, nous allons affronter une crise sanitaire mondiale : plus de la moitié de la population mondiale réside dans des zones ou vit l’Aedes aegypti. »
L'OMS a listé 5 moyens de lutte contre le vecteur, mais seulement deux sont appelés à être prochainement déployés « avec prudence » via des programmes pilotes. Il s'agit de programmes pilotes de contrôle microbien des vecteurs utilisant des bactéries génétiquement modifiées.
Questions sur Albopictus
Par ailleurs, les chercheurs Sahorta Sarkar (université du Texas), Lauren Gardner et Nan Chen (université de Nouvelle Galle du Sud, Australie) affirment dans « The Lancet Infectious Disease » que les moustiques Aedes albopictus constituent des vecteurs aussi efficaces que l'Aedes aegypti contrairement à ce qu'affirment les scénarios de l'OMS qui « sous-estiment la capacité de l'Aedes albopictus à véhiculer et transmettre le virus ». En prenant cela en compte, les chercheurs estiment qu'une part plus large des États-Unis ainsi que l'Europe serait menacée par l'épidémie.
Selon les auteurs, « aux États Unis, seuls la Floride, le Texas et la Louisiane sont colonisés par l'Aedes aegypti à l'heure actuelle, mais les régions urbaines telles que Miami et Houston pourraient aussi être menacées » si l'Aedes albopictus constituait également un vecteur efficace. Ce serait également le cas d'autres régions du monde comme le Canada, le Chili et plusieurs pays européens et asiatiques. En France métropolitaine, l'Aedes albopictus est désormais solidement implanté dans 30 départements du sud de la France.
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