Cancer colorectal

Améliorer la rentabilité du dépistage organisé

Publié le 24/03/2011
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Crédit photo : PHANIE

DÉCIDÉ EN 2003, généralisé à toute la France depuis 2009, le dépistage colorectal repose actuellement sur la pratique d’un test Hémoccult II et, s’il se révèle positif, sur une coloscopie. En effet, le risque de trouver un polype ou un cancer est alors de 40 % quand le test est positif. Lorsque le test Hémoccult II est négatif, le patient est informé qu’il doit le refaire tous les deux ans. Ne sont concernés par ce dépistage organisé que les hommes et les femmes de 50 à 74 ans, sans symptômes ni antécédent personnel ou familial de polype ou de cancer colorectal et pour lesquels on estime que le risque de cancer colorectal est faible (de l’ordre de 3 à 4 % au cours de la vie). « Les personnes ayant des symptômes évocateurs ou des antécédents familiaux ou personnels doivent bien sûr avoir d’emblée d’une coloscopie » rappelle le Pr Étienne Dorval.

Un léger essoufflement du taux de participation.

Pour que le dépistage organisé soit efficace, il faut qu’au moins 50 % de la population ciblée y participe. Pour ceux qui ont un test positif, la coloscopie doit être faite dans au moins 90 % des cas. Pour les autres, un cancer ne pouvant être totalement exclu, la répétition du test tous les deux ans est également un gage d’efficacité, sans oublier de prévenir les patients de ne pas attendre autant si des symptômes apparaissent entre-temps.

Pour mettre en œuvre le dépistage, un cahier des charges a été élaboré par la DGS, en collaboration avec l’INCa. L’organisation est départementale et chaque centre de coordination du dépistage des cancers s’appuie sur les généralistes de son département qui ont reçu une formation pour proposer systématiquement ce test aux patients concernés. De leur côté, ces derniers reçoivent un courrier leur demandant de voir leur médecin traitant pour se faire remettre le test. « Les expérimentations faites en France, notamment en Bourgogne, ont montré que le médecin traitant était en effet le meilleur moyen de convaincre les patients de faire le dépistage. Il a été également noté que pour les personnes ne consultant pas leur médecin au cours des deux ans de la campagne, l’envoi du test par courrier était certes moins performant, mais permettait tout de même à 10 - 15 % des sujets de se décider finalement » poursuit le Pr Dorval.

Les premiers résultats obtenus en France ont montré un taux moyen de participation d’environ 43 %, ce qui est un peu en dessous de l’objectif fixé et un taux de coloscopie en cas de test positif, de l’ordre de 86 %. « Derrière ces chiffres moyens, on observe de grandes disparités d’un département à l’autre, sans qu’il y ait d’explication. Il est possible que le cahier des charges ait été mieux respecté dans certains départements que dans d’autres. Par ailleurs, on observe aussi de grandes disparités entre hommes et femmes (ces dernières participant davantage) et entre cinquantenaires et septuagénaires (les plus motivés), les hommes les plus jeunes échappant le plus souvent au dépistage. Or cela n’est pas sans poser problème puisque ce cancer touche davantage les hommes » insiste le Pr Dorval. Pour tenter d’améliorer ces chiffres mitigés, se pose désormais la question de savoir s’il ne faudrait pas y associer, en complément du médecin traitant, d’autres professionnels de la santé comme le pharmacien ou le médecin du travail. Certains départements comme le Finistère font d’ailleurs des essais en ce sens. « Autre source d’inquiétude : maintenant que l’on a un recul sur trois campagnes, dans certains départements, on a pu remarquer que le taux de participation diminuait d’une campagne à l’autre » remarque le Pr Dorval.

Tests immunologiques.

Bien que le test Hémoccult II soit performant, l’un des problèmes est qu’il n’est pas très pratique. De nombreux travaux ont été entrepris, notamment pour savoir si des tests immunologiques pourraient le remplacer. Avec ce nouveau procédé de dépistage, il suffit en effet de deux, voire d’un seul prélèvement, en piquant simplement dans la selle puis en plaçant le pic dans un flacon contenant une solution de transport, avant de le poster au laboratoire d’analyse. Avantage : il y a moins de manipulations nécessaires et donc une meilleure chance de participation. « Cependant, comme ces tests immunologiques (anticorps anti-hémoglobine humaine) sont très sensibles, il est très important de définir le seuil à partir duquel on va considérer ces tests comme positifs : plus le seuil choisi sera bas et plus on aura de résultats positifs, avec le risque de faire beaucoup de coloscopies pour « rien ». À l’inverse, plus le seuil sera élevé et moins on aura de faux positifs, mais aussi une moindre sensibilité » explique le Pr Dorval. Il s’agit donc de trouver le meilleur compromis scientifique et économique, ce qui fait actuellement l’objet de discussions. La réflexion est en cours et le changement de test pourrait se faire de façon progressive, entre 2011 et 2012.

D’après un entretien avec le Pr Étienne Dorval, CHRU de Tours.

Dr NATHALIE SZAPIRO
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Source : Le Quotidien du Médecin: 8930