ON CONNAÎT très bien le lien existant entre les pics de pollution et les crises d’asthme en termes d’hospitalisations et de recours aux soins. Cependant, une question restait en suspens : « la pollution de fond peut-elle être responsable de l’augmentation des cas d’asthme et d’allergie dans les pays industrialisés ? ». Des études longitudinales menées en période périnatale semblent montrer une relation entre l’exposition à la pollution, tant intérieure qu’extérieure, et les nouveaux cas d’asthme et d’allergie. Restait à mesurer la pollution de fond dans des études longitudinales pour prouver l’existence de cette relation. Pour cela, il fallait déterminer la relation entre le lieu de vie et l’exposition à une pollution chronique. Cela a été rendu possible par des modèles mathématiques tels que le géocodage personnalisé en fonction du lieu d’habitation de l’enfant (immeuble, étage, proximité ou non d’une voie à fort trafic routier, arrêt de bus, etc.) et l’exposition à une pollution. La pollution étant un mélange de particules et de gaz en suspension, émis essentiellement par le parc automobile, avec des polluants très différents l’été et l’hiver. Le géocodage a l’inconvénient de prendre en compte une pollution globalisée et non pas un polluant particulier. Cela dit, dans la réalité, nous sommes exposés à divers polluants et non pas à un seul.
Ces modèles ont pu être utilisés à l’échelle épidémiologique afin d’évaluer pour différentes populations, notamment les femmes enceintes durant le dernier trimestre de la grossesse et les enfants depuis la naissance jusqu’aux premières années de vie, le lien entre l’exposition individuelle et l’apparition éventuelle d’un asthme. Les polluants les mieux connus ont été étudiés : particules de dioxyde d’azote (NO2), ozone, particules fines émises par les moteurs Diesel. Il a ainsi été constaté l’existence d’une relation entre ces différents polluants et l’apparition de nouveaux cas, non seulement d’asthme chez les jeunes enfants, mais également d’allergie saisonnière aux pollens, donc liée plutôt à des allergènes extérieurs au domicile. Le rôle additif de la pollution sur les allergies polliniques est bien connu. Cela a été montré au Japon avec le cèdre du Japon, mais aussi sous nos climats, notamment avec les graminées. La pollution joue un rôle sur la pollinisation, mais aussi sur l’accroissement de la sensibilité à ces allergènes extérieurs.
Les enfants sont plus particulièrement touchés.
Le suivi de cohortes d’enfants a mis en évidence l’importance des conséquences de la pollution sur le développement pulmonaire. Une relation entre pollution et déficit de la fonction respiratoire a été démontrée. Cela est dû au fait que le jeune enfant est plus fragile que l’adulte, il respire plus vite, ses voies aériennes sont plus petites et plus immatures. Le retentissement de la pollution est donc plus important.
Chez la femme enceinte, il a été montré que certains types de pollution, notamment les pollutions particulaires, pendant le dernier trimestre de la grossesse peuvent entraîner un accroissement de la fréquence respiratoire et de certains médiateurs de l’inflammation comme le monoxyde d’azote au niveau du poumon. Une relation entre ces variables sanitaires (fréquence respiratoire, monoxyde d’azote exhalé) mesurées chez des nouveaux nés et l’exposition maternelle à une pollution particulaire a été mise en évidence. Avec un effet additif d’un polluant intérieur, le tabagisme passif.
La pollution, à la fois intérieure et extérieure, intervient par des phénomènes épigénétiques sur l’expression de gènes qui sont impliqués à la fois dans l’allergie, l’asthme, les pathologies respiratoires infectieuses notamment virales comme les bronchiolites.
D’après un entretien avec le Pr Jocelyne Just (hôpital Trousseau, Paris)
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