C’est dans les années 1970 que le tabagisme féminin a commencé à se développer en France. Et aujourd’hui ces femmes fumeuses arrivent à l’âge où elles développent des cancers mais aussi des complications cardiovasculaires. « La conséquence est qu’on assiste en France à une augmentation des infarctus du myocarde chez les femmes de 35 à 65 ans. Celle-ci a été de + 5 % par an entre 2008 et 2013 entre 45 et 55 ans, évolution corrélée avec celle du tabagisme féminin. C’est la seule catégorie de la population où on voit les infarctus augmenter, indique le Pr Thomas. Chez les personnes de moins de 50 ans, 70 à 80 % des infarctus surviennent chez des fumeurs. Cela est vrai chez les femmes comme chez les hommes. Chez les femmes de moins de 50 ans, le risque relatif d’infarctus du myocarde est multiplié par huit alors qu’il est multiplié par 5 chez les hommes par rapport à des individus non-fumeurs ».
À tabagisme équivalent, les femmes sont aussi plus vulnérables que les hommes. « Une méta-analyse a montré que le risque relatif de maladie coronaire était supérieur de 25 %. Les mécanismes susceptibles d’expliquer cette différence ne sont pas clairs. Cette méta-analyse n’a pu déterminer le rôle de la contraception œstroprogestative dans cette différence », indique le Pr Thomas, en ajoutant que ce surcroît de risque cardiovasculaire est retrouvé également pour les accidents vasculaires cérébraux. « Par ailleurs, une évolution de l’incidence de l’artériopathie oblitérante des membres inférieurs, de l’anévrisme de l’aorte abdominale et de la dissection aortique est également constatée en France ces dernières années chez les femmes. Il s’agit de pathologies que l’on trouve en général chez les sujets plutôt âgés. Mais depuis quelques années, on constate une augmentation significative du nombre d’anévrismes de l’aorte abdominale chez les femmes de 55 à 64 ans ».
Autre constat : une femme qui fume annule la protection cardiovasculaire dont elle bénéficie du fait d'être une femme. « Du fait de son système hormonal, une femme non ménopausée a un risque moindre. Mais ce bénéfice disparaît chez les fumeuses », indique le Pr Thomas, en insistant sur l’intérêt d’un arrêt le plus précoce possible du tabac pour annuler le risque cardiovasculaire ultérieur. « Une étude menée chez plus d’un million de femmes britanniques a montré que le risque de décès cardiovasculaire est multiplié par 5 chez des femmes qui restent fumeuses toute leur vie. Celles qui arrêtent à 30 ans annulent totalement ce surrisque cardiovasculaire. Et si elles arrêtent à 40 ans, ce surrisque n’est plus que de 10 %. Plus on arrête tard, plus on cumule les effets chroniques du tabac et le risque cardiovasculaire. Mais il y a toujours un bénéfice cardiovasculaire à arrêter quel que soit l’âge », précise le Pr Thomas.
D’après un entretien avec Pr Daniel Thomas, porte-parole de la Société française de tabacologie et président d’honneur de la Fédération française de cardiologie.
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