Immunothérapie chez l’enfant

Le double intérêt de la voie sublinguale

Publié le 28/01/2011
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CES DERNIERES ANNÉES, l’immunotherapie s’est transformee avec, pour l’allergie respiratoire, le passage de l’administration par voie sous-cutanée, à la voie sublinguale. « Cette voie représente désormais 80 % des prescriptions, souligne le Pr Didier. Et si cette nouvelle voie d’administration séduit autant, c’est aussi parce qu’elle repose sur des données scientifiques en provenance d’études à grande échelle, avec des niveaux de preuves d’efficacité qui sont de bonne qualité. De plus, des études ont été faites spécifiquement dans la population pédiatrique, alors que l’on ne disposait auparavant que de données obtenues chez l’adulte (ou des groupes mélangés) et extrapolées à l’enfant. Or ces données montrent que la désensibilisation sublinguale est efficace sur la rhinite, la rhino-conjonctivite et l’asthme pour certains allergènes (pollens de graminées, de bouleau, par exemple). Des travaux sont en cours pour les acariens, avec des premiers résultats encourageants ».

Cette voie est évidemment plus facile à proposer chez l’enfant (dès 5 ans). Les doses et les protocoles sont les mêmes que chez l’adulte. Et, au-delà de l’efficacité qui est prouvée sur les symptômes, quelques études montrent une action sur l’histoire naturelle de la maladie : « on prévient l’apparition de nouvelles sensibilisations et semble-t-il, l’apparition d’un asthme chez les enfants qui ont une rhinite » souligne le Pr Didier.

La désensibilisation sublinguale a également renversé le rapport bénéfices/risques dans la mesure où il y a très peu d’effets secondaires graves et aucun accident anaphylactique répertorié. Seuls des effets secondaires locaux (picotements, prurit) sont notés, mais ils sont le plus souvent de courte durée et s’estompent au bout de quelques jours de prise. « Pour toutes ces raisons, chez l’enfant, on a désormais une forte incitation à reconsidérer l’immunothérapie, qui avait peut-être un peu été mise en retrait du fait de ses contraintes, de ses risques et d’un niveau de preuve d’efficacité alors insuffisant », insiste le Pr Didier. En revanche, il n’est pas certain que l’adhésion au traitement par voie sublinguale soit meilleure qu’avec la voie sous-cutanée. La désensibilisation reste un traitement contraignant, dans la mesure où il est quotidien et dure trois ans.

Des études à long terme.

« La désensibilisation aura encore plus de poids lorsque nous disposerons d’études qui montrent une réelle influence sur l’histoire naturelle de la maladie, avec un effet à long terme », indique le Pr Didier. Beaucoup d’études poursuivant cet objectif sont donc en cours. « Au CHU de Toulouse, nous participons à une étude multicentrique depuis 4 ans. Elle est menée chez quelque 500 adultes ayant une rhino-conjonctivite aux pollens, voire un asthme intermittent. Son objectif est de vérifier si à 4 ans et à 5 ans – c’est-à-dire 1 an et 2 ans après l’arrêt de la désensibilisation – si l’amélioration est plus importante dans le groupe traité que le groupe qui a reçu le placebo. Cette étude évaluera d’autres paramètres comme la diminution de la survenue d’autres sensibilisations et du nombre de cas d’asthme. Les résultats définitifs seront connus en 2012, mais nous disposons déjà de résultats intermédiaires qui montrent que l’efficacité de la désensibilisation a été importante et croissante sur les symptômes de la rhino-conjonctivites, avec une meilleure efficacité pour les années 2 et 3 que pour la première année », conclut le Pr Alain Didier.

D’après un entretien avec le Pr Alain Didier, service de pneumologie, CHU de Toulouse.

Dr NATHALIE SZAPIRO

Source : Le Quotidien du Médecin: 8895